Avril 1932. Les soucis mondiaux s'étendent.
 
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 Réveillon quelque peu perturbé

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Âge RPG : 26 ans
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Céleste Dumoulin
Espionne
Céleste Dumoulin
MessageSujet: Réveillon quelque peu perturbé   Réveillon quelque peu perturbé EmptyVen 19 Jan - 11:36

Sortir des environs de Gray et du Pensionnat faisait un bien fou, et pas qu’à Céleste. Elle avait l’impression que voir d’autres personnes, aimables et gentilles, aidait Lucas même si elle faisait d’immenses efforts depuis leur discussion ensemble. La grande sœur essayait de se comporter en mère, petit à petit, d’être un peu plus attentionnée avec Cyprien et moins distante même si ce n’était pas encore spontané. Désolée, impossible de changer de comportement en un jour ! Et puis, comme pour en ajouter une couche, il y avait eu l’effondrement de l’école, en grosse partie, suivi de l’évacuation des élèves au beau milieu de la nuit, avançant le début des vacances de quelques jours. Pour ne pas subir cette ambiance ô combien pesante, ils étaient partis chez les parents de Cyprien un tout petit peu plus tôt, sitôt les cours de Lucas terminés, ayant eu le temps de tout préparer pendant l’absence du petit. Et puis, heureusement qu’Estelle était là, son humeur positive et bienveillante était la bienvenue ! C’est pourquoi ils n’avaient pas refusé son invitation, passer une soirée ensemble avant de partir en vacances était une excellente idée.

Les parents de Cyprien vivaient à quelques kilomètres de Bordeaux, dans la campagne, ce qui changeait déjà énormément de ce que Céleste avait l’habitude de voir. Bon, au Pensionnat, c’était la campagne, mais jamais elle n’avait vécu en dehors de l’école ailleurs que dans de grandes villes. L’agitation, la proximité de tout en quelques minutes, c’était bien plus simple pour une jeune femme célibataire sans attache. En approchant de la demeure des parents de son collègue, elle fut d’abord surprise de découvrir une ferme, habitation donc très grande, qui avait été achetée lorsqu’il était petit et qu’ils avaient rénovée ensuite. Après les salutations, présentations et autres formalités sans tomber dans l’excès non plus, semblable au caractère de Cyprien en fin de compte, Céleste eut le temps d’apercevoir des lapins, des poules à l’extérieur et trois chats ainsi qu’un chien sur leur chemin menant à ce qui devait être le salon. Sur le coup, la professeure n’avait pas pu réprimer un sursaut de surprise, ne s’y attendant pas vraiment lorsque les chats et le chien foncèrent presque sur Cyprien pour lui dire bonjour.

Une chose est sûre, jamais Céleste n’avait connu pareil Réveillon de Noël. Depuis qu’elle avait quitté sa famille, elle le passait souvent seule, n’étant plus croyante et les fêtes de fin d’année lui donnant un air morose à cause de son anniversaire qui approchait. Comme Lucas l’avait dit, elle ne pensait plus aux vivants… Lançant un regard à son petit frère, bien occupé ici et qui allait sûrement se changer les idées sans problème dans cette ferme, elle fit un grand sourire à Cyprien en gagnant les chambres que leur avaient préparée ses parents pour y déposer leurs affaires avant le réveillon. Céleste déposa la valise de Lucas dans sa chambre, attenante à la leur, le tout dans des airs très rustiques sans donner l’impression de vivre dans une ferme, et se prépara pour le Réveillon, se changeant comme ils avaient voyagé assez longtemps et avaient eu une très longue semaine. Enfilant une robe d’hiver avec des touches de rouge et or pour Noël, sa tenue restait très sobre, les cheveux attachés, et elle retrouva Cyprien en bas comme il avait déjà fini. La soirée en elle-même commença ensuite très vite, tous ayant une place dans une salle à manger aux dimensions normales pour une ferme, la table décorée avec goût, la soirée envoyant valser tous les préjugés que Céleste avait sur les Noël en famille. Si elle était un peu réticente au début, elle ne regrettait pas du tout d’avoir accepté…

La soirée touchait à sa fin, la radio diffusant des chants de Noël et transmettant la Messe de Minuit se déroulant à Paris au moment-même. Minuit allait sonner dans quelques secondes, chacun se tenant prêt à lever son verre et à se souhaiter un Joyeux Noël avant qu’eux-mêmes partent en vacances, très loin d’ici, de Paris, de ce qu’il restait du Pensionnat et de tout ce que représentait ce début d’année scolaire. Plus que trois secondes. Deux. Une. Ils commencèrent tous à se souhaiter un Joyeux Noël avec un grand sourire, Céleste s’apprêtant à embrasser Cyprien lorsqu’un bruit très étrange envahit le poste de radio, le signal se brouillant sans raison apparente. Puis, de manière très distincte, des voix s’élevèrent du poste, lui glaçant le sang. Elle échangea un regard avec son compagnon, se rapprochant de lui pour se blottir dans ses bras, écoutant le message. Le message… Une déclaration de guerre, pure et dure. Un message qu’ils écoutèrent silencieusement, Céleste rapprochant Lucas d’elle pour le tenir et le câliner, les mots utilisés par les Résistants se frayant un chemin jusqu’à son cerveau avec tout le sens qu’ils signifiaient, les conséquences qu’ils engendraient.

« Française, Français,

C’est un triste jour pour la République, qui vient d’être officiellement enterrée après des mois de luttes et de souffrance. Le Coup d’État a été le point d’orgue pour imposer un régime totalitaire, xénophobe et cruel, et qui ne s’en cache même plus, avec tant de nouvelles lois imposées pour contrôler toujours plus le pays.

Une communauté Jurassienne massacrée, des villages et villes où les arrestations arbitraires se multiplient, des attentats menés contre des familles innocentes, des meurtres, des empoisonnements, des menaces, des agressions en plein jour, tant de disparitions et d’assassinat passés sous silence, par la complicité des journaux ! Voilà ce qu’est notre pays aujourd’hui ! Voilà quoi les citoyens en sont rendus, à la peur, à la méfiance, à la terreur d’être dénoncé anonymement et de disparaître sans laisser de traces.

Françaises, Français, que vous soyez ou non porteur d’un élément, vous ne devez plus baisser la tête et fermer les yeux. L’Heure de la Résistance est venue, nous répondrons à la déclaration de guerre lancée par cet illégitime gouvernement avec toute la force dont nous serons capable ! Ouvrez les yeux sur ces familles entières massacrées, sur vos enfants enlevés puis tués ! Nous combattrons, nous ne laisserons plus ces crimes être couverts par les dictateurs montés à la tête de ce pays ni les médias à leur solde.

Ensemble, nous ferons renaître la République de ses cendres, nos frères, nos sœurs, rejoignez-nous, nous prenons les armes. »

C’était pour cette raison que Gabriella avait dit qu’elle la recontacterait à propos de la mission… Ils préparaient ce message, ce moment et toutes ses conséquences depuis longtemps, tout comme l’accueil des Résistants qui se retrouveraient sans abri. A Paris, la situation devait déjà s’être détériorée, Céleste imaginant sans mal le nombre de patrouilles de police dans les rues, la panique, les élémentaires qui se réveillaient avec ce message et se décidaient à agir. Et le gouvernement qui avait sans doute commencé ses recherches dès le début du message, comprenant ce qu’il se passait. Et elle avait accepté d’aider, s’était engagée sans vraiment savoir ce que chacun faisait, n’avait pas encore pris le temps de discuter avec Cyprien à cause des problèmes à l’école et de la peur de sa réaction en apprenant sa décision.

Pourtant, Céleste avait besoin de son appui, de sa présence, aujourd’hui plus que jamais. Elle ne pouvait renier ce qu’elle pensait, oublier les massacres et la discussion avec Gabriella. Des familles, des meurtres, des menaces, des tests… Ils devaient en apprendre plus. Et elle avait suffisamment de sang-froid, maintenant, que pour le garder face à Leblanc qui ne la connaissait même pas. Un lourd silence s’installa dans la pièce, chacun réfléchissant aux paroles diffusées tandis que le poste de radio diffusait Le Chant des Partisans, brouillant toujours le communiqué national qui allait sûrement suivre sitôt les ondes libérées.

Céleste – Est-ce qu’on peut s’isoler quelques minutes, s’il te plaît ? Il faut que je te parle de quelque chose.

Céleste demanda aux parents de son meilleur ami s’ils pouvaient garder un œil sur Lucas avant de s’éloigner, laissant Cyprien la guider dans cette maison qu’elle n’avait jamais vue. Ils avaient du goût sans en faire trop, restant très simples dans les décorations sans, pour autant, tomber dans une ambiance austère et déprimante. C’était presque reposant, loin de ce qu’ils avaient l’habitude de côtoyer au Pensionnat, et en même temps si ressemblant à Cyprien. Maintenant, elle s’était habituée à son style, son rythme de vie assez vif et rapide même si elle n’était pas du genre à traîner au lit. Cela expliquait peut-être que l’atmosphère de cette maison la rassurait alors que les mots diffusés par les Résistants résonnaient toujours dans son esprit. Elle avait réfléchi à ses paroles durant des jours et des jours, ayant cherché comment tourner la phrase et la manière de le dire sans prendre le risque de perdre Cyprien. Il était son meilleur ami, son compagnon et la personne qu’elle aimait le plus avec Lucas. S’il venait à lui dire de choisir entre la mission et lui, elle… n’avait aucune idée de la réaction qu’elle aurait.

Nerveuse, Céleste resta silencieuse jusqu’à ce qu’ils arrivent dans ce qui semblait être une bibliothèque, plusieurs grandes étagères remplies de livres et une première table visible lorsqu’ils poussèrent la porte. Elle lui lança un regard, toujours aussi nerveuse avant de détourner les yeux en cherchant encore ses mots, observant les différents noms d’ouvrages posés dans la bibliothèque. C’était complètement stupide, elle qui disait les choses platement en temps normal face à n’importe qui, la voilà qui hésitait et cherchait pendant des heures et des heures pour un fait assez simple, en fin de compte. « J’ai accepté une mission pour la Résistance, je dois aller draguer le Président pour essayer d’obtenir des informations. » Rien de bien compliqué, n’est-ce pas ? Pourtant, elle trouvait cette simple phrase horriblement difficile à prononcer. Elle aimait Cyprien et ne voulait pas, ne pouvait pas l’entendre dire qu’il refusait, que c’était odieux de sa part, qu’il n’avait pas quitté Gabriella pour qu’elle-même agisse de la même manière. Elle se frotta les bras, mal à l’aise et ayant l’impression d’avoir bien plus froid, tout à coup, tournant la tête vers son compagnon.

Cyprien – Qu’est-ce qui te choque autant ? On s’y attendait tous depuis des semaines.

Céleste – Ce n’est pas que ça me choque, c’est que je… J’ai quelque chose à te dire, justement à propos de leur annonce, mais j’ai peur de ta réaction. Je tiens énormément à toi et j’ai envie de rire, pleurer et crier en même temps alors que c’est illogique. Et tu vas sûrement t’enfuir en courant.

Cet appel aux armes dont les dernières notes du Chant des Partisans résonnait un peu plus loin, et aussi à l’extérieur, chez tous les Français fêtant Noël chez eux. Elle avait eu trois semaines pour lui en parler ! Mais non… Jamais elle n’avait trouvé le temps, se disant que ce n’était qu’en janvier, qu’elle avait encore des jours et des jours devant elle pour expliquer à Cyprien sa position et ce qu’elle allait faire. Ils avaient des projets, voulaient avoir un enfant, fonder une famille ensemble et avaient tous les deux ouvert les yeux un peu tard mais c’était bon, maintenant. Elle avait compris qu’elle l’aimait, vraiment, qu’il était un des rares à l’avoir toujours vue telle qu’elle était avant, ou du moins à l’avoir acceptée sans se laisser impressionner par ses airs froids. Même maintenant, il se montrait patient avec elle ! Bien entendu, Céleste lui avait parlé de la discussion avec Lucas, en résumé, lui promettant de s’ouvrir davantage et de ne pas les rejeter. Son frère lui avait dit qu’elle ne vivait plus en pensant aux vivants… Ce qui l’avait sans doute poussée, en grosse partie, à accepter cette mission pour aider les autres élémentaires. Ce n’était pas grand-chose, au final, seulement faire les beaux yeux, se montrer, jouer « la cruche » comme l’avait dit Gabriella, et séduire le fut… le Président. Mais il y avait Cyprien…

Céleste – J’ai… rencontré Gabriella pour lui demander s’il y avait une possibilité de les aider, avec la Résistance. Elle a parlé de plein de choses à faire puis a pensé à une mission particulière que… que j’ai acceptée et qui commencera sûrement dans les prochaines semaines. Mais je reste enseigner, je ne pars pas, je ne disparais pas, je reste avec toi et Lucas. Je ne pouvais pas vous laisser, je ne suis pas comme elle à ce niveau et j’ai besoin de toi comme mon frère a besoin d’une mère.

Céleste avait parlé plus vite sur la fin, essayant d’argumenter directement sur un ton d’excuse et de justification alors qu’elle n’avait même pas dit de quoi il s’agissait à Cyprien. Elle guettait ses réactions, craignait de voir qu’il se referme et montre déjà un refus alors qu’elle ne pouvait rester sans rien faire. Pas après ce qu’ils avaient entendu, pas après tous ces massacres dont ils venaient de parler à la radio, pas après être restée sans rien faire pendant des mois et des mois. Elle voulait tendre la main aux élémentaires qui en avaient besoin comme on lui avait tendu la main, à elle, lorsqu’elle en avait besoin. Ces personnes qui rejetaient les leurs étaient celles qui l’avaient rejetée et qui avaient, d’une certaine manière, provoqué le suicide d’Alexis et de bon nombre d’autres enfants, adolescents ou adultes. Elle se tourna un peu plus vers Cyprien, lui prenant les mains pour les serrer dans les siennes.

Céleste – Gabriella m’a dit qu’ils avaient… besoin d’une femme pour approcher le Gouvernement et dénicher des informations en jouant un autre rôle. Il s’agirait de… de séduire Leblanc qui est un homme « à femmes », il suffirait de jouer « les cruches » pour reprendre ses termes et simplement de l’approcher. Mais ça n’irait pas loin, jamais, je lui ai demandé avant d’accepter quoi que ce soit. Il n’a jamais vu ma tête, ne me connaît pas, j’ai été habituée à dissimuler mes dons pendant des années donc ce ne serait pas si difficile que cela pour moi.
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MessageSujet: Re: Réveillon quelque peu perturbé   Réveillon quelque peu perturbé EmptyJeu 25 Jan - 11:48

Des heures de voiture avant de finalement arriver, et juste à temps ! Cyprien était courbaturé, en quittant son siège, mais fit tout de même un large signe de la main à ses parents, lorsqu’ils sortirent pour les accueillir, puis serra sa mère contre lui lorsqu’elle se jeta dans ses bras avec un petit rire en disant qu’il les attendait depuis ce matin, déjà, marmonnant aussitôt qu’il avait l’air sous-alimenté. Bah, aux yeux de sa mère, tout le monde avait l’air sous-alimenté ! Elle était sûrement déjà en train d’analyser Céleste et prévoir ce qu’elle devait lui faire avaler pour lui donner plus de couleurs que ça aux joues. Son père devait penser la même chose car il lui adressa un sourire entendu en venant l’aider à porter leurs quelques affaires à l’intérieur de la maison. La cour en gravier et sable était, comme d’habitude, envahie par les poules et les canards qui s’y promenaient en liberté, parfois effrayés par les chats qui sautaient partout. Même le chien, que son père avait appelé Prune en le ramenant à la maison, lui sauta dessus pour dire bonjour. Il prit Lucas par la main pour l’inciter à approcher doucement et caresser Prune, il ne le mordra pas s’il se « présentait » doucement et le laisser le renifler. Ces bêtes avaient un très bon instinct et protégeaient naturellement les enfants.

Même Céleste semblait plus détendue, une fois n’est pas coutume. Nicole les emmena voir leurs chambres, qu’elle avait nettoyées et préparées ce matin, en leur montrant où poser leurs affaires, puis se laver. Cyprien n’était plus revenu depuis un sacré moment, ça faisait du bien de rentrer chez soit, voir ses parents heureux et en bonne santé. Lucas allait sûrement se plaire, ici, il y avait des animaux, c’était calme, il pouvait courir où il voulait. Il commença par se laver rapidement puis enfiler des vêtements propres, avant de laisser la salle de bain à Céleste et redescendre. Eric, son père, était occupé à allumer un grand feu dans l’âtre, pendant que sa mère terminait les préparatifs pour le repas du réveillon. Elle ne perdit pas de temps à l’interroger sur sa fiancée, ès qu’il se mit à l’aider, profitant qu’elle ne soit pas encore là pour poser toutes les questions lui traversant l’esprit, quand bien même Cyprien lui avait déjà tout raconté au fil de ses lettres. Il répondit à ses questions avec patience, tout en constatant d’un air un peu effaré la quantité de nourriture préparée par sa mère. Ils étaient cinq, à manger ce soir, pas cinquante ! Ils pourraient facilement inviter tout le voisinage, avec ça. Elle coupa court à ses protestations en affirmant que les enfants, ça mangeait toujours bien, et que lui-même avait maigri, il devait reprendre des plumes ici. Renonçant à discuter, il leva un peu les yeux au ciel puis aida à terminer de mettre la table.

Nicole avait installé le petit Lucas à côté d’elle, l’ayant visiblement déjà adopté comme nouveau petit-fils. Cyprien lui avait expliqué comment le petit était arrivé et son lien avec Céleste, qu’importe, aux yeux de sa mère, il était leur fils adoptif et son petit-fils à elle. Elle attendait depuis si longtemps d’avoir enfin des petits-enfants, tout comme son époux, Lucas avait une place toute trouvée dans leurs bras. Ils mangèrent l’entrée pendant qu’Eric parlait des dernières nouvelles dans le village, donnant des « petites nouvelles » comme on disait dans le coin. Qui était né, qui était mort, qui s’était marié, qui avait emménagé au village et qui était parti, comment se portaient les commerces du coin, comment s’étaient passées les vendanges cette année. Nicole leur resservi deux fois de la dinde avec des pommes de terre rissolées, insistant pour qu’ils mangent comme il faut, puis servit la traditionnelle bûche de noël. A la fin du repas, Cyprien avait l’impression qu’ils avaient assez mangés pour une semaine complète. Son père leur servit à tous des digestifs, du jus de pomme pour Lucas, puis alluma la radio pour écouter la messe de Noël. C’était là plus une tradition qu’autre chose, car ils étaient croyants sans être pratiquants.

Ils étaient tous prêts à se souhaiter en cœur joyeux noël et à trinquer, lorsque sonna minuit, quand la radio grésilla et se brouilla. Cyprien allait aider son père qui commençait à marmonner dans sa barbe et frapper la radio lorsque les grésillements cessèrent et qu’une voix s’éleva. Le professeur la reconnut aussitôt et pâlit. Bradley… Il reçut par réflexe Céleste et Lucas contre lui, le regard rivé sur la radio, où d’autres voix s’ajoutaient pour former un long message. Bradley, Gaby, même Kimmitsu, il les reconnaissait… Un lourd silence était tombée sur la pièce, pendant que le message se déroulait. Clair et sans équivoque, ce message n’était rien de plus qu’une déclaration de guerre. Il avait beau s’y attendre depuis déjà des semaines, l’entendre énoncé ainsi platement avant de quoi effrayer… Lorsque le tout termina, un chant s’éleva, clairement guerrier et appelant à la Résistance. Il imaginait déjà Paris en effervescence, la réplique avait déjà dû se donner, agressive, violente, la capitale devait être en ébullition. Il déposa son verre, alors que ses parents se regardaient avec des airs bien plus sereins que lui. Eux aussi devaient penser depuis un moment que tout allait finir ainsi.

Céleste – Est-ce qu’on peut s’isoler quelques minutes, s’il te plaît ? Il faut que je te parle de quelque chose.

De ce qui venait de se produire ? Pas très étonnant… Il sourit à ses parents avant d’emmener céleste dans la petite bibliothèque, au premier étage, puis refermer la porte. Ici, ils seront tranquilles. Donc, qu’est-ce qui lui arrivait ? C’était prévisible ! Ils avaient beau n’avoir aucune information dans les journaux, il s s’attendaient à ça depuis des mois ! Il le lui souligna presque aussitôt, d’ailleurs, en lui demandant ce qui pouvait bien la choquer à ce point-là. Elle était aussi nerveuse que durant les jours où elle avait appris une très mauvaise nouvelle, à croire qu’une bombe venait d’éclater dans la cour de la ferme il y a à peine une minute.

Céleste – Ce n’est pas que ça me choque, c’est que je… J’ai quelque chose à te dire, justement à propos de leur annonce, mais j’ai peur de ta réaction. Je tiens énormément à toi et j’ai envie de rire, pleurer et crier en même temps alors que c’est illogique. Et tu vas sûrement t’enfuir en courant.

Cyprien – Hein ?

Si par miracle, quelqu’un sortait enfin un guide complet expliquant aux hommes comment ils devaient s’y prendre pour comprendre enfin les femmes, le professeur l’achètera sans la moindre hésitation, même si ça lui coûtait une fortune. Quel était le problème, avec cette annonce et pourquoi ça le ferait fuir ? Il ouvrait la bouche, commençant à poser la question, puis se rétracta, sentant qu’elle allait bien finir par se lancer elle-même. Les femmes… Il n’arrivera sans doute jamais à comprendre ce qui leur passait par la tête, parfois, et se demandait si c’était un problème commun à tous ses confrères masculins ou bien si ça ne venait que de lui. Dans le second cas, il devait avoir un problème qui l’empêchait de capter… Arf, idée dérangeante. Pourtant, son père, lui, avait l’air de bien comprendre sa mère, ou alors, ça ne venait que du fait qu’ils vivent ensemble depuis quarante ans, maintenant. Il reposa le regard sur Céleste, prêt à la rattraper dans ses bras si elle tombait brusquement évanouie sur place, tant elle était pâle et nerveuse, patientant. Il lui fichait la trouille à ce point … ? Sérieusement ? Elle serait bien la première ! Il n’était pourtant pas le genre de type dont les gens avaient peur, d’habitude, plutôt celui qu’on voyait puis qu’on oubliait, car il ressemblait à monsieur tout-le-monde. Vraiment rien pour le craindre, d’autant plus qu’il ne s’amusait pas non plus à paraître effrayant.

Céleste – J’ai… rencontré Gabriella pour lui demander s’il y avait une possibilité de les aider, avec la Résistance. Elle a parlé de plein de choses à faire puis a pensé à une mission particulière que… que j’ai acceptée et qui commencera sûrement dans les prochaines semaines. Mais je reste enseigner, je ne pars pas, je ne disparais pas, je reste avec toi et Lucas. Je ne pouvais pas vous laisser, je ne suis pas comme elle à ce niveau et j’ai besoin de toi comme mon frère a besoin d’une mère.

Une mission particulière, c’est à dire ? Pour être honnête, il s’était à moitié attendu à un truc de ce genre, connaissant sa fiancée, mais pas aussi tôt ! Enfin, il voulait dire, il avait cru qu’elle verrait comment s’activer lorsqu’ils seront dans la nouvelle école et que tout le monde sera enfin réuni, qu’elle sera au contact des résistants déjà actifs et qu’elle pourra parler avec eux, à la fois de leurs missions, de leur quotidien et de leurs effectifs. Elle lui prit les mains en les serrant, pendant qu’il se demandait à quel moment elle avait été voir son ex-femme.

Céleste – Gabriella m’a dit qu’ils avaient… besoin d’une femme pour approcher le Gouvernement et dénicher des informations en jouant un autre rôle. Il s’agirait de… de séduire Leblanc qui est un homme « à femmes », il suffirait de jouer « les cruches » pour reprendre ses termes et simplement de l’approcher. Mais ça n’irait pas loin, jamais, je lui ai demandé avant d’accepter quoi que ce soit. Il n’a jamais vu ma tête, ne me connaît pas, j’ai été habituée à dissimuler mes dons pendant des années donc ce ne serait pas si difficile que cela pour moi.

Cyprien – Le « séduire » ? répéta-t-il d’un ton un peu éberlué. L’espionner, plutôt, non ? En jouant les crétines ? Et pourquoi tu ne m’en as pas parlé avant ? Je me doute depuis longtemps que tu veux trouver un moyen d’agir, même sans devoir nous laisser derrière, Lucas et moi, et tant que tu ne deviens pas Gabriella, je ne vais pas crier. Mais tu t’es sentie obligé de me mentir en allant voir tout ça en cachette ?

Il lui relâcha les mains, surtout vexé de ce dernier point, qu’elle ait cru qu’il allait aussitôt se braquer, crier, qu’elle… Ne lui ait pas fait confiance, somme toute, pour en discuter d’abord avec lui et parler de ce qu’elle voulait, plutôt que d’agir dans leur dos et attendre que la guerre soit déclarée avant d’enfin parler.

Cyprien – Tu ne me fais pas assez confiance, pour n’en parler que maintenant ? Si c’est le cas, je préfère le savoir maintenant. Comment penses-tu qu’on puisse bâtir une relation saine si on commence à se mentir comme ça ?
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Âge RPG : 26 ans
Don(s) : Fulgumancienne et Frigumancienne
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Céleste Dumoulin
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Céleste Dumoulin
MessageSujet: Re: Réveillon quelque peu perturbé   Réveillon quelque peu perturbé EmptySam 3 Fév - 12:02

Cyprien – Le « séduire » ? répéta-t-il d’un ton un peu éberlué. L’espionner, plutôt, non ? En jouant les crétines ? Et pourquoi tu ne m’en as pas parlé avant ? Je me doute depuis longtemps que tu veux trouver un moyen d’agir, même sans devoir nous laisser derrière, Lucas et moi, et tant que tu ne deviens pas Gabriella, je ne vais pas crier. Mais tu t’es sentie obligé de me mentir en allant voir tout ça en cachette ?

De… Hein ? Minute, il se doutait de tout cela depuis le début ? Mais… Mais pourquoi ne lui en avait-il jamais parlé, alors ? Céleste ne réagit pas lorsqu’il lui relâcha les mains, choquée par ce qu’il venait de dire. Il n’allait pas crier, n’était pas furieux ni effrayé, ne rejetait pas l’idée de la mission, même s’il s’agissait de séduire le Président – ou l’espionner, comme il l’avait dit – alors qu’elle pensait que ce « détail » le ferait réagir plus qu’autre chose. Non, c’était le fait qu’elle lui ait caché son « escapade » qui le blessait comme elle pouvait le voir dans sa réaction et son regard. Mais elle avait voulu lui en parler ! Enfin… Si, Céleste voulait lui parler, mais elle craignait de lui rappeler un mauvais souvenir avec ce qu’il avait vécu aux côtés de Gabriella. Elle avait seulement cherché à le ménager ! Et, au final, elle avait plus l’impression de l’avoir blessé qu’autre chose, de lui montrer tout le contraire de ce qu’elle avait pensé en agissant ainsi. La jeune professeure resta droite, à observer Cyprien sans répondre tout de suite, ne trouvant pas d’excuse. Elle lui avait menti, oui, il n’y avait pas d’autres mots…

Cyprien – Tu ne me fais pas assez confiance, pour n’en parler que maintenant ? Si c’est le cas, je préfère le savoir maintenant. Comment penses-tu qu’on puisse bâtir une relation saine si on commence à se mentir comme ça ?

Céleste – Mais si, je te fais confiance ! Evidemment, je te fais confiance, tu sais comment je suis et tu ne m’as jamais rejetée. Tu crois vraiment que j’aurais parlé de mon passé au premier collègue du coin ? Ce n’est pas une question de confiance, j’ai voulu t’en parler depuis le début mais je… Je n’ai pas trouvé le bon moment, jamais, et j’avais… J’avais peur de ta réaction, de te rappeler ce que tu avais vécu avec Gabriella alors qu’on est ensemble depuis peu de temps.

Céleste ne pensait pas le vexer, elle craignait qu’il décide de partir, tout simplement, ou qu’il l’empêche d’agir pour ne pas vivre la même chose que l’année passée alors qu’elle ressentait le besoin d’aider leurs anciens collègues et tous les élémentaires. Elle ajouta qu’elle était désolée, qu’elle ne pensait pas le blesser en agissant ainsi, que son intention était de lui éviter une impression de déjà-vu. Elle n’avait que très peu pensé à cette mission, depuis sa rencontre avec Gabriella, surtout depuis l’effondrement de l’école et tous les problèmes qui s’étaient enchaînés ensuite, elle s’était… laissée emporter, tout simplement, et n’avait jamais pris le temps de parler à Cyprien. Et puis, il y avait aussi eu les efforts qu’elle essayait de fournir pour se rapprocher de Lucas, pour se montrer moins froide et distante, pour essayer de s’ouvrir réellement. Céleste croisa les bras, détournant un peu le regard sur la fin de sa phrase, avant de lever la tête pour répondre.

Céleste – Tout est allé très vite, je suis allée la rejoindre sans vraiment savoir ce que je comptais faire. J’ai pris contact avec Frédéric pendant le voyage et il m’a parlé ensuite, je me suis plus ou moins décidée à la dernière minute, même pendant notre discussion. Je voulais assumer ce choix toute seule, et ses conséquences, essayer de… faire quelque chose de bien pour une fois tout en protégeant ceux que j’aime le plus au monde. Mais j’ai… j’ai mal agi, je suis désolée, je n’aurais pas dû te le cacher. J’étais convaincue que tu… que tu allais mal le prendre. Entre la nature de la mission et le simple fait de s’engager, alors que tu as quitté Gabriella pour cette raison, je… J’ai eu peur. Peur que tu décides de partir vu qu’il n’y a… pas grand-chose qui te retienne, tu cherches de la stabilité et un foyer et je te parle de m’engager dans la Résistance. Je suis désolée…

Cyprien – Je suis ravi de voir que tu me crois capable de ça...

Céleste baissa la tête, cette fois, incapable d’ajouter quoi que ce soit. Elle était… désolée. Elle ne savait pas, sur le moment, elle avait eu peur ! Elle avait… Elle… Elle ne savait pas, elle avait réagi sans réfléchir par peur de le perdre. Et elle avait été stupide, comme une adolescente qui écoute ses pressentiments et ne réfléchit pas longtemps avec suffisamment de recul pour juger correctement une situation. La jeune femme resta silencieuse, cherchant ses mots en ouvrant la bouche pour la refermer sans rien dire quelques secondes après. Un silence pesant, pour elle en tout cas, s’installa dans la bibliothèque qui lui semblait incroyablement étroite malgré sa taille, ils n’entendaient que de faibles échos émanant de l’étage inférieur, ce qui accentua le malaise qu’elle ressentait. Qu’attendait-il qu’elle dise… ? Se mordant les lèvres, Céleste remua un peu, se tenant les mains et lissant le bas de sa robe pour… faire quelque chose, envahie par la culpabilité. Elle ne savait pas quoi lui dire, elle était désolée, ce qu’elle ajouta dans un murmure.

Céleste – Je… Je ne sais pas ce que je peux te dire de plus, continua-t-elle en murmurant. Je te fais confiance, je te le promets, j’avais peur de te perdre et j’ai réagi comme une adolescente sans… sans réfléchir. Mais je te fais confiance, je suis même allée trouver Estelle pour lui demander conseils et me rassurer à propos du rôle de mère parce que je souhaite réellement fonder une famille avec toi, laisser le passé derrière moi et avancer. Mais j’étais terrorisée et je m’en voulais de te faire attendre encore et encore… C’est ton comportement, ta présence et ta patience qui m’ont rassurée, ce n’est jamais en toi que je n’avais pas confiance…

C’était en elle-même. Et d’elle-même qu’elle avait peur, même lui le savait. Il avait confiance là où elle craignait le moindre faux-pas et c’était son comportement, à lui, qui l’avait incitée à s’ouvrir, à lui faire confiance les yeux fermés. Ce n’était pas pour rien si elle lui avait dit qu’elle voulait avoir un enfant avec lui, une vraie famille. Alors, qu’au final, ils n’étaient ensemble que depuis le mois d’août, que Cyprien venait tout juste de demander le divorce, qu’il était vraiment officiellement divorcé, c’était récent. Elle aurait pu se méfier, se dire que c’était une mauvaise idée et vouloir attendre quelques mois pour le laisser « digérer » cette rupture brutale. Mais elle n’avait rien fait de tout cela, Céleste avait décidé de faire confiance, réellement. Et, aujourd’hui, elle avait l’impression d’avoir tout brisé… Si Cyprien ne lui faisait plus confiance… Cette seule pensée provoqua un frisson chez elle, comme si son don de la glace rappelait sa présence et menaçait de faire surface. Ce qu’elle ne voulait pas, ce qu’elle n’avait même jamais voulu… Elle était prête à tout pour convaincre Cyprien, qu’importe ce qu’il pourrait lui demander. La professeure se rapprocha de son compagnon, voulant lui prendre une main et se forçant à le regarder dans les yeux pour lui montrer qu’elle était sérieuse et sincère.

Céleste – Tu peux me demander ce que tu veux… Je ferai tout pour te rassurer et te convaincre. Je ne… Je ne te mentirai plus. Plus jamais. Tu peux me poser n’importe quelle question, je te répondrai sans mentir, c’est la seule chose que je t’ai cachée. Mais je n’ai jamais envisagé de te le cacher indéfiniment, crois-moi. S’il te plaît…
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MessageSujet: Re: Réveillon quelque peu perturbé   Réveillon quelque peu perturbé EmptyDim 4 Mar - 16:20

Céleste – Mais si, je te fais confiance ! Evidemment, je te fais confiance, tu sais comment je suis et tu ne m’as jamais rejetée. Tu crois vraiment que j’aurais parlé de mon passé au premier collègue du coin ? Ce n’est pas une question de confiance, j’ai voulu t’en parler depuis le début mais je… Je n’ai pas trouvé le bon moment, jamais, et j’avais… J’avais peur de ta réaction, de te rappeler ce que tu avais vécu avec Gabriella alors qu’on est ensemble depuis peu de temps.

Elle n’avait pas trouvé le « bon moment », hein ? Donc tous les instants où ils s’étaient retrouvés tous les deux seuls, les soirs alors que Lucas était déjà au lit, lorsqu’il n’y avait personne d’autre qu’eux dans la salle des profs, désertée ces dernier temps, lorsqu’ils sortaient pour des courses ou autre chose, ce n’était jamais le bon moment ? Que devait-il en déduire, qu’il n’était pas capable d’écouter, de comprendre, qu’il se trimballait en permanence une tête si horrible qu’on ne veuille pas lui parler de choses importantes à cause de la trouille qu’il suscitait ? Il leva légèrement les yeux au ciel lorsqu’elle ajouta qu’elle n’avait pas voulu le blesser ou donner une impression de déjà-vu. Alors là, aucun risque ! Car il y avait au minimum une chose qu’il lui plaisait chez Gabriella, c’était que lorsqu’elle avait une chose à dire, elle ne prenait pas de gants et ne mentait pas, c’était directement et en face, que ce soit plaisant à entendre ou pas ! Toujours cash et cru, elle ne s’était jamais inquiétée de la « réaction » de celui d’en face car elle considérait que ça ne servait à rien de cacher des vérités juste pour ne pas blesser. Cyprien avait horreur qu’on lui mente et il ne mentait pas non plus aux autres. Les rares fois où il l’avait fait, ça avait tenu même pas deux ou trois jours, dans le meilleur des cas. Et jamais il n’aurait cru que Céleste le fasse avec lui. Trop habitué aux conversations bien plus directes, peut-être.

Céleste – Tout est allé très vite, je suis allée la rejoindre sans vraiment savoir ce que je comptais faire. J’ai pris contact avec Frédéric pendant le voyage et il m’a parlé ensuite, je me suis plus ou moins décidée à la dernière minute, même pendant notre discussion. Je voulais assumer ce choix toute seule, et ses conséquences, essayer de… faire quelque chose de bien pour une fois tout en protégeant ceux que j’aime le plus au monde. Mais j’ai… j’ai mal agi, je suis désolée, je n’aurais pas dû te le cacher. J’étais convaincue que tu… que tu allais mal le prendre. Entre la nature de la mission et le simple fait de s’engager, alors que tu as quitté Gabriella pour cette raison, je… J’ai eu peur. Peur que tu décides de partir vu qu’il n’y a… pas grand-chose qui te retienne, tu cherches de la stabilité et un foyer et je te parle de m’engager dans la Résistance. Je suis désolée…

Cyprien – Je suis ravi de voir que tu me crois capable de ça…

Elle n’avait rien compris à ce qui l’avait poussé à divorcer… Mais vraiment rien… Que devait-il répondre à ça ? Il y avait-il vraiment besoin d’expliquer alors que c’était pourtant aussi évident ? Enfin, même Gabriella n’avait pas dû le comprendre, elle était trop « dans son monde » pour ça, en revanche, il n’aurait jamais pensé que Céleste non plus ne comprenne pas. Bon sang, c’était pourtant simple ! Elle ne savait pas quoi dire, elle ne savait pas quoi dire, et bien lui non plus, il ne savait pas comment on pouvait pourtant être plus clair encore. Il se retint de lever les yeux au ciel, se frottant lentement les yeux d’une main avec un léger soupir. Les hommes viennent de Mars et les femmes viennent de Vénus, son grand-père lui avait souvent répété ça, lorsqu’il était petit, et ce n’était qu’arrivé à l’âge adulte que Cyprien s’était heurté à toute la réalité contenue dans cette simple sentence. Enfin bref, peu importe les maximes et les citations, ça ne changeait rien au fait qu’il avait décidément du mal à comprendre les femmes, même celles qui étaient d’un naturel doux et effacé comme Céleste.

Céleste – Je… Je ne sais pas ce que je peux te dire de plus, continua-t-elle en murmurant. Je te fais confiance, je te le promets, j’avais peur de te perdre et j’ai réagi comme une adolescente sans… sans réfléchir. Mais je te fais confiance, je suis même allée trouver Estelle pour lui demander conseils et me rassurer à propos du rôle de mère parce que je souhaite réellement fonder une famille avec toi, laisser le passé derrière moi et avancer. Mais j’étais terrorisée et je m’en voulais de te faire attendre encore et encore… C’est ton comportement, ta présence et ta patience qui m’ont rassurée, ce n’est jamais en toi que je n’avais pas confiance…

« Terrorisée » par quoi, enfin ?! Il y avait des jours où il se demandait vraiment si elle comprenait quoi que ce soit à la notion de « terreur » ! Car la terreur, la vraie, ne survenait que lorsqu’on était dans le genre de situations où vous aviez la mort en personne juste en face de vous et que vous aviez les secondes suffisantes pour la regarder vous approcher en souriant. Attention à ne pas confondre la peur et la terreur, la colère et la haine, le bonheur et la joie, la peine et la tristesse ! Il en était autant exaspéré que blasé, cette fois, posant un regard épuisé sur Céleste.

Céleste – Tu peux me demander ce que tu veux… Je ferai tout pour te rassurer et te convaincre. Je ne… Je ne te mentirai plus. Plus jamais. Tu peux me poser n’importe quelle question, je te répondrai sans mentir, c’est la seule chose que je t’ai cachée. Mais je n’ai jamais envisagé de te le cacher indéfiniment, crois-moi. S’il te plaît…

Cyprien – Donc tu es comme Gabriella, tu n’as rien compris au pourquoi de ce divorce. Pas vrai ? Ce n’est pas du tout parce qu’elle se battait ! Mais parce qu’elle n’a jamais pris assez en compte la protection des enfants qu’elle portait, ni de celui qu’elle porte aujourd’hui, et parce qu’elle ne prenait plus en compte non plus les avis et inquiétudes de ceux qui étaient inquiets pour elle. Tout « s’effaçait », tu comprends ? J’ai déjà vu ça. Mon oncle et mon grand-père, en revenant de la guerre, étaient comme morts de l’intérieur, ils avaient beau avoir quitté les tranchées, leurs esprits y étaient restés coincés et ça à tout jamais. C’est ce qui est arrivé à Gabriella, elle a été prise dans un combat et ne le quittera plus, ça passera toujours avant tout le reste. Si on lui donnait l’opportunité de quitter le pays pour mettre ses bébés à l’abri, elle ne le ferait pas. Et je peux pas fonder de famille avec une femme qui fait passer son devoir en priorité au détriment de son propre sang. C’est comme si toi, dans une situation tendue, tu avais le choix entre te battre jusqu’à la mort ou fuir en emportant Lucas loin du danger et que tu choisissais la première option.

Il reprit son souffle, réalisant qu’il avait débuté sa tirade d’une voix rapide et remplie à la fois de rancœur, de regrets, de peine et de colère. Ce sujet, il ne le digérait toujours pas ! C’était beau de se battre jusqu’au bout, c’était honorable et tout ce qu’on voulait ! Mais lorsque ça allait aussi loin, qu’on acceptait tous les dangers sans ciller au détriment de ceux qui restaient derrière vous, non…

Cyprien – Je sais très bien qu’il faut des gens comme ça, soupira-t-il. Qu’il faut des personnes, en temps de guerre, qui soient ainsi pour mener les autres. Mais toi, tu peux combattre sans pour autant faire comme Gaby et prendre la place d’un chef. Ou je me trompe ? Si tu avais le choix entre abattre un ennemi très dangereux ou emporter un enfant au loin pour lui éviter de mourir, que ferais-tu ?
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Céleste Dumoulin
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MessageSujet: Re: Réveillon quelque peu perturbé   Réveillon quelque peu perturbé EmptyDim 1 Avr - 22:16

Cyprien – Donc tu es comme Gabriella, tu n’as rien compris au pourquoi de ce divorce. Pas vrai ? Ce n’est pas du tout parce qu’elle se battait ! Mais parce qu’elle n’a jamais pris assez en compte la protection des enfants qu’elle portait, ni de celui qu’elle porte aujourd’hui, et parce qu’elle ne prenait plus en compte non plus les avis et inquiétudes de ceux qui étaient inquiets pour elle. Tout « s’effaçait », tu comprends ? J’ai déjà vu ça. Mon oncle et mon grand-père, en revenant de la guerre, étaient comme morts de l’intérieur, ils avaient beau avoir quitté les tranchées, leurs esprits y étaient restés coincés et ça à tout jamais. C’est ce qui est arrivé à Gabriella, elle a été prise dans un combat et ne le quittera plus, ça passera toujours avant tout le reste. Si on lui donnait l’opportunité de quitter le pays pour mettre ses bébés à l’abri, elle ne le ferait pas. Et je peux pas fonder de famille avec une femme qui fait passer son devoir en priorité au détriment de son propre sang. C’est comme si toi, dans une situation tendue, tu avais le choix entre te battre jusqu’à la mort ou fuir en emportant Lucas loin du danger et que tu choisissais la première option.

Céleste resta sans voix, légèrement en retrait, silencieuse durant tout le monologue de Cyprien. Elle avait touché une corde sensible, l’entendait dans ce ton plein de rancœur, de colère et de peine. C’était, en tout cas, les sentiments qu’elle ressentait à travers ses paroles, la réduisant au silence tandis que son compagnon reprenait son souffle. Elle n’avait… jamais imaginé que c’était pour cette raison qu’il avait quitté Gabriella. Elle se doutait que cela en faisait partie, bien évidemment, mais n’aurait jamais cru que c’était LA raison qui l’avait poussé à prendre cette décision. Elle avait vu ses réactions à chaque fois que son ex-femme rentrait, passait dans la pièce ou ne s’inquiétait pas plus que cela pour sa grossesse ou ses enfants, elle avait repéré ses changements d’expression mais… Non. Jamais Céleste n’aurait pu comprendre une telle chose. Comment aurait-elle pu le deviner ?! Oui, Cyprien était son meilleur ami avant d’être son collègue et compagnon, celui qui se confiait à elle plus qu’elle ne le faisait avec lui, mais il avait toujours reproché à sa femme d’être militaire. La dernière fois, il lui avait même dit qu’il refusait de la voir devenir générale, qu’il la retenait pour ça ! Et elle aurait dû comprendre le sous-entendu de toutes ces tensions ?

Mais elle était obligée de reconnaître que Gabriella avait tout de même cherché à protéger ses enfants, surtout cet été. Les orages déclenchés sur une énorme partie de la France en étaient une preuve suffisante, non ? Même si elle n’était pas comme leur directrice, Céleste pouvait la comprendre, ayant ressenti les mêmes choses qu’elle lorsqu’elle était encore élève au Pensionnat. Elle aussi avait envie de plein de choses, de découvrir le monde, de se montrer forte et indépendante et de ne surtout jamais se laisser marcher sur les pieds. Diriger ne l’effrayait pas, à l’époque, ses grands rêves prenant l’allure des « femmes au pouvoir » lorsque la répression se faisait trop forte. Surtout lorsqu’elle avait quitté son petit-ami à cause de son propre caractère. C’était l’élément foudre qui voulait cela, on ne pouvait le reprocher à Gabriella… Elle-même était différente uniquement à cause de son passé, de cette peur sourde qui restait en elle, tapie quelque part, et qu’elle s’efforçait de dissiper avec ses entraînements quotidiens. Seulement, il lui était impossible de reprocher cette impression à Cyprien, il avait raison sur certains points, tort sur d’autres. Mais le dire maintenant n’était peut-être pas la meilleure des stratégies à adopter…

Cyprien – Je sais très bien qu’il faut des gens comme ça, soupira-t-il. Qu’il faut des personnes, en temps de guerre, qui soient ainsi pour mener les autres. Mais toi, tu peux combattre sans pour autant faire comme Gaby et prendre la place d’un chef. Ou je me trompe ? Si tu avais le choix entre abattre un ennemi très dangereux ou emporter un enfant au loin pour lui éviter de mourir, que ferais-tu ?

Céleste – Tu… Tu me demandes sérieusement si je serais capable d’abattre un ennemi de sang froid en laissant mourir un enfant ?, lâcha-t-elle, moitié choquée. Cyprien, je manie peut-être la foudre, mais tu me connais et tu sais que j’en suis mentalement incapable, surtout aussi tôt. Evidemment que je chercherais à sauver l’enfant, spontanément. Ce n’est pas parce que je t’ai caché cela que tu dois tout remettre en question, je suis la même personne qu’avant, j’essaie seulement de tirer un trait sur le passé et de m’investir beaucoup plus dans ce conflit sans vous abandonner, tous les deux.

Jamais elle n’aurait pensé que Cyprien puisse lui poser une telle question… Il la connaissait, il la voyait tous les jours, l’avait côtoyée très souvent dès son arrivée au Pensionnat sans qu’elle ne l’envoie balader. Alors, oui, cette question la choquait, la déstabilisait complètement. S’il en venait à la poser, c’est qu’il hésitait, n’était plus sûr ou qu’il était réellement blessé… Il fallait que Céleste le calme avant tout, s’excuse et admette son erreur si elle ne voulait pas le perdre tout bonnement et perdre sa confiance pour toujours. Elle avait vraiment cru bien faire en agissant ainsi ! Parler à Estelle, s’activer sans ajouter de l’inquiétude inutilement à Cyprien, attendre d’être fixée avant de lui en parler. Elle faisait des efforts, vraiment, elle n’arrêtait pas d’en faire ces derniers mois pour revenir vers celle qu’elle était autrefois. Mais là, ici, la jeune professeure risquait de perdre la seule personne qui l’aidait dans cette démarche. Soutenant son regard malgré le choc, elle patienta, espérant au moins un progrès. Même tout petit, un signe encourageant, une note positive. N’importe quoi.

Cyprien – Je ne t'ai jamais dit en laissant mourir un enfant, pour info...

Céleste – Si tu parles de partir pour lui éviter de mourir… Cela ne change rien au fait que je serais incapable d’abattre quelqu’un de sang-froid, je choisirais de sauver l’enfant, de l’éloigner. Tu me connais, pour ça, tout de même…

Céleste faisait des efforts mais on entendait, dans sa voix, qu’elle était nettement moins assurée, qu’elle marchait sur des œufs depuis le début de cette conversation. Cyprien ne l’aidait pas, n’ayant répondu que par une phrase très courte comme si ce qu’elle avait dit ne parvenait pas à le convaincre. Mais que voulait-il qu’elle dise de plus ?! Elle avait fait une erreur, une erreur horrible, et elle l’avait reconnue. Mais, s’il ne donnait aucun signe positif, elle risquait de se refermer malgré elle pour éviter d’avoir trop mal par la suite s’il décidait d’en rester là. Cependant, contre toute attente, il fit un pas en la serrant dans ses bras. Partagée entre le choc et le soulagement, Céleste mit quelques secondes avant de répondre à son câlin, refermant ses bras pour renforcer l’étreinte. Elle était désolée, vraiment désolée. Désolée de ne pas l’avoir compris, désolée de ne pas lui avoir fait suffisamment confiance pour tout lui avouer d’emblée après avoir accepté cette mission.

La gorge serrée, elle resta un moment silencieuse, profitant seulement de cette brève accalmie sans rien dire, écoutant la respiration de Cyprien. Elle posa sa tête sur son épaule, regardant les livres rangés dans la bibliothèque sans les voir pour essayer de trouver les bons mots afin de désamorcer définitivement ce conflit. Elle finit par murmurer qu’elle l’aimait, tout bas, sur le ton de la confidence, avant d’ajouter qu’elle était désolée. Elle n’aurait jamais dû agir comme elle l’avait fait, jamais, et le regrettait tellement pour avoir vu et entendu tout cela ce soir. Le regret, la colère, la tristesse… Egalement à cause d’elle, cette fois, alors qu’elle s’était juré de ne plus jamais faire souffrir les personnes qu’elle aimait. S’écartant très légèrement de façon à pouvoir le regarder dans les yeux, profitant de la proximité pour lui faire comprendre qu’elle était sincère, Céleste chercha encore ses mots quelques secondes avant de se lancer.

Céleste – Je te promets de ne plus jamais te mentir et de toujours te faire confiance… Je suis désolée pour tout ça, de t’avoir blessé… Je ne le voulais pas, je n’aurais jamais dû agir de cette manière, je t’ai mal compris, je suis désolée. Je ne peux pas changer le passé, je ne peux que te demander de me faire confiance, de me croire, de me laisser une seconde chance.

Intérieurement, Céleste avait l’impression que la glace incitait une voix, dans sa tête, à lui hurler de rester prudente, de s’écarter, de ne surtout pas continuer à parler. Mais elle s’efforçait de l’ignorer, de repousser cet isolement dans lequel elle se renfermait dès que la situation devenait trop compliquée à gérer. Des disputes comme celles-ci, ils en auraient encore beaucoup, c’était également ce qui contribuait à consolider un couple. Mais Céleste était allée beaucoup trop loin dans le sens où elle n’avait jamais compris réellement celui qui était, pourtant, son meilleur ami et qui l’avait toujours comprise. A cause de cela, elle l’avait blessé et elle ignorait s’il pourrait vraiment lui faire confiance, à nouveau, malgré le geste qu’il venait d’avoir. Il avait été dépassé par le comportement de Gabriella, comprenait qu’il faille des gens comme elle, mais ne pouvait vivre dans de telles conditions. Céleste, au fond d’elle-même, comprenait la directrice pour ressentir la même chose, mais la glace tempérait considérablement cette « envie », ce besoin.

Céleste – Je ne suis pas comme Gabriella…, ajouta-t-elle plus bas. Je ne peux pas te dire que je ne la comprends pas, ce serait te mentir, mais je ne suis pas elle. J’ai évolué différemment, je ne pourrai jamais laisser les personnes que j’aime en danger si j’ai la possibilité de les protéger. Ce soir, celle qui t’a blessée, c’est moi, et je m’étais juré de ne jamais le faire. Je n’ai pas été l’amie dont tu avais besoin, encore moins la compagne, mais je tâcherai de me rattraper. Du moins… Si tu m’en laisses l’occasion, si tu crois que tu le pourras à nouveau.
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Réveillon quelque peu perturbé
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