Tempête d'éléments

Cette mission s’annonçait d’ores et déjà délicate. Venu avec Shingen et aussi le garçon rencontré au tournoi, Yoshitsune, ils venaient d’avoir le débriefe de la part du doyen du village et les explications complètes sur le problème rencontré. A présent, il s’agissait de régler le problème. Loin du village, seuls en pleine montagne, le soir tombant, chacun d’eux trois commençait à réaliser que la présence d’un maître expérimenté aurait pu être souhaitable. Ils étaient accroupis dans des fourrés au bord d’une falaise abrupte, à observer le phénomène face à eux. Il s’agissait d’un tourbillon d’éléments, comme on les appelait. Les six pouvoirs rassemblés en une sorte de maelström furieux, fendant l’air et la terre, dans une cavité assez profonde, juste sous eux. Un gouffre creusé par ce pouvoir destructeur et qui ne cessait d’être creusé.

On aurait dit des comètes ou de grands esprits, chacun luisant d’une couleur différente, crépitant et crachant, frappant les uns dans les autres et contre les parois du gouffre. Le bruit était assourdissant ! Et le spectacle particulièrement effrayant. Ces grandes comètes valsaient avec une violence inouïe, au fond du gouffre. Sengoku sentit une goutte de sueur lui couler le long de la temple, déglutissant un peu en observant ça. C’était une bataille de purs esprits, à ses yeux, le premier qui s’aventurerait au milieu de cette force en mourrait aussitôt ! Une tornade de feu et de vent se formait, frappée ensuite par une vague d’eau perçante, puis par la foudre, qui éclatait avec brutalité contre les parois, aussitôt suivi par le grondement sourd de la terre et la cristallisation des parois par la glace. Ils n’étaient clairement pas armés pour affronter ça à seulement trois.

Nous allons avoir besoin de nos maîtres, souffla-t-il d’un ton peu enjoué. Nous ne sommes pas assez puissant pour affronter ça à nous trois. Par contre, le village… J’ai peur que ce truc ne provoque un éboulement ou une autre catastrophe, le temps que nous puissions revenir avec des renforts.

Comment le contenir, en attendant d’avoir de l’aide ? Les Temples étaient tous loin d’ici, ils avaient déjà mis longtemps avant d’atteindre ce village, tant il était isolé de tout. Les habitants du coin attendaient sûrement de l’aide depuis longtemps ! Il commença par dire qu’un d’entre eux pourrait rester le temps que les autres cherchent de l’aide, mais seul… Même à deux, ça ne servirait pas à grand-chose. Soudainement, pendant qu’ils débattaient de la meilleure démarche à suivre, la foudre frappa encore la paroi. Si brutalement que toute la colline en trembla et que la terre gronda. Secoués avec violence, Sengoku perdit tout à coup l’équilibre et poussa un cri de surprise en chutant directement dans le gouffre. Il tomba brutalement le long de la paroi raide et s’écrasa au sol, heureusement en arrivant sous le feu des éléments et pas directement à l’intérieur. Sans ça, il aurait été tué sur le coup.

Rien de cassé, apparemment, seulement quelques ecchymoses, de ce qu’il sentait. Assez sonné, il resta d’abord au sol, osant à peine bouger car les différents pouvoirs frappaient avec une force incroyable juste au-dessus de sa tête. Les autres allaient-ils bien ?! Très lentement, il recula en rampant et se colla plus loin, contre une paroi du gouffre. Impossible de voir ce qui se passait là-haut. Il était littéralement coincé.

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Début de mission : 17 – Efficacité : 18 – Peut-on recevoir de l’aide : échec – Blessures : 7

Eux qui avaient espéré un peu d’action sur cette mission, les voilà servi. Un peu trop servi, même ! Pour le coup, même si Shingen s’était dit tout le long du voyage qu’il espérait une mission intéressante et qui bouge, il commençait maintenant à regretter ce souhait. Toujours faire attention à ce qu’on peut souhaiter, bon sang, il le savait pourtant ! A quatre pattes au bord du gouffre, il regardait la tempête des éléments, se frapper les uns contre les autres dans un vacarme horrible, en se disant que venir ici à seulement trois, de leurs nouveaux en plus, n’était pas l’idée la plus brillante du siècle. Lorsque les villageois avaient contacté le temple principal avec leur appel à l’aide, ils n’avaient pas précisé la nature exacte du problème ! Ou ils n’avaient pas eu conscience que c’était important ? Si leurs maîtres avaient su, jamais ils n’auraient envoyé trois petits jeunes se charger de ça.

Il possédait le vent et le feu. Sengoku le vent. Yoshitsune la terre. Il manquait encore la glace, la foudre et l’eau. Sans compter un autre détail, le niveau de puissance nécessaire pour ramener le calme. La tempête de ces pouvoirs continuait de creuser ce gouffre, si on attendait trop longtemps, il allait complètement percer la colline puis s’écraser sur le village en contrebas. Ils étaient dans la merde, pour parler crûment. Franchement, il n’était pas du tout rassuré et ce qui le rassurait encore moins, c’était que son meilleur ami aussi était nerveux ! Si ça, c’était pas un signe que ça se passait très mal ! Le feu, la foudre, l’eau, la terre… Tous les éléments rugissaient comme des bêtes sauvages, c’était comme un affrontement entre eux six, alors qu’il s’agissait pourtant d’une « simple » tempête. Lorsque l’Orm était trop sensible ou tendu, il éclatait, comme ici. Un phénomène naturel très rare et très impressionnant, qu’il était très dur de contrôler.

Ils ne pourront pas avoir de l’aide avant au moins deux jours, au minimum, c’était bien ça le problème ! Alors quoi ? Shingen était plutôt d’avis de faire évacuer le village, carrément. S’ils envoyaient quelqu’un chercher des renforts, ce n’était pas à deux, pendant ce temps-là, qu’ils pourront empêcher cette tempête de tout détruire et protéger les villageois. Il allait rajouter qu’ils pouvaient aussi demander aux autorités locales d’ouvrir les hébergements d’urgence lorsqu’un coup de tonnerre frappa l’intérieur du gouffre, si violent qu’il en fit trembler la colline toute entière. Le jeune garçon s’écrasa à plat ventre contre le sol, secoué comme ses compagnons, puis son coeur rata un battement quand il entendit son ami crier tout à coup. Terrifié, il releva juste à temps la tête pour le voir disparaître à l’intérieur du gouffre. Tout droit dans la tempête !

Paniqué, il se précipita au bord du gouffre, pour tenter de voir Sengoku. Il était vivant ?! Shingen se redressa et tendit la main vers la tempête, voulant d’abord tenter de « repousser » le feu ou le vent, frayer un chemin, un passage, ne serait-ce qu’avoir un regard sur ce qui se passait au fond. Non seulement les éléments étaient trop puissant pour qu’il ne puisse seulement les dévier mais en plus, le retour de flammes fut très brutal. Le jeune garçon recula juste à temps pour ne pas recevoir un véritable geyser de feu et se brûla un peu les doigts en éteignant le feu ayant déjà pris dans sa manche au passage. Bordel de… Ils devaient absolument chercher de l’aide, faire évacuer le message, mais ils ne pouvaient pas laisser Sengoku là-dessous ! Il avait peut-être été blessé dans la chute, en plus,s i près de la tempête, il pouvait être frappé par la foudre, enterré vivant, brûlé vif, noyé ! Gelé sur place, aussi ! Propulsé par le ventre une paroi et s’y briser le coup.

"Si on ne le tire pas de là très vite, il va se faire tuer ! Nous… Tu… Bon, tu peux faire évacuer le village et aller chercher de l’aide ? Je reste là, je vais tenter de le faire sortir."

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Blessures avec le coup : 9
Tenter de se frayer un chemin : 15, échec

Tous les deux s’étaient relevés en vitesse et précipités au bord du gouffre pour essayer d’apercevoir leur confrère. Ce qui se révéla vite impossible. Isami était assez terrifié, maintenant, ils ne pouvaient même pas savoir s’il était vivant ou déjà mort ! Il tenta de crier pour l’appeler mais le fracas des éléments était bien trop puissant. Ils s’entendaient déjà à peine, tous les deux. Takeda se redressa un peu se concentra, mains tendues vers la force vivace sous leur nez. Il pouvait calmer un des éléments juste comme ça… ? Le feu ou le vent ? D’après ce qui arriva après, il avait choisit le feu. Isami n’était pas sûr de savoir lequel était le plus docile des deux, par contre, il comprit très vite que ça n’allait pas être si simple. Ils bondirent tous les deux très brusquement en arrière, au puissant retour de flamme, Takeda dû même frapper sa manche pour l’empêcher de s’embraser complètement. Compris, mauvaise idée !!

– Si on ne le tire pas de là très vite, il va se faire tuer ! Nous… Tu… Bon, tu peux faire évacuer le village et aller chercher de l’aide ? Je reste là, je vais tenter de le faire sortir.

– Et tu vas rester seul en attendant ? Pas question, à toi aussi, il pourrait arriver n’importe quoi. Attends deux minutes.

On se calme, on se calme, on se calme, un peu de sang-froid, tout allait très bien se passer, du sang-froid, on respire et on se calme. Il s’obligea à respirer bien fort et se calmer. Ils étaient formés pour agir contre ça, bon sang ! Enfin, certainement pas contre aussi fort déjà, le village ayant demandé de l’aide avait réalisé une très grosse erreur d’appréciation, mais tout de même ! A genoux dans l’herbe, plus loin du bord du gouffre, il réalisa deux petits golems de terre et leur insuffla ensuite, grâce à son pouvoir, de la « vie » et surtout des messages à délivrer. Un peu pour le village, pour leur demander de leur part d’évacuer de toute urgence, l’autre pour le temple le plus proche, réclamer de l’aide en urgence. Les deux vacillèrent un instant avant de filer vers les chemins de forêt, sur leurs petites jambes. Vu leur taille et la distance à parcourir, pour le golem de terre devant se rendre au temple, ça allait prendre un temps monstrueux…

En attendant, faire en sorte de sortir Hidehisa de là. Isami récupéra d’abord de la corde, dans son sac et l’attacha au bord du gouffre, solidement. Tout en expliquant son plan à Takeda. Le garçon devait sûrement le prendre pour un énorme cinglé, à ce stade. Il comptait tout simplement descendre en rappel en se collant contre la paroi un maximum, tout en évitant les différents pouvoirs frappant cette même paroi. En allant lentement et en surveillant à fond, pour sauter au bon moment, c’était sûrement réalisable ! Takeda pouvait rester en haut, s’assurer que la code ne tombe pas et lui avec, mais surtout le prévenir dès qu’il voyait une des forces violentes foncer dans sa direction. Le gouffre était déjà très large, ils avaient une chance de ne pas foncer dans ces pouvoirs tête baissée, après tout. Et puis, si leur collègue était blessé, ils n’avaient pas d’autres choix que le remonter comme ça.

– Fais-moi confiance, Takeda-san, ça va bien se passer. Il suffit de ne pas aller trop vite.

Même s’il y avait peut-être urgence, avec leur ami en bas, ils ne pouvaient quand même pas se permettre d’aller trop vite. Isami empoigna la corde puis commença lentement à descendre dans le gouffre, le coeur battant à une vitesse folle. Il commença sa progression, la tête tournée vers ces pouvoirs plutôt que là où il mettait les pieds. Car entre être frappé par un de ces trucs ou glisser et se faire mal en se rattrapant à la corde, le premier danger l’inquiétait nettement plus que le second. Ces mètres à avaler lui parurent une éternité assourdissante. La peur au ventre, il devait parfois sauter le long de la paroi, rentrer la tête dans les épaules lorsqu’un pouvoir passait bien trop près à son goût. Après plus de trois mètres, il finit enfin par repérer leur ami, collé contre une paroi tout au fond. Lui-même agrippé à la corde et contre le mur, il l’appela d’une voix forte.

– Si t’es pas blessé, essaye de te rapprocher de là ! J’arrive. On va remonter !

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Envoyer les messages : 11
Essayer de se faufiler : 3

Les éclairs et le feu passaient à juste quelques centimètres, parfois, au-dessus de sa tête. Ils rasaient le sol puis remontaient plus haut en vague violente dans tout le gouffre. Sengoku pensait bien que ses amis essayaient de l’appeler mais il ne pouvait pas leur répondre, le bruit était trop assourdissant. Doucement, les yeux rivés sur le balai des éléments, il se déplaça jusqu’à la paroi la plus éloignée possible d’eux, dans un renfoncement sans doute creusé par la foudre. Là, il fit l’inventaire des dégâts. Pas mal d’écorchures et d’hématomes, par contre, rien de cassé. Ses habits blancs étaient couverts de terre et de poussière, il se trouvait dans un état lamentable. Mais au moins, il devrait pouvoir s’en sortir. Le problème était qu’avec une falaise si abrupte, remonter sans corde ni rien… Il avait son pouvoir, évidemment, mais ne pouvait juste pas prendre le risque de l’utiliser en étant au cœur même d’une pareille tempête. Seule une tentative externe aurait une chance de marcher.

Les deux autres avaient dû partir chercher de l’aide, c’était le mieux à faire. En attendant leur retour, comment faire… ? Si jamais Sengoku devait rester longtemps dans ce trou, ses deux compagnons pourraient toujours aller récupérer des bouteilles d’eau au village et les lui lancer, le temps que des maîtres arrivent des temples à proximité. Sinon, il n’avait pas d’autre choix que de tenter de remonter sans corde ou piolet, à mains nues quoi, la falaise si raide, tout en évitant la tempête d’éléments. Dans le pire des cas, il chuterait de nouveau dans le gouffre. Peut-être se casserait-il quelque chose, mais au moins, il s’éloignerait de ça… C’était un danger mortel. Le problème, c’est qu’il avait encore une jambe fragile, depuis le tournoi. En pleine réflexion, il ne remarqua pas tout de suite le mouvement. Puis un éclat jaune lui fit décrocher la mâchoire. Yoshitsune. Qui descendait. En rappel ! Il était fou !

Être coincé ici, c’était une chose, mais mettre ses amis en danger à cause de ça, non, non, non, jamais ! Le garçon descendait lentement, surveillait la tempête de très près, et devait parfois brusquement sauter de côté pour éviter un des éléments. Mort de peur pour lui, Sengoku surveilla sa descente, le cœur au bord des lèvres. Lorsqu’il fut assez près, il lui cria de venir, s’il n’était pas blessé. Le jeune homme s’approcha avec une grande prudence, puis se colla à son tour à la paroi, glissa les pieds dans les aspérités pour grimper et rejoindre Yoshitsune. Ils durent s’accrocher comme ils le purent l’un à l’autre, en se laissant assez de liberté pour éviter les éléments au cas où. Là-haut, Shingen tirait lui aussi pour les aider à remonter plus vite. Ce fut long, très dangereux, très effrayant, mais ils arrivèrent peu à peu à la surface sans se faire tuer. Dès qu’ils posèrent un pied sur l’herbe, son meilleur ami les tira aussitôt tous les deux loin du bord du gouffre, avec force et en vitesse.

Sengoku en avait les jambes coupées, tant il avait eu peur, en plus du choc. Il s’effondra à moitié à plat ventre, dans l’herbe, le temps de reprendre son souffle. Oh bordel…

Je vous pensais partis chercher de l’aide… On a vraiment besoin.

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Remontée : 6

"Et tu vas rester seul en attendant ? Pas question, à toi aussi, il pourrait arriver n’importe quoi. Attends deux minutes."

Quoi, qu’est-ce qu’il comptait faire ? Yoshitsune reprit d’abord son souffle,les yeux fermés, puis s’empara à pleines poignées de terre pour en faire des petits bonhommes et les animer. Malgré la situation catastrophique, Shingen ne put s’empêcher de trouver ça très cool, c’était quand plus solide que les bonhommes de vent ou d’eau qu’ils pouvaient produire, de leur côté. Les créatures de terre vacillèrent légèrement, avant de partir, l’une vers la forêt, l’autre dans un autre chemin par les montagnes, vers le temple le plus proche. En combien de temps allaient-ils réussir à faire évacuer le village et ramener du renfort ? Le jeune homme les quitta des yeux lorsque leur confrère expliqua son plan. Tout en sortant de la corde et commencer à l’attacher. Il était complètement siphonné ! C’était un coup à se faire tuer ou bien à chuter lui aussi et se casser les deux jambes dans ce trou, voire la colonne vertébrale ! Avoir un blessé et perdu de plus, ça leur servira à quoi ?!

"Fais-moi confiance, Takeda-san, ça va bien se passer. Il suffit de ne pas aller trop vite."

"Aucun instinct de survie," marmonna-t-il entre ses dents.

Ils n’avaient pas cinquante solutions non plus… Shingen se plaça au bord du gouffre, s’assurant que tout tenait parfaitement, la corde entre les mains et les deux pieds bien calés contre des roches. Tout le long de la descente, il fuit de son mieux pour aider, terrifié à l’idée de les voir mourir tous les deux, là, sur place. Après ce qui lui sembla une pure éternité, il entendit Yoshitsune appeler leur ami, en bas, soulagé en se disant qu’il ne devait pas être trop blessé s’il pouvait bouger. Le retour parut encore plus long. Debout, cette fois, Shingen tirait avec vigueur pour les aider à grimper le plus vite possible, toute en évitant les éléments. Il y mit tant de force que ses mains devinrent vite rouge vif. Mais dès que ses amis furent à portée, il s’empara vivement d’eux par le col pour aussitôt les traîner plus loin, loin du gouffre, hors de danger. Tellement soulagé de les retrouver bien vivants qu’il aurait même pu en pleurer.

Sengoku n’avait pas l’air gravement blessé, heureusement, plutôt pas mal sonné. Yoshitsune non plus n’avait rien de grave, par bonheur. Shingen courut chercher leurs sacs, abandonnés un peu plus loin dans l’affaire et revint avec, pour leur donner de quoi boire mais aussi manger un peu, leur faire reprendre des forces. Là, allez… Il tapota l’épaule du jeune de Shirobotan avec un sourire, le remerciant grandement pour ce qu’il avait fait et surtout pour le féliciter. Il était jeune mais il était clair qu’il n’avait pas froid aux yeux ! Se jeter là-dedans pour aller quelqu’un, il fallait bien du courage. Sincèrement, bien joué, la performance était à saluer.

"Je vous pensais partis chercher de l’aide… On a vraiment besoin."

"Te laisser seul là-dedans… Tu es sorti, c’est le principal. Maintenant que nous sommes là tous les trois, on peut aller prévenir nous-même le village et le temps, ça ira sans doute plus vite, sans vouloir te vexer, hein, Yoshitsune-san. Vous pouvez marcher ?"

Il leur proposa d’aller à deux faire évacuer le village, autant pour être plus convaincants que pour pouvoir aider les villageois à partir plus vite. Lui-même allait filer au Temple, pour chercher des maîtres. Ils devaient faire au plus vite. Sitôt chacun prêt, il remit vite faite son sac sur son dos et partit aussitôt par les sentiers de montagne sans plus perdre une seconde.

Allez, allez, allez ! Plus vite, pitié, s’il te plaît ! Il lui tendit la main dès qu’il fut à portée pour l’aider à le rejoindre, à sa hauteur, puis lui glissa le bras autour de la taille pour le coller fermement contre lui et s’assurer qu’ils ne chutent pas tous les deux. D’ordinaire, il détestait qu’on le touche ou toucher les autres, mais là, pas le choix, circonstances exceptionnelles. Il cala son pied dans une aspérité de la roche, pour se pousser vers le haut, l’autre main serrée si fort contre la corde que sa main virait au rouge vif. Hidehisa s’accrochait à lui d’une main et se servait de l’autre pour les aider à se hisser. Là-haut, Takeda tirait de toute ses forces pour les faire remonter le plus vite possible. En arrivant enfin là-haut, il s’empara d’eux et les tira avec lui loin du gouffre, à l’orée des arbres à quelques mètres. Isami s’écroula à moitié par terre, le souffle, les bras et les jambes complètements coupés, à la fois par l’effort le stress. Il en voyait même de petites lumières danser devant ses yeux, peinant à reprendre son souffle.

Takeda alla leur chercher de l’eau et de quoi grignoter, pour les aider à se remettre de leurs émotions. Il vérifia aussi que personne n’était blessé. Hidehisa était couvert de bleus et d’hématomes, par contre, il n’avait rien de cassé. C’était déjà ça. Isami s’assit contre l’écorce de l’arbre et but de longues gorgées d’eau. Son cœur reprenait doucement un rythme à peu près normal. Et dire qu’il avait espéré, il n’y a même pas une semaine, un peu plus d’action en mission… Là, il avait été servi ! En plus, il avait espéré ça mais quand même avec une mission abordable, pour leur niveau de compétence. Parce que ça… ça… Il fallait au moins plusieurs maîtres expérimentés pour régler le problème ! Et un pour chacun des six pouvoirs, avec ça, ou au moins trois en maîtrisant deux chacun. Il soupira profondément en reposant la bouteille dans le sac, déjà épuisé. Si c’était ça qui les attendaient toutes les semaines une fois adultes et plus entraînés…

– Je vous pensais partis chercher de l’aide… On a vraiment besoin.

– Te laisser seul là-dedans… Tu es sorti, c’est le principal. Maintenant que nous sommes là tous les trois, on peut aller prévenir nous-même le village et le temps, ça ira sans doute plus vite, sans vouloir te vexer, hein, Yoshitsune-san. Vous pouvez marcher ?

Oui, oui… Il fourra en vrac ses affaires dans son sac et s’appuya contre l’arbre pour se remettre debout. Takeda leur lança d’aller au village et le faire évacuer, pendant qu’il partait chercher de l’aide au Temple. Sitôt parlé, il jeta ses propres affaires sur son dos et partit, moitié marchant, moitié courant, dans un sentier de montagne, disparaissant rapidement entre les arbres. Même avec l’aide son don, il n’y arrivera pas avant un bon moment… Surtout que la région était tellement sauvage que même le téléphone n’était pas installé partout. Sans compter qu’il n’était de toute façon pas très utilisé même en ville. Ils redescendirent au plus vite au village et allèrent frapper aux portes des maisons de leurs commanditaires. Isami avait un peu honte se présenter dans cet état, uniforme froissé et couvert de terre, mais au moins, cela eut un certain impact sur les villageois. Par chance, il n’y avait qu’une vingtaine de maisons. Et par malchance, beaucoup paniquèrent quand on leur annonça qu’ils devaient quitter leur village, en pleine nuit, à cause du phénomène là-haut dans la montagne.

– Où est-on censé aller, maintenant ? souffla un jeune père, en serrant son petit garçon dans ses bras, sa femme s’accrochant aussi à lui.

– Il y a une salle des fêtes pouvant servir d’abri, dans la petite ville voisine, dans la vallée, le maire ne fera pas de difficultés à l’ouvrir pour vous, en attendant que le problème soit réglé.

Enfin, c’est ce qu’il pensait. En attendant que chacun prenne ses affaires et sorte, il prévint justement Hidehisa qu’il descendait en premier, pour justement prévenir la ville de la situation et qu’ils avaient besoin d’ouvrir la salle pour ces villageois.

Te laisser seul là-dedans… Tu es sorti, c’est le principal. Maintenant que nous sommes là tous les trois, on peut aller prévenir nous-même le village et le temps, ça ira sans doute plus vite, sans vouloir te vexer, hein, Yoshitsune-san. Vous pouvez marcher ?

Ça va aller.

Il se secoua lui-même, intérieurement, avant de se lever et récupérer lui aussi ses affaires. Shingen ne perdit pas une minute de plus pour courir vers les montagnes, pendant qu’eux deux redescendaient vers le village. Un réveil en fanfare pour la plupart des habitants, sans compter ceux qui ne crurent d’abord pas que la situation là-haut était si grave. Sengoku dû se retenir de soupirer très fort lorsque, à la quatrième maison, le grand-père y habitant refusa d’abord catégoriquement de quitter son logement en pleine nuit alors qu’ils avaient fait appel à trois sentinelles pour régler le problème. Le jeune homme tenta de lui faire entendre raison, poliment, sans grand succès. Ce fut le chef de village qui dû intervenir et l’aider à convaincre le vieil homme de suivre le mouvement. Yoshitsune-san partit en amont, le temps de prévenir le maire de la petite commune de la vallée. Préparer aussi une salle où les habitants pourront être hébergés cette nuit, voire également demain dans la journée, suivant la situation là-haut.

Il aida quelques personnes à emballer quelques affaires de base puis à les porter ensuite, sur le chemin de la vallée. Régulièrement, il lançait des regards en arrière, pour s’assurer que le grondement ne s’accentuait pas. On aurait presque dit un volcan en éveil. Arrivés en bas, il escorta les habitants jusqu’à la petite salle des fêtes, où le maire de la ville et deux adjoints, visiblement à peine réveillés, étaient déjà occupés à préparer un lei d’accueil aussi confortable que possible. Le temps que les habitants s’installent comme ils le pouvaient, il retrouva Yoshitsune-san et informa avec lui le maire comme le chef de village de la situation exacte, là-haut, leur racontant ce qu’ils avaient vu et tenté. Les deux semblèrent à la fois soulagés que leur ami soit parti chercher des maîtres plus expérimentés et inquiets car ils savaient que le chemin était assez long. Ils étaient tant isolés de tout, dans cette vallée.

Ils les saluèrent ensuite, devant retourner là-haut pour s’assurer que la situation ne se dégradait pas, le temps que leurs maîtres arrivent, et pouvoir agir en cas de besoin. Autant que possible. En chemin, c’est là qu’il prit le temps de remercier plus sereinement Yoshitsune-san pour son aide et le courage dont il avait fait preuve. Surtout à quinze ans, il méritait plus de reconnaissance que les adultes, selon Sengoku. Un ton plus léger qu’il perdit néanmoins e parvenant de nouveau près de l’enfer des éléments. Ce qui l’inquiétait surtout, c’est bien qu’une partie de la colline ne s’effondre sur le village. Heureusement, il n’y avait pas de volcans à proximité.

Séparons-nous pour surveiller chacun une zone. Il faut surtout empêcher à tout prix qui que ce soit d’approcher.

Il lui pointa du doigt le recoin en hauteur où il comptait se placer, attendit que son ami se décide, puis se mit en route. De là, il avait à la fois une bonne vue sur la tempête et une bonne vue sur trois routes de montage, d’où il pourrait voir arriver d’éventuels promeneurs. Maintenant, s’installer aussi à l’abri que possible, préparer un feu de camp, et attendre. De l’aide allait bien finir par arriver…

Une situation exceptionnelle. De tels déchaînements de pouvoir étaient bien rares, tout en plus en voyait-on un seul par an. Cependant, depuis environ trois ans, ces situations devenaient plus fréquentes. Devait-on y voir un signe que l’Orm était affaibli ou malade ? Ou encore qu’il eût pu être attaqué ? De tels signes ne pouvaient être pris à la légère ! Les trois petits jeunes avaient bien fait leur travail, en faisant évacuer le village le plus proche il y a quelques jours et en ayant ensuite sécurisé les lieux. Ainsi, personne n’avait été blessé. Les huit maîtres, arrivés tôt en cette nouvelle nuit, avaient d’abord pris un moment pour examiner le phénomène puis pour réfléchir à un angle d’attaque. Cinq hommes, trois femmes, possédant à eux huit tous les éléments existants et parés à s’occuper de cela. Il était très clair que les habitants ayant envoyés l’appel à l’aide initial au Temple avaient grandement sous-estimé le problème. Ils auraient dû faire appel aussitôt à des maîtres expérimentés, des juniors ne pouvaient se charger de cela seuls. Même des compagnons auraient eu des difficultés.

Une fois leur stratégie décidée, tous se mirent en place. Miyuki ferma un bref instant les yeux, convoquant son pouvoir avec une légère inspiration. Ses mains crépitèrent d’étincelles, puis furent vite enveloppés dans des auras bruyantes et électriques, comme chacun de ses confrères, avec leurs propres éléments. Ensemble, d’un seul mouvement, ils firent fondre sèchement leurs pouvoirs dans cette tempête surnaturelle. Elle attrapa d’un lasso de foudre la manifestation la concernant, au milieu de la tempête, et l’enserra brutalement pour la tirer vers elle et la séparer des autres. Une manœuvre répétée à l’identique pour tous ses confrères. Ils commencèrent par disloquer la structure même de la tempête, dans un bruit terrible, forçant les éléments à se fractionner les uns des autres. Sans perdre une seconde, Miyuki attira de force cette masse blanche et électrisée vers elle, pour l’envelopper de son propre don et la détruire.

Le vacarme était tel qu’il devait résonner dans toute la vallée. Tout comme la lumière et les flashs émis par la tempête firent violemment briller tout l’espace, d’une lueur mortelle. Deux des maîtres, sur les huit, protégeaient le restant du groupe à se battre, pour leur éviter des blessures lorsque les éléments ciblés se défendaient. Le combat fut âpre, durant de très longues minutes avant qu’ils ne parviennent à mater le phénomène, tous ensemble. Le calme revint alors très brutalement, sur un spectacle assez désolant. Un immense gouffre, très profond, les alentours calcinés ou brisés. Le maître géomancien s’approcha du bord du gouffre et se mit à genoux, ayant maintenant pour devoir de faire revenir pierre, roche et terre pour combler le gouffre formé. Un autre géomancien et un aquamancien allèrent, eux, s’occuper des arbres et de la végétation meurtris par la tempête. Ne pouvant aider à soigner la nature, Miyuki se détourna du chantier, sans faire cas de la terre tremblant si fort alors qu’on s’activait à combler le gouffre. Elle alla retrouver les trois jeunes, dont deux venaient visiblement du même temple.

"Tout ira bien, à présent," leur dit-elle avec un petit sourire. "Le gouffre va être comblé, la nature se portera de nouveaux mieux et en paix d’ici peu de temps. Tous les trois avez très bien agi, malgré la situation. Nous ne manquerons pas de le signaler aux responsables de vos maisons respectives."

Le jeune homme de dix-huit ans avait parcouru aussi vite que possible le trajet vers le temple, s’aidant de son premier élément pour franchir certains obstacles ou faire une « chute libre » en cas de besoin, au lieu de prendre de petits sentiers tortueux. Le tout en se servant de son second pouvoir pour écarter les habitants poilus des montagnes un peu trop agressifs, à son passage, le prenant pour un envahisseur de leur territoire, sans aucun doute. Même s’il n’aimait pas trop ça, Shingen n’avait pas le temps de négocier le passage avec un ours. Il risquait surtout de mettre le feu à la vallée toute entière s’il n’y prenait pas garde, ce devait être la toute dernière solution d’urgence. Heureusement, la plupart des animaux craignaient l’humain et ne s’approchaient pas. Même les loups préféraient très souvent la fuite que la confrontation. Lorsqu’il parvint au Temple, il était complètement épuisé, les jambes douloureuses mais heureux d’arriver enfin à destination. Il demanda aussitôt, aux premiers qu’il croisa, de pouvoir rencontrer les maîtres des lieux, pour exposer le cas et obtenir de l’aide.

Le trajet en sens inverse fut un moindre supplice pour ses jambes car une partie se fit en voiture. Jamais il n’avait autant béni les nouvelles avancées technologiques qu’en cet instant… Seule la fin dû se faire à pied, car les sentiers et routes de montagne, où ils se rendaient, n’étaient pas praticables autrement. Dès leur arrivée, les maîtres appelés en renfort s’attelèrent ensemble à la tâche, pendant qu’il allait retrouver ses deux amis. Il leur demanda d’abord s’ils allaient bien puis comment c’était passé les derniers jours, s’ils n’avaient pas eu de soucis avec la tempête d’éléments ou pour sécuriser la zone. Navré de ne pas avoir pu amener du renfort plus vite… Il avait vraiment fait au mieux pour ne pas perdre de temps, se reposant à peine, en cours de trajet. Ce qui se faisait sérieusement se ressentir, en cet instant… Tout droit maintenant écartés du combat, ils pouvaient observer, de loin, l’action mise en place par leurs aînés. Surtout, le pouvoir déployé pour calmer le jeu.

Toute personne observant ça ne pourrait être que très impressionnée. Les yeux rivés sur le « spectacle », qui n’en était bien sûr pas un, il n’en perdait pas une miette, très attentif à tous les gestes effectués durant l’ensemble de l’opération. Lorsque tout fut terminé, il en resta bouche bée, mélange stupéfaction et admiration. Quelques-uns des maîtres se mirent aussitôt à l’ouvrage, pour soigner la nature malmenée et surtout sécuriser la zone, écarter tout risque d’éboulement une bonne pour toutes. Maître Tamora s’avança vers eux l’instant suivant, avec un petit sourire. Shingen s’efforça vivement de revenir à la réalité, pour la saluer à nouveau, correctement, comme le voulait la politesse. Plus que tout, la remercier pour son action, ainsi qu’à ses confrères.

"Le gouffre va être comblé, la nature se portera de nouveaux mieux et en paix d’ici peu de temps. Tous les trois avez très bien agi, malgré la situation. Nous ne manquerons pas de le signaler aux responsables de vos maisons respectives."

"Merci, maître Tamora. Mais si vous le permettez, c’est surtout l’action de Yoshitsune-san qu’il faut saluer, sa réaction a été très courageuse et a permis d’éviter un drame."

Tout en parlant, il avait posé la main dans le dos de leur jeune confrère pour légèrement le pousser en avant. Jamais Shingen n’oubliera ce qu’il avait osé faire pour sortir Sengoku de là, même s’il avait vraiment pris de trop gros risques à ses yeux. Il méritait de la reconnaissance, pour cet acte de courage !

De… De rien. Il était encore un peu secoué, lui aussi. Avec le recul, il comprenait mieux que leur ami l’ait traité de cinglé, il n’avait pas pris le temps de beaucoup y réfléchir. De toute façon, s’il l’avait fait, il ne se serait pas décidé à y aller. De retour là-haut, ils prirent chacun un point de surveillance et établirent un campement de fortune rapide. Ne restait plus qu’à attendre et prier pour que la situation ne s’envenime pas… Les heures défilèrent, puis les jours… Isami avait déjà l’habitude de camper, lorsque les missions s’éternisaient et qu’ils devaient rester en pleine nature, en revanche, avec un tel problème juste sous leur nez, cette attente devenait très insupportable. Ils n’eurent pas tant besoin de chasser des importuns ou voyageurs égarés dans le coin, très peu de personnes osaient s’approcher dès qu’elles entendaient pareil vacarme. Le phénomène, lui, ne faiblit pas d’intensité un seul instant, le jeune garçon avait même l’impression qu’il s’amplifiait…

L’arrivée des renforts fut une véritable délivrance. Il fut plus que ravi, le jour où ils arrivèrent, de leur laisser tout le champ libre nécessaire ! De quelques gestes rapides, il ramassa ses maigres affaires de camping et dévala le sentier en pente, contournant la tempête pour aller rejoindre ses deux compagnons. De leur petit point d’observation, ils purent suivre le travail des huit maîtres engagés. Isami en laissa tomber son sac par terre, soufflé par ce qu’il eut sous les yeux. La puissance déchaînée et celle de leurs maîtres… Le bruit était à peine supportable mais ce qu’il voyait en valait quand même la peine. C’était une démonstration de pouvoir jamais observée auparavant, la manière dont ils saisissaient les éléments avec les leurs, pour les séparer brusquement les uns et des autres et briser la tempête. Ça ne dura pas si longtemps, juste quelques minutes, mais ce fut très intense. Le silence qui revint brutalement les laissa tous abasourdi, comme s’ils sortaient à peine la tête de l’eau après une très longue apnée.

Presque aussitôt, les maîtres le pouvant s’activèrent à combler le gouffre, soigner les arbres et s’assurer qu’il n’y avait désormais plus aucun risque d’éboulement. Est-ce qu’eux aussi pouvaient aider à ça ou… ? Car ils n’avaient pas pu faire grand-chose, jusque là, il se sentait gêné de rester planté dans leur coin à ne rien faire. Avant qu’il n’ait pu bouger, cependant, une des maîtres vint vers eux. Stoppant le mouvement, il la salua avec respect. Il était plutôt rassuré d’entendre qu’il ne restera pas tant de séquelles sur la nature.

– Tous les trois avez très bien agi, malgré la situation. Nous ne manquerons pas de le signaler aux responsables de vos maisons respectives.

– Merci, maître Tamora. Mais si vous le permettez, c’est surtout l’action de Yoshitsune-san qu’il faut saluer, sa réaction a été très courageuse et a permis d’éviter un drame.

Isami, qui s’apprêtait simplement à a remercier lui aussi et déclarer qu’ils n’avaient pas pu faire tant que ça, se sentit rougir jusqu’à la racine des cheveux. Puis jeta un regard un peu paniqué, en coin, vers Takeda-San. Encore plus rouge, il put juste bafouiller que ce n’était rien, puis se tut, tête baissée. Paradoxe vivant, il essayait de toutes ses forces de s’améliorer et gagner la reconnaissance de ses pairs, mais lorsqu’on le poussait en avant, il perdait aussitôt tous ses moyens. Si on pouvait très vite passer à autre chose, un autre sujet, peu importe lequel, dès maintenant, ça serait parfait !

Voilà, c’était terminé… Sengoku poussa un petit soupir de soulagement, absolument ravi que le tout ait pu être maîtrisé sans faire de victimes. C’était ça le plus important ! Lorsque les maîtres auront terminé de combler le gouffre et soigner les alentours, tous les habitants du village pourront rentrer paisiblement chez eux. Le risque d’éboulement maintenant écarté. Il était juste dommage que ça soit eux trois qui soient venu en premier, mais les pauvres n’avaient pu deviner que le danger était si important et que seuls des maîtres expérimentés pouvaient prendre en main le problème. Maître Tamora vint ensuite vers eux, il inclina la tête et fit le geste traditionnel pour la saluer, avec respect. Derrière elle, le bruit avait repris, forcément, alors que les différents maîtres travaillaient à réparer les dégâts. Sengoku ignorait comment les y aider, à vrai dire… Il se demandait s’ils ne feraient pas simplement que les gêner. Leur différence de niveau n’était pas à prendre à la légère.

Le gouffre va être comblé, la nature se portera de nouveaux mieux et en paix d’ici peu de temps. Tous les trois avez très bien agi, malgré la situation. Nous ne manquerons pas de le signaler aux responsables de vos maisons respectives.

Merci, maître Tamora. Mais si vous le permettez, c’est surtout l’action de Yoshitsune-san qu’il faut saluer, sa réaction a été très courageuse et a permis d’éviter un drame.

Yoshitsune-san devint très rouge très vite, avant de bafouiller que ce n’était rien et baisser la tête. Oh, allons, il n’y avait pas de raison d’être gêné, bien au contraire ! Sengoku précisa d’ailleurs à la suite de ça qu’il méritait en effet plus de reconnaissance car grâce à lui, il avait évité des blessures graves, voire pire encore. Il fallait le souligner, que son Temple sache ce qu’il avait fait et qu’il obtienne la reconnaissance nécessaire et méritée. Maître Tamora leur assura avec un sourire qu’elle n’oubliera pas cela également, puis leur conseilla d’aller retrouver les habitants du village voisin. Les assurer que le problème allait être définitivement réglé, dès lors que leur action ici sera achevée. Puis les inviter à regagner leurs maison d’ici deux heures environ. Ils repartirent ensuite, sacs sur le dos, sur le chemin menant à la vallée. Cette fois plus tranquillement. En route, Sengoku retourna la tête vers leur jeune ami, sourire aux lèvres.

Ne sois vraiment pas gêné. Pour ce que tu as fait, tu mérites de la reconnaissance, il n’y a aucune honte à le faire savoir, bien au contraire.

Il lui tapota l’épaule, avec un air encourageant. Maintenant que tout était quasiment terminé, il respirait plus librement. Surtout, cette mission était une nouvelle preuve que les membres de différents temples pouvaient très bien coopérer ensemble ! Ça lui plairait, il aimait bien découvrir les méthodes des autres institutions et ne pas se borner à une unique méthode. Travailler toue ensemble ne pouvaient que tous les enrichir. C’est d’ailleurs ce qu’il ajouta, d’un ton plus fort et enthousiaste, à ses deux amis. Même si les Temples n’étaient pas pour mutualiser certains entraînements ou même encourager la coopération, eux-mêmes pouvaient malgré tout demander à plus se retrouver en mission. Exactement comme celle-ci. Ça devrait aussi faire plaisir à Shingen, lui qui s’inquiétait justement de la baisse de coopération entre tous les groupes d’élémentaires. Il n’y avait aucune fatalité là-dedans.

Une fois qu’on aura terminé cette mission, que diriez-vous de prendre le temps de déjeuner quelque part, avant qu’on ne doive se séparer ? Ça pourrait être sympa et puis, nous n’avons pas d’heure fixe, réellement, pour rentrer.

Leur mission était quasiment terminée, ils allaient devoir retourner vers les habitants du village pour expliquer ce qui s’était produit, leur indiquer quand ils pourront tous regagner leurs demeures et ça en sera terminé. Ils saluèrent les maîtres, prirent leurs sacs puis repartirent plus tranquillement en direction de la vallée. C’est en chemin que son meilleur ami se chargea de rassurer encore Yoshitsune-san. Shingen, de son côté, laissait le stress retomber… Il n’y avait pas eu de blessures graves mais cette fois, ils étaient vraiment passé à côté du pire. Sengoku avait bien frôlé la mort ! Yoshitsune-san avait été très courageux. Et très inconscient. Mais très courageux. Il n’y avait aucun doute sur le fait qu’il avait le potentiel pour aller loin, une fois plus âgé et avec plus de confiance en lui. S’il arrivait à régler ça, il pourrait devenir une star, dans son Temple ! Mais bon, il était encore tout jeune, après tout, on ne pouvait pas lui en vouloir.

"Une fois qu’on aura terminé cette mission, que diriez-vous de prendre le temps de déjeuner quelque part, avant qu’on ne doive se séparer ? Ça pourrait être sympa et puis, nous n’avons pas d’heure fixe, réellement, pour rentrer. "

"Vendu, pour ma part. "

Il attendit l’avis de leur troisième confrère, avant d’embrayer sur la meilleure manière d’expliquer le cas aux villageois, histoire de ne pas les effrayer pour rien. Ils en parlèrent tout le long du chemin, avant de retrouver les pauvres habitants, toujours logés comme dans un camping, dans la salle des fêtes. Le doyen du village accueillit leur retour avec une très grande joie et ils passèrent un moment à lui détailler tout ce qui avait été fait. Shingen s’efforça de se montrer le plus rassurant possible, il sentait bien leur stress. Ces derniers jours avaient dû un tel enfer d’angoisse ! Entre la crainte qu’il y ait des blessés, que le village entier se fasse emporter par un éboulement, la terreur d’être frappé par le phénomène, l’impossibilité de se rendre en montagne et dans les pâturages, surtout, etc. Après une longue heure d’explications, les villageois commencèrent finalement à rassembler leurs affaires et se préparer à rentrer. Leur devoir achevé, ils prirent poliment congé et repartirent. Cette ville-ci était un peu plus grande, mais restait encore très isolée.

"On peut prendre le prochain bus," marmonna Shingen, penché pour détailler les horaires inscrits sur le panneau. "Puis aller à Manugoria. De là, ça sera plus simple pour tout le monde de rentrer chez soi. Il y a une navette directement pour Rubï, Yoshitsune-san.

Il tapota le trajet dessiné du bout du doigt, avant de s’écarter pour qu’il puisse vérifier tout ça. Le bus passait d’ici une vingtaine de minutes, il en avaient terminé juste à temps ! En se retournant, Shingen vit au loin la file des villageois commencer à emprunter la petite route remontant vers le village. Il les indiqua aux deux autres, avec un nouveau sourire, si soulagé que ça se termine bien. Pas que ça soit si rare, mais bon, étant donné la dangerosité de cette mission… Ils bavardèrent en attendant l’arrivée du bus, de cette mission mais aussi, à froid, des techniques qu’ils auraient pu employer. Hors urgence, c’était plus facile d’y réfléchir mais Shingen savait qu’ils n’auraient pas pu faire beaucoup mieux. Sans compter la fatigue tombant tout d’un bloc dessus, maintenant que la pression était repartie. Peu à peu, l’espace d’attente pour le bus se remplit, les autres voyageurs jetant des regards amusés ou un peu inquiets, en avisant leurs tenues, mais aucun ne vint les interpeller.

"C’est quand même bizarre," finit-il par dire d’un ton plus lent, "que la tempête se soit déclenchée ici. Il n’y avait pourtant aucun facteur pour la favoriser."

Il avait baissé le temps, histoire de ne pas effrayer les autres passagers. Au même moment, le bus arriva près de leur arrêt, détournant l’attention de tout le monde. Shingen décida de garder ses réflexions pour lui, le temps qu’ils s’installent et qu’ils puissent être sûr que personne ne pourra les entendre.