Avril 1932. Les soucis mondiaux s'étendent.
 
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 Histoire d'enfants

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Anonymous Invité
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MessageSujet: Histoire d'enfants   Histoire d'enfants EmptyMer 3 Fév - 19:33

Le soleil était revenu avec un peu de peine la veille avant de s'installer plus durablement depuis ce matin. Cyprien lança au petit Lucas de ne pas courir trop loin devant eux et de les attendre, il risquait de se perdre. Levant le nez, il inspira un peu, profitant des derniers jours de chaleur, les jours plus frais arrivant très vite, dans cette région, bien avant le mois d'octobre. Bientôt le retour des vestes plus chaudes et, sans aucun doute, une immense épidémie de rhume parmi les élèves, comme chaque année. La rentrée avait été très... chaotique. Oui, il avait espéré un minimum de calme, pas à ce bazar infernal. Lorsqu'il était revenu, le sous-directeur avait un air si livide que personne n'avait osé faire le moindre commentaire et encore moins lui demander ce qui lui était arrivé, au juste. Frédéric avait le seul à lui sourire d'un air entraînant, sans doute fou de joie de redevenir simple professeur... Ce qui se comprenait, honnêtement. Cyprien prit la main de Céleste dans la sienne tout en marchant sur ce long chemin de campagne, attendri devant Lucas qui pouvait se dépenser un peu. Prendre l'air, voilà son seul but de l'après-midi, surtout après avoir passé la moitié de la semaine à entendre certaines rumeurs qui lui retournaient l'estomac.

– Tu as entendu les rumeurs de cette semaine ? demanda-t-il à Céleste, très tendu. Comme quoi elle serait enceinte...

Oui, il ne devait plus s'en soucier, oui, ça ne le concernait pas, oui, il devrait passer à autre, chose, mais là, non, la pilule ne passait pas. Ce grand rouquin de mes deux venait à peine de revenir ! Il devait sûrement se croire si malin et si fort, à se promener partout comme si tout le pensionnat et le village lui appartenaient, avec sa gueule de grand ahuri ! En plus, il était comme la hyène, il faisait peur aux élèves ! Maintenant qu'on était dans les ragots, il y en avait aussi qui circulaient sur lui. Rien qu'avec la chorale qu'il animait, par exemple, le fait qu'il sache chanter – Cette baraque savait chanter ! – ou qu'il soit peut-être un agent du FBI ultra-formé et entraîné pour combattre l'armée Française et autres délires. Il tourna brièvement la tête vers sa compagne, voyant son air hésitant.

– Oui... Je l'ai entendu. Mais ça ne doit pas être volontaire, vu sa première grossesse...

Alors ça, ce n'était pas prouvé ! Mossieur le seigneur tout-puissant de France avait sûrement dû convaincre Gabriella, grâce à ses superbes talents d'avocat et de chanteur, il avait dû lui déclamer toute une sérénade en mode "épouse-moi", tirade apprise par cœur car il était sûrement incapable d'improviser le moindre début de paroles, pour une chanson ou même une comptine pour enfants, il fallait disposer d'un cerveau pour ça ! Or, qui avait déjà vu un gorille roux disposer d'un cerveau ? L'évolution peut certes faire des miracles mais pour en obtenir un aussi énorme, il faudrait s'adresser à Dieu en personne, las, ce dernier ne perd guère de temps à combler le vide dans la tête des primates roux malades et cyniques. Cyprien se contenta donc de marmonner que ce n'était pas certain, fourrant sa main libre dans sa poche en serrant un peu celle de Céleste. Ils enjambèrent une clôture pour continuer sur un autre chemin, répétant à Lucas de ne pas aller trop vite. Il s'énervait dès qu'il pensait au primate rouquin, qui aurait mieux de fait de rester dans on cercle social de gros riches tellement supérieurs au reste de la population. "de la Valière", qu'est-ce que c'était que ça, franchement ?! On dirait un nom nauséabond d'une vieille marque de produit pour vaisselle.

– Moi, je te dis que si, c'est involontaire. Gabriella t'aimait, arrête de douter de toi... Et puis, je suis là, moi. Lucas aussi et tu auras des enfants. Ce que font Auguste et Gabriella ne nous regarde pas... Pas après ce qu'on a fait.

Mais ça ne changeait rien à la fourberie du primate roux ! Ils ne pouvaient pas être absolument certains que c'était involontaire, qui sait ce que ce grand seigneur avait sorti comme saloperie ? Ou alors, il était parti en mode "Tu ne seras plus insultée par la Haute société si tu as un enfant avec moi". Roh le serpent, le vil serpent. Un serpent qui chantait des insanités et fourberies ! Tssssss ! Il imita le serpent à haute voix malgré lui, avec la grimace allant avec, tout en grognant que ce type rouquin barbu était Lucifer en personne. Céleste éclata de rire, répliquant qu'il racontait n'importe quoi et était simplement jaloux. Jaloux de lui ?! Bah ! Il n'était pas jaloux, personne n'a besoin d'être une grosse armoire baraquée pour se sentir bien ! Personne n'avait non plus envie d'être assuré de son avenir sa vie entière sans devoir calculer son budget tout le long du mois ou d'avoir peur de ne pas pouvoir payer les études des enfants. Enfin... Continuant la route, ils ralentirent un peu en arrivant dans un sous-bois, apaisés devant le calme absolu de l'endroit, le long chemin commençant déjà à se couvrir de quelques feuilles. Ils étaient bien avancés lorsqu'ils entendirent quelqu'un chantonner. Hum ? Après un petit virage, ils virent une femme, habillée d'une longue robe noire avec un tablier blanc qui semblait assez riche, une coiffe blanche sur ses cheveux attachés en chignon et les manches retroussées, occupée à récupérer des draps sur des cordes à linge. Il hésita, alors que Lucas revenait vers eux.

– Heu... Bonjour.

Elle sursauta, poussant un petit cri de surprise, lâchant le drap immaculé qu'elle était en main. Ouhlà, du calme ! Il ajouta aussitôt que tout allait bien, ils n'étaient pas des criminels ni des voleurs, juste une famille en promenade, pendant qu'elle portait une main à son cœur en leur jetant un regard ahuri. Il se précipita pour ramasser le drap, qui était tombé dans la gadoue, le rendant à la femme avec un petit mot d'excuse, surtout en voyant qu'il s'agissait du dernier. Navré. Mais, hum... Croiser une femme de chambre ici, ça voulait dire qu'il y avait une maison de maître ou un manoir dans le coin ? Et qu'ils étaient sur des terrains privés ? Oups. Et maintenant ? Si un garde-chasse leur tirait dessus ou s'ils avaient un accident, ce sera à eux de payer de leur poche tous les dommages et les éventuels soins, étant donné qu'ils n'avaient rien à faire ici. La femme de chambre lui jeta un regard furieux, se penchant pour ramasser le panier et leur dire qu'ils devaient repasser par le portail de la propriété pour retrouver la route. Il rougit un peu, laissant Céleste prendre la main de Lucas, puis suivre la jeune domestique. Elle les ramena tout d'abord dans un immense parc, où se distinguait plus loin un luxueux manoir, dans le style Victorien. Celui qui vivait ici était au moins baron.

Arrivés à la maison, par l'arrière, ils virent d'abord une grande terrasse en pierre dallée, avec tout ce qu'il fallait pour se détendre, même un court de tennis aménagé. Cyprien, qui s'apprêtait à demander en souriant à la chambrière qui vivait ici, sentit son sourire littéralement fondre sur son visage lorsque vite le bellâtre-roux-crétin-baraqué-abruti-médisant-serpent-fourbe-sournois-Satan occupé à faire des abdominaux au sol, torse et pieds nus, simplement vêtu d'un pantalon de sport. Nom de *** ! C'était lui qui vivait ici ?! Il tourna tout à coup la tête vers eux, pendant que Cyprien se retenait pour ne pas hurler, sans cesser ses pompes pour autant. Vomir, hurler, essayer de le frapper, quelle était la meilleure option ? La chambrière indiqua où les avait trouvé, qu'ils s'étaient égarés sans savoir qu'il s'agissait d'une propriété privée, avant de partir, sans doute pour retourner à la buanderie. Céleste s'était rapprochée, lui prenant le bras puis la main, alors que mossieur ce grand seigneur se relevait souplement en se frottant les mains.

– C'est toi qui vit ici ?! cracha-t-il aussitôt. Et bien ça va, la vie est belle, c'est facile lorsqu'on naît avec une cuillère en argent dans la bouche ! Je savais bien que tu étais fourbe, manipulateur et sournois, on voit aussi que tu profites bien de t'enrichir sur le dos des autres pour racheter peu à peu tout le village ! Tu t'es bien amusé, à te faire des héritiers ?!

Il s'interrompit pour reprendre son souffle, alors que le bellâtre roux avait haussé les sourcils, la bouche pincée, sans que Cyprien n'en soit intimidé le moins du monde. Il était plus que temps que ce seigneur apprenne ses quatre vérités ! Temps qu'il capte qu'il n'était en rien supérieur aux autres ! Il allait en rajouter lorsque Céleste fit volte-face pour se planter devant lui, mettant ses mains sur son torse comme pour le retenir, chuchotant ensuite très vite.

– Chut ! On n'est pas chez nous, s'il te plaît...

Même, quelle importance ?! Il lui murmura qu'on s'en fichait, que c'était tout de même un sale type, lorsque Lucas fit diversion, s'approcha avec de grands yeux étonnés du sale type, maintenant que sa sœur l'avait relâché, type qui lui sourit et lui proposa un jus de pomme, s'il avait soif. Cyprien en resta bouche bée, les regardant rentrer à l'intérieur avec le bellâtre en les plantant là tous les deux. D'accord... Non mais très bien, le petit garçon venait juste de leur coller un énorme vent. Non mais, d'accord, très bien, parfait, bonjour le respect des adultes ! Il échangea un regard avec sa compagne puis haussa légèrement les épaules. Autant le suivre, maintenant. Ils passèrent une baie vitrée puis arrivèrent dans un grand... Salon ? Oui, c'était un salon, avec une cheminée incroyable, des canapés, une bibliothèque très longue et large, un grands escalier en bois, très classe. Lucas n'était pas bien loin, buvant un verre de jus de pomme, debout à regarder une femme endormie dans un fauteuil. Il se sentit pâlir en reconnaissant Gabriella, ignorant qu'elle était de retour de Paris. Elle dormait profondément, livide, un bras coincé en écharpe. La voir dormir en plein après-midi, comme ça, c'était déjà un exploit incroyable. Il ne put s'empêcher de l'examiner du regard, bien qu'il n'y ait absolument aucun signe visible de sa grossesse. Céleste était mal à l'aise aussi, c'était voyant, remuant pour aller près de Lucas.

– Tu crois sans doute qu'elle voulait un autre enfant ? lança tout à coup Auguste en revenant, habillé et chaussé. Il va falloir apprendre à te servir de ton cerveau, la crevette.

Cyprien rougit encore plus, piqué au vif, se retenant tout juste de hurler car Gabriella dormait à côté d'eux. Là, il préférait ne surtout pas la réveiller, quoi qu'il arrive, ne voulant pas se retrouver face à elle ici. Il se tourna pour être face au bellâtre, très raide et furieux, profondément vexé et sans doute jaloux.

– Mieux vaut être une crevette qu'un malotru baraqué sans honneur, siffla-t-il à voix basse et glaciale. Tu es un véritable serpent ! Depuis quand de temps étais-tu amoureux d'elle, lorsque tu as débarqué cet été ?!
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Anonymous Invité
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MessageSujet: Re: Histoire d'enfants   Histoire d'enfants EmptyDim 7 Fév - 19:46

Ce maudit maréchal manquait tellement de tact et de délicatesse, bien qu'il n'ait pas tord sur certains points. Auguste grogna un peu, se levant et s'abaissant, mains au sol, orteils plantés dans la pierre, le corps tendu et parfaitement droits, alors qu'il effectuait une sérieux d'abdominaux, soufflant avec régularité. Un deux, deux, trois, on s'abaisse, on se relève, on s'abaisse, on se relève, un, deux, trois. Il s'était mis torse nu, transpirant, s'entraînant dehors depuis presque deux heures, depuis le moment où Gabriella s'était enfin endormie, dans le salon. Il avait passé une très longue matinée à lui parler puis une bonne heure pour l'apaiser suffisamment pour qu'elle puisse s'endormir. Un, deux, trois. L'exercice physique lui permettait d'expulser toute la nervosité qui l'habitait, la colère, la peur, toutes les émotions négatives. Ici, sa femme était en sécurité, elle pourra se reposer, d'autant plus que ses subordonnés veillaient aussi sur la maison. Il accéléra un peu le rythme, s'appuyant parfois d'une seule moment, son souffle parfaitement maîtrisé. On s'abaisse et on se relève, dans un rythme soutenu, les muscles des bras tendus, le corps et le dos bien droits. Il était plongé dans cet exercice lorsqu'il vit, du coin de l’œil, une scène dont il se serait bien passé. La crevette, Céleste et un gamin blond, revenant derrière Emma, qui ramenait le linge. Allons bon, que fichaient-ils chez lui, ceux-là ?

Emma lui expliqua brièvement ce qui se passait avant de rentrer, les laissant ici. Oh, d'accord, ils n'avaient pas dû bien assimiler qu'une barrière signifiait qu'on entrait sur un terrain privé. Il sauta sur ses pieds avec souplesse, se frottant les mains pour en ôter les petits gravillons, espérant que Gabriella ne se réveille pas maintenant. Elle était malade, épuisée et avait besoin de repos, ce n'était pas le moment pour les visites de courtoisie. Cyprien s'était rapproché d'un pas, Céleste accrochée à lui et le petit garçon accroché à Céleste. Quel trio de choc, il pourrait presque en rire. Sérieusement, ils voulaient parler de quelque chose ? Qu'ils se dépêchent, le gamin n'avait pas l'air très à l'aise. Il voulait peut-être boire quelque chose, il avait dû marcher longtemps, déjà, le village n'était pas à côté. Un jus d'orange, de l'eau, du lait, autre chose ? C'était un tout petit garçon, Auguste avait envie de lui faire plaisir, il avait toujours adoré les enfants, tenant à ce qu'ils aient une éducation solide et apprennent comment tenir une bonne hygiène de vie et de bonnes manières. Bonnes manières que devrait revoir Cyprien, par ailleurs, on évite de tirer une tête de gorille ayant une rage de dents lorsqu'on arrivait ainsi chez quelqu'un, surtout à l'improviste. Il avait besoin d'un petit rappel concernant la politesse et le savoir-vivre ?

– C'est toi qui vit ici ?! cracha-t-il aussitôt. Et bien ça va, la vie est belle, c'est facile lorsqu'on naît avec une cuillère en argent dans la bouche ! Je savais bien que tu étais fourbe, manipulateur et sournois, on voit aussi que tu profites bien de t'enrichir sur le dos des autres pour racheter peu à peu tout le village ! Tu t'es bien amusé, à te faire des héritiers ?!

D'accord... Auguste leva un sourcil, à la fois outré et désespéré, songeant que ce n'était plus un rappel des règles de savoir-vivre qu'il lui faudrait mais toute une leçon pour les lui fourrer dans le crâne ! Pensait-il réellement que Gaby ait voulu un autre enfant, qu'elle ait voulu être enceinte une seconde fois alors que sa première grossesse s'était si mal déroulée ? Il sourcilla en voyant Céleste se précipiter sur la crevette pour essayer de le calmer, ne criant pas uniquement pour ne pas prendre le risque de réveiller Gabriella. Cette crevette venait cracher toute sa jalousie chez lui et sans aucune gêne, bonjour le culot ! Comment était-ce possible d'être vénal et imbécile à ce point, avait-il au moins conscience des énormités qu'il lançait ? Enfin... Le petit n'avait rien à voir là-dedans, il n'avait pas à être impliqué ni à subir les cris des adultes, donc on se contient aussi pour lui. Lorsqu'il se rapprocha, Auguste lui proposa de rentrer boire un verre de jus de pomme, avec un sourire. Le petit accepta avec un large sourire, le suivant pour rentrer. Auguste s'étira, laissant Eric donner un verre au petit avant d'aller dans la salle de bain du rez-de-chaussée. Il fit une toilette rapide avant d'enfiler une chemise et des chaussures, s'étirant de nouveau. Voilà, c'était mieux ainsi.

Revenant dans le salon, il aperçut la crevette et Céleste debout et assez empotés. Heureusement, Gabriella était toujours profondément endormie. Dire que cet imbécile avait cru qu'elle avait désiré être de nouveau enceinte... L'agacement revint en force dans l'esprit du professeur de maths. Il se moquait bien qu'on l'insulte ou qu'on le méprise, ça n'avait aucune importance à ses yeux, en revanche, il avait à cœur de défendre Gabriella, qui n'avait pas à subir ce genre de commentaires, lancés par des crétins ! Il estimait qu'elle en avait déjà assez vu, assez fait, pour qu'il y ait besoin d'en rajouter. Cyprien ne comprenait même pas cela ?! Qu'elle n'avait pas besoin d'imbéciles supplémentaires autour d'elle ?! Et lui, oui, surtout lui, n'avait pas le moindre intérêt à essayer de la blesser encore plus. Il pouvait faire fi de ne pas comprendre, pourtant il était l'un des mieux placé pour savoir que ce n'était pas le moment de blesser encore plus son ex-femme, elle en avait subi, ces derniers jours.

– Tu crois sans doute qu'elle voulait un autre enfant ? lança tout à coup Auguste en revenant, habillé et chaussé. Il va falloir apprendre à te servir de ton cerveau, la crevette.

Il rougit, apparemment piqué au vif. Très facile de le vexer, il était donc véritablement jaloux. Comment ne pas vouloir rire devant tant de stupidité ou de naïveté ?! Il faisait semblant de ne pas comprendre, c'était impossible autrement... Du moins, Auguste priait pour que ce soit le cas, qu'il soit juste jaloux et un peu naïf, ce sera toujours moins pire que d'être un crétin cruel et fini. Ne pouvait-il pas tout simplement continuer ainsi, poursuivre le cours de sa vie sans se sentir obligé de pourrir celle des autres ?

– Mieux vaut être une crevette qu'un malotru baraqué sans honneur, siffla-t-il à voix basse et glaciale. Tu es un véritable serpent ! Depuis quand de temps étais-tu amoureux d'elle, lorsque tu as débarqué cet été ?!

– Nous sommes sortis ensemble avant que les ennuis ne commencent vraiment, au pensionnat, si tu veux le savoir, haussa-t-il les épaules. Je n'ai pas cessé de l'aimer, elle, vraiment, pas une image que je m'étais forgée.

Il crut durant un instant que Cyprien allait vomir sur son tapis. Gaby remua tout à coup, marmonnant quelque chose dans son sommeil. Il vint aussitôt près d'elle, l'entourant de ses bras puis la souleva avec une extrême délicatesse pour l'allonger sur le canapé, effrayé en voyant à quel point elle avait maigri, en si peu de temps. S'asseyant sur la petite table basse à côté, il caressa doucement sa joue en lui murmurant que tout allait bien, d'un ton apaisant. Chhhht... Tout va bien... Il était là, elle n'était pas seule. Redressant la tête, il suggéra au petit garçon de suivre Emma, elle allait lui montrer la salle de jeux de la maison. Il sourit doucement en le regardant partir, baissant ensuite la tête vers sa femme. Elle respirait plus paisiblement que ce matin, elle avait vraiment besoin de beaucoup de repos. Il attendit qu'elle replonge dans un sommeil plus profond, sans cesser de caresser sa joue avec une extrême douceur. Une fois certain qu'elle était bien profondément endormie, il jeta un regard glacial à Cyprien, toute trace de sourire disparue.

– Alors... Oui, je l'aime, et oui, elle m'aime. Oui, nous sommes sortis ensemble, oui, nous étions ensemble, avant que je ne doive partir. Oui, je me suis toujours promis de revenir et la retrouver. Oui, je savais qu'elle allait poursuivre le combat, je l'espérais, même, car je savais qu'elle en était capable. Oui, je me suis engagé dans l'armée pour elle. Et oui, je suis capable de la protéger, car je ne suis pas un faiblard naïf.

Il se leva, dominant les deux autres de toute sa hauteur. Il ajouta d'un ton plus froid que lorsqu'on voulait agir, il fallait veiller à ne plus être soi-même un enfant et à ne pas se comporter comme tel, que la guerre était avant tout une affaire d'adultes et que ceux qui n'avaient pas les nerfs pour cela devaient rester en arrière, même s'ils voulaient agir.

– Quand on est adulte, on ne pleurniche pas et on avance. On ne s'attarde pas des mois sur le passé en chouinant comme un enfant. On réfléchit, on cherche des solutions, on protège les plus jeunes. Et lorsqu'on veut participer à une guerre, on s'assure d'en avoir les moyens.

Il les fixait tous les deux, à tour de rôle, le visage fermé.

– Insulte-moi tant que tu le voudras, siffla-t-il en fixant la crevette droit dans les yeux, mais ne t'avise pas d'essayer de la blesser elle. C'est clair ?!
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Anonymous Invité
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MessageSujet: Re: Histoire d'enfants   Histoire d'enfants EmptyJeu 11 Fév - 0:11

– Nous sommes sortis ensemble avant que les ennuis ne commencent vraiment, au pensionnat, si tu veux le savoir, haussa-t-il les épaules. Je n'ai pas cessé de l'aimer, elle, vraiment, pas une image que je m'étais forgée.

Avant... Donc... Dès le mois de septembre 1930 ... ? Il allait répliquer lorsque Gabriella remua tout à coup dans son sommeil, lui faisant attraper la main de Céleste particulièrement fort en reculant d'un pas, soudain terrifié qu'elle se réveille, même si c'était parfaitement ridicule. Il n'avait pas envie d'affronter son regard accusateur, pas là, pas ici, surtout pas ici. La baraque se pencha puis la souleva, avant de l'allonger sur le canapé, avec une certaine douceur, puis de s'asseoir sur la table basse, près d'elle. D'accord, lui était assez musclé pour être capable de ça sans même qu'elle ne le réalise. Cyprien échangea un regard avec Céleste, toujours assez mal à l'aise en le voyant s'occuper d'elle, les joues plutôt rouges. Le rouquin se redressa tout à coup, suggérant à Lucas de suivre sa domestique pour aller dans la salle de jeux. Le professeur de sciences eut un petit mouvement, de sa main libre, pour l'arrêter, afin qu'ils ne tardent pas trop à repartir, mais trop tard, le petit garçon avait déjà filé. Bon sang ! Il resta planté sur place, se rendant compte qu'il devait serrer la main de Céleste trop fort et lui faire mal, relâchant la pression avec un sourire d'excuse. La baraque finit par se relever, le crispant aussitôt alors qu'il venait à peine de se détendre un peu. Il coula un rapide regard en biais à Gaby pour être certain qu'elle dormait toujours. C'est bon. Et il aurait aimé que ce grand singe dorme aussi.

– Alors... Oui, je l'aime, et oui, elle m'aime. Oui, nous sommes sortis ensemble, oui, nous étions ensemble, avant que je ne doive partir. Oui, je me suis toujours promis de revenir et la retrouver. Oui, je savais qu'elle allait poursuivre le combat, je l'espérais, même, car je savais qu'elle en était capable. Oui, je me suis engagé dans l'armée pour elle. Et oui, je suis capable de la protéger, car je ne suis pas un faiblard naïf.

Qui traitait-il de faiblard naïf ?! Cyprien était parfaitement capable de s'en sortir, dans de nombreuses situations, il ne se laissait pas marcher dessus comme ça ! Le gorille ajouta que celui qui voulait agir devait veiller à ne plus se comporter comme un enfant, car la guerre était une histoire d'adultes, celui qui n'avait pas les nerfs pour cela devait rester en arrière. Le professeur devenait de plus en plus rouge, serrant à nouveau fort la main de Céleste et serrant son autre main en un poing crispé, piqué au vif. Ce gorille était un grand malade, on ne souhaitait pas à une jeune femme de s'enfoncer ainsi dans une lutte qui les dépassait tous, au risque d'y laisser la vie ! Il lançait comme ça, comme si c'était naturel de vouloir jeter celle qu'on aimait dans les griffes de l'armée puis la regarder se battre ! Il était complètement dingue !

– Quand on est adulte, on ne pleurniche pas et on avance. On ne s'attarde pas des mois sur le passé en chouinant comme un enfant. On réfléchit, on cherche des solutions, on protège les plus jeunes. Et lorsqu'on veut participer à une guerre, on s'assure d'en avoir les moyens.

Il se croyait peut-être malin, à donner des leçons, mais lui avait dû "partir" pendant que Cyprien et Céleste étaient sur le terrain depuis un an ! Qu'avait-il eu de si important à faire, pendant tous ces mois, au lieu d'aider Gabriella, s'il l'aimait tant ?! C'était si facile, de revenir comme ça et de penser pouvoir donner des leçons aux autres !

– Insulte-moi tant que tu le voudras, siffla-t-il en fixant la crevette droit dans les yeux, mais ne t'avise pas d'essayer de la blesser elle. C'est clair ?!

– C'est tellement facile de revenir comme ça et de prétendre pouvoir donner des leçons aux autres ! s'écria-t-il brutalement. Pour qui te prends-tu ?!

Il lui sembla que le gorille eut envie de le frapper mais il ne fit rien, tous interrompus par un long gémissement. Merde. Il pâlit un peu lorsque Gabriella bougea, lâchant un soupir avant de se frotter les yeux puis tourner la tête vers eux. Il essaya de sourire, reculant d'un pas en broyant littéralement la main de Céleste. Il s'attendait presque à entendre de l'orage ou voir  de la pluie, crispé, sauf que rien ne se passa, Gabriella ne parla même pas, se contentant de leur jeter un regard maussade sans même faire un commentaire sur leur présence ici. Rien que ça était déjà plus choquant que tout le reste, ce qui le dissuada d'ouvrir la bouche et lâcher lui-même une remarque. Il ne bougea pas plus lorsqu'elle remua un peu en grimaçant, les larmes aux yeux, puis se redressa pour s'asseoir. Mauvaise idée, ça, elle allait tourner de l’œil, vu son teint. Auguste alla près d'elle, secouant la tête en les regardant avec un air las.

– Où sont les jumeaux ? murmura Gaby d'une voix qu'il jugea bien faible.

– Ils jouent avec Emma. Le petit Lucas doit être avec eux aussi. Ils vont bien. Kimmitsu s'est bien remis aussi.

Lucas qui les avait carrément plantés sur-place en filant ils ne savaient où, ce que Cyprien n'avait toujours pas digéré. Il veillait à ne rien dire, serrant très fort la main de Céleste, ne se faisant surtout pas remarquer. Gabriella répéta "Lucas..." deux fois, semblant perdue, avant d'hocher la tête. La voir ainsi était... très... bizarre. Il ne se souvenait pas de l'avoir déjà vu endormie, à vrai dire, même le matin très tôt, elle se réveillait très vite et fonçait. Alors que lui mettait parfois plus d'une heure avant d'ouvrir les yeux en grand et affronter la nouvelle journée. Il ne bougeait plus du tout, tout comme Céleste, qui était assez pâle, préférant se faire tout petit. Le gorille aida Gaby à se rallonger sur le canapé, se redressant ensuite. Il en resta soufflé lorsqu'elle se rendormit presque aussitôt, la tête à peine posée sur l'oreiller. Là aussi, c'était un véritable miracle.

– On... on va récupérer Lucas et y aller.

Il attendit le petit garçon avec une certaine impatience, quittant aussitôt la pièce avec lui dès qu'il revint. Un autre domestique les accompagna jusqu'à l'entrée du parc, leur souhaitant une bonne fin de journée lorsqu'ils se retrouvèrent sur la route, reprenant al direction du village. Ce ne fut qu'à cet instant que Cyprien relâcha enfin la main de céleste, s'excusant en rougissant de la lui avoir broyé.

– Désolé, c'est les nerfs. Ça va, toi ?
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Récits : 234

Âge RPG : 26 ans
Don(s) : Fulgumancienne et Frigumancienne
Taille : 1m73
Céleste Dumoulin
Espionne
Céleste Dumoulin
MessageSujet: Re: Histoire d'enfants   Histoire d'enfants EmptyDim 14 Fév - 15:31

Cyprien – Mieux vaut être une crevette qu'un malotru baraqué sans honneur, siffla-t-il à voix basse et glaciale. Tu es un véritable serpent ! Depuis quand de temps étais-tu amoureux d'elle, lorsque tu as débarqué cet été ?!

Auguste – Nous sommes sortis ensemble avant que les ennuis ne commencent vraiment, au pensionnat, si tu veux le savoir, haussa-t-il les épaules. Je n'ai pas cessé de l'aimer, elle, vraiment, pas une image que je m'étais forgée.

Mais il était fou ! Ils étaient chez Auguste, il s’en rappelait ?! Gabriella dormait juste à côté d’eux, elle se reposait, il était hors de question qu’elle les voie ici alors qu’elle avait besoin de tranquillité sans qu’ils ne soient là. Et puis, c’était eux. Rien que ce point-là suffisait à devoir le calmer. Non ? C’était un manque de respect, ils devaient partir, et vite. Ils ne pouvaient pas rester là, encore moins réclamer des comptes à Auguste alors qu’il avait été le seul à vraiment comprendre Gabriella. C’était horrible pour Cyprien, oui, mais c’était comme ça. Il s’était bercé d’illusions durant des mois sans comprendre les nombreuses allusions que lui faisait Céleste… Et maintenant, il en souffrait. Il en souffrait parce qu’un collègue lui avait dit ses quatre vérités, même s’il ne semblait plus être amoureux de Gabriella. Enfin… Elle n’avait jamais osé le lui demander. Trop peur de la réponse, c’était trop tôt. Et elle-même était trop fragile.

Avant que Cyprien ne réponde, la directrice remua dans son sommeil, faisant pâlir Céleste qui ne sentit qu’à peine la main de son amant qui serrait la sienne beaucoup trop fort. Il était aussi terrorisé qu’elle, ni l’un ni l’autre ne bougeait tandis qu’Auguste s’occupait de Gabriella en la rassurant et en essayant de la faire se rendormir complètement. Cyprien était un crétin ! Il était incapable de se contenir, ne serait-ce que deux secondes ! Hurler dans la maison d’Auguste, le provoquer ouvertement tout en tenant la main de Céleste devant son ex-femme, qu’il avait trompée au passage. Fallait-il être stupide ! Elle lui avait dit d’arrêter, de se calmer, de se taire… Mais non, il était stupide, un véritable imbécile. Et maintenant, si Gabriella se réveillait, ce serait bien pire. Céleste avait eu raison de craindre la suite des événements, Cyprien était incapable de se tenir et était même pire que les collégiens dont ils devaient tous les deux s’occuper. Par chance, la directrice se rendormit et ne remarqua même pas leur présence, ce qui lui permit de respirer d’un seul coup comme si une partie de la tension s’était envolée.

Auguste invita ensuite Lucas à aller jouer dans la salle des jeux, les laissant seuls sans qu’ils ne puissent rétorquer quoi que ce soit. Evidemment, son frère n’allait pas se faire prier là-dessus, entre des jeux et une discussion entre adultes à laquelle il n’allait rien comprendre… Dès qu’il eut filé, Cyprien desserra un peu sa main sur celle de Céleste, lui souriant pour s’excuser d’avoir serré si fort sans qu’elle ne réagisse vraiment. Ce n’était rien, elle avait compris, même si cette situation la mettait horriblement mal à l’aise. Elle le sentait mal. Très mal. Sans Lucas dans le coin, ils pouvaient dire nettement plus de choses sans faire attention. Auguste finit par se relever, Cyprien se crispant aussitôt à côté d’elle tandis que Céleste retenait un mouvement de recul. Pas la peine d’en rajouter. Même s’il était très grand…

Auguste – Alors... Oui, je l'aime, et oui, elle m'aime. Oui, nous sommes sortis ensemble, oui, nous étions ensemble, avant que je ne doive partir. Oui, je me suis toujours promis de revenir et la retrouver. Oui, je savais qu'elle allait poursuivre le combat, je l'espérais, même, car je savais qu'elle en était capable. Oui, je me suis engagé dans l'armée pour elle. Et oui, je suis capable de la protéger, car je ne suis pas un faiblard naïf.

… Ca, c’était fait. Céleste lança un regard inquiet à Cyprien, s’assurant qu’il n’allait pas commettre d’imprudence alors qu’Auguste ajoutait que celui qui voulait agir devait veiller à ne plus se comporter comme un enfant, la guerre étant une histoire d’adultes. A mesure qu’il parlait, Cyprien avait resserré un peu plus fort sa main sur celle de Céleste, de plus en plus rouge, lui donnant l’impression d’être complètement impuissante. Il se contenait, oui, elle le sentait… Mais il était idiot, se laissait avoir et courait dans les « pièges » d’Auguste, réagissant au quart de tour. Il savait que leur collègue le faisait exprès ! Il l’avait provoqué dès qu’il l’avait reconnu, à quoi s’était-il attendu, au juste ?! Il était pire que les collégiens, dans sa jalousie, et le professeur de maths en profitait largement… Il devait bien s’amuser, oui. Ou être terriblement blasé. Dans tous les cas, celui qui ressortirait d’ici en mauvais état était Cyprien, il réagissait trop vite.

Auguste – Quand on est adulte, on ne pleurniche pas et on avance. On ne s'attarde pas des mois sur le passé en chouinant comme un enfant. On réfléchit, on cherche des solutions, on protège les plus jeunes. Et lorsqu'on veut participer à une guerre, on s'assure d'en avoir les moyens.



Céleste pâlit en à peine quelques secondes, rassurée pour la première fois depuis qu’ils étaient entrés ici de savoir que Cyprien lui tenait la main. Elle avait l’impression qu’elle allait défaillir, sa discussion avec son ancien professeur lui revenant en mémoire avec les paroles de son collègue. Surtout qu’il l’avait regardée, ces paroles s’adressaient autant à elle qu’à Cyprien. Elle n’avait rien dit ! Rien fait ! Se mordant les lèvres, Céleste fut incapable de bouger, ne cessant de repenser à Estelle, monsieur Francfort et la journée qui s’était déroulée ensuite sans qu’elle ne puisse riposter réellement, se sentant encore moins bien le soir même tout en sachant que c’était « normal ». Elle n’avait même pas pu dire à Cyprien ce qui s’était passé. Pas la force.

Cyprien – C'est tellement facile de revenir comme ça et de prétendre pouvoir donner des leçons aux autres ! s'écria-t-il brutalement. Pour qui te prends-tu ?!

… Cyprien ! Pourquoi avait-il hurlé comme ça ?! Céleste posa un regard terriblement inquiet à Gabriella qui venait de bouger à l’instant-même où Auguste avait semblé sur le point de frapper son collègue. Elle lança un regard noir à Cyprien, ne bougeant plus d’un pouce dans l’espoir de disparaître du champ de vision de la directrice s’ils restaient suffisamment immobiles. Elle tourna la tête vers eux, leur lançant un regard maussade tandis que Céleste essayait d’envoyer un message à sa main pour la retirer de celle de Cyprien, au moins. Elle s’attendait à entendre un flot d’insultes leur tomber dessus, des orages tonner un peu plus loin ou… n’importe quoi. Mais rien ne se passa. Gabriella ne dit absolument rien, ce qui était encore plus terrifiant à bien y réfléchir. Elle n’avait rien dit… pas réagi… Rien du tout ! Ce qui prouvait à quel point elle était fatiguée… Son teint, son regard, son attitude, tout l’indiquait. Auguste fut le premier à bouger, se rapprochant de sa compagne pour s’occuper d’elle, totalement indifférent à leur propre présence – et tant mieux.

Gabriella – Où sont les jumeaux ? murmura Gaby d'une voix incroyablement faible.

Auguste – Ils jouent avec Emma. Le petit Lucas doit être avec eux aussi. Ils vont bien. Kimmitsu s'est bien remis aussi.

Même ici, Auguste donnait toutes les informations qui intéressaient Gabriella d’emblée en quelques phrases à peine de manière à la rassurer sans lui prendre trop de temps de sommeil… Céleste ne bougea pas, voulant se faire toute petite et toujours très mal à l’aise, la voix de son ancien professeur retentissant inlassablement dans son crâne. Il n’avait pas hurlé. Pas une seule fois. Mais il avait tout compris et la suite avait été éprouvante. Céleste ravala sa salive pendant que Gabriella répétait « Lucas » une deuxième fois, peinant à se souvenir de son petit frère apparemment, mais elle finit par hocher la tête sans rien dire de plus. Pour se rendormir dès qu’Auguste l’eut aidée à se rallonger dans le canapé… La jeune professeure en fut soufflée, choquée, eux qui avaient éprouvé de nombreuses difficultés à la pousser à s’endormir pendant des mois. Et maintenant, elle avait complètement craqué… Son corps avait lâché. Comme ils le craignaient…

Cyprien – On... on va récupérer Lucas et y aller.

Oui… Bonne idée, il valait mieux ne pas rester ici plus longtemps. De un, parce qu’ils n’étaient pas chez eux et Auguste risquait de le frapper à force si Cyprien continuait à le provoquer de la sorte. De deux, ils devaient tout de même rentrer au village, chez eux, pour que Lucas puisse manger à une heure raisonnable comme il s’était beaucoup dépensé. Il allait sûrement être affamé lorsqu’ils arriveraient. Et, de trois, Céleste n’avait pas envie de rester plus longtemps ici avec Auguste si c’était pour qu’il l’attaque elle aussi alors qu’elle n’avait rien dit, rien fait, elle avait même essayé de retenir Cyprien. Par chance, Lucas arriva assez vite et ils purent repartir, toujours sans dire un mot, accompagné par un domestique qui les raccompagna jusqu’à l’entrée du parc, leur souhaitant une bonne fin de journée. Céleste s’efforça de lui sourire en le remerciant avant de reprendre la marche, suivant le chemin qui remontait vers le village. Ou redescendait… Où habitait Auguste, au juste ? Elle n’en avait strictement aucune idée. Peu importe. La jeune professeure fut interrompue dans ses pensées par Cyprien qui lui relâcha enfin la main alors qu’elle bougeait ses doigts endoloris et les massait pendant qu’il s’excusait, rougissant.

Cyprien – Désolé, c'est les nerfs. Ça va, toi ?

Si ça allait… Pas vraiment mais qu’il ne s’inquiète pas, ça ira mieux dans quelques heures. Il lui fallait seulement un peu de temps pour digérer tout cela, raison pour laquelle elle n’avait pas encore parlé de ce qui s’était passé avec l’ancien directeur. Il n’avait pas été méchant mais c’était trop… Ce n’était pas facile, encore moins que ce que Cyprien lui avait demandé de faire jusqu’ici. Elle ne s’en voulait plus pour sa sœur ! Mais c’était trop éprouvant pour l’instant. Céleste finit par hocher la tête avec une tentative sourire qui ressemblait plutôt à une grimace, croisant les bras pour ne pas montrer qu’elle mentait « un peu » en répondant à cette question.

Céleste – Tu n’aurais pas dû le provoquer comme cela, dit-elle pour changer de sujet. On était chez lui, il y avait Gabriella… Tu imagines si elle avait été un peu plus en forme ? C’était risqué. Surtout avec ce qu’on a fait, elle… Elle aurait été en droit de mal réagir, elle doit nous haïr et être affreusement blessée. Enfin…

En fait, elle n’en savait rien. Estelle lui avait dit que Gabriella était sûrement blessée, qu’elle devrait lui parler. Juste avant de la gifler en découvrant que Céleste ne maîtrisait pas son don aussi bien qu’elle le devait, qu’elle avait des problèmes… Portant inconsciemment sa main à sa joue, la jeune femme fit une légère grimace avant de ralentir un peu le pas, laissant sa main retomber puis lançant à Lucas de faire attention où il marchait et de ne pas trop s’éloigner. Elle était incapable de prédire la réaction de la directrice vu son état de fatigue. La preuve, elle n’avait strictement rien dit… Est-ce que cette histoire la touchait seulement ?

Céleste – Son corps a dû lâcher complètement, elle n’a pas eu la moindre réaction en nous voyant… Pourtant, Es… tous ses amis sont d’accord pour dire que votre rupture a dû l’affecter, ou qu’elle était plus… Je ne sais pas. Ca m’inquiète, elle est vraiment mal en point. C’est pour ça que j’essayais de te retenir, provoquer une dispute devant elle était stupide. Pourquoi t’es-tu emporté aussi vite ? J’avais l’impression d’avoir mes élèves en face de moi, tu t’es comporté comme un collégien alors que tu es beaucoup plus mature que ça, je le sais. Tu n’as aucune raison d’être jaloux d’Auguste !

Et elle était sincère ! Franchement, qu’avait-il de moins qu’Auguste en dehors de l’argent et du physique ? Leur collègue s’affirmait et était visiblement plus mature que Cyprien qui refusait de tourner la page – ce qu’elle ne pouvait, évidemment, pas lui dire, surtout elle… - alors qu’il avait tout pour être heureux lui aussi. Ou peut-être aimait-il toujours Gabriella… ? Si c’était le cas, qu’il le lui dise. Parce que vraiment, Céleste ne comprenait pas pourquoi il réagissait de manière aussi vive. Elle avait essayé de le prévenir ! Mais non, il était resté aveugle… La jeune femme porta sa main gauche à sa nuque pour se la masser brièvement, levant la tête vers l’arrière avant de la tourner vers Cyprien, croisant à nouveau les bras. Pourquoi ? C’était vraiment la question qui lui brûlait les lèvres… Regrettait-il d’avoir rompu ? Ils continuaient de marcher sur le petit chemin, croisant quelques passants maintenant que l’heure du déjeuner approchait, le village devant sans doute être un peu plus animé qu’à leur départ.

Céleste – Pourquoi es-tu jaloux ? J’ai passé des mois à te répéter que tu te faisais des illusions, que tu… n’aimais peut-être pas Gabriella comme elle était vraiment. Je comprends que tu sois blessé par ce qui s’est passé mais maintenant, c’est passé, non ? Sauf si tu regrettes…
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MessageSujet: Re: Histoire d'enfants   Histoire d'enfants EmptyJeu 18 Fév - 23:11

Il tourna la tête vers elle brièvement, alors qu'elle hochait la sienne. Ils descendaient le long d'une route filant dans la campagne, le village de Gray se faisait voir voir plus loin, à trois ou quatre kilomètres, à vu de nez, en contrebas. Le monstre roux habitait donc dans les collines, son manoir ne devait pas être visible, depuis le village. Humph. Il n'ajouta rien, mettant les mains dans ses poches en poursuivant sa route, surveillant Lucas du coin de l'œil. Il pourrait facilement passer pour leur fils, ainsi, parti pour une balade avec ses parents. Peut-être aurait-il aussi su apprécier une balade avec Alexis, Cyprien l'avait déjà entendu le réclamer une fois ou deux, demandant pourquoi il ne rentrait pas le week-end. Le professeur avait dû lui expliquer qu'il n'était venu qu’exceptionnellement, durant l'été, ça ne se reproduira plus. Lucas avait eu un air très déçu, il avait dû plus s'attacher au jeune homme qu'il ne le laissait voir. Ce n'était pas évident, pour lui, déménager dans ce village, développer un nouveau don, découvrir une nouvelle école, se faire d'autres amis. Il était assez jeune, tout de même, c'était de gros changements.

– Tu n’aurais pas dû le provoquer comme cela, dit-elle pour changer de sujet. On était chez lui, il y avait Gabriella… Tu imagines si elle avait été un peu plus en forme ? C’était risqué. Surtout avec ce qu’on a fait, elle… Elle aurait été en droit de mal réagir, elle doit nous haïr et être affreusement blessée. Enfin…

Qu'en savaient-ils ? Oui, crier était idiot, sans aucun doute, il s'était laissé emporter, voilà tout. Que son ex-femme n'ait rien dit l'avait choqué, c'est vrai, mais il n'avait pas envie de s'y attarder trop longtemps, la culpabilité lui rongeant le ventre. Auguste l'avait bien provoqué aussi ! Il marmonna donc dans sa barbe sans vraiment répondre, pendant que sa compagne lançait à Lucas de ne pas trop s'éloigner. Il allait mourir de faim, en arrivant au village puis à la maison, il lui faudra un bon goûter. Pour le reste... Bah, il ne savait plus. La situation échappait à tout le monde ! Il aurait voulu vivre dans une époque plus paisible, si c'était possible, en arrivant à se demander pourquoi il restait à enseigner ici. Des écoles, ce n'était pas ça qui manquait, après tout, il y en avait pléthore à travers toute la France ! Il en partait pas car... C'était horrible de l'avouer mais ce n'était qu'à cause d'une certaine... fierté blessé. Il n'avait rien su faire de correct jusqu'ici, fuir serait vraiment le coup de grâce. Et la réaction de leurs collègues s'il faisait ça ! Il ne pouvait pas, Céleste serait déçue, personne ne comprendrait, il deviendrait un vulgaire lâche. Partir... Oui, la vie serait sans doute plus paisible et non, il ne pouvait pas, inutile d'y songer. Il voulait agir mais... Avec quels moyens ? Et il n'était pas un faiblard naïf, lui aussi était capable de réfléchir et de faire des choses !

– Son corps a dû lâcher complètement, elle n’a pas eu la moindre réaction en nous voyant… Pourtant, Es… tous ses amis sont d’accord pour dire que votre rupture a dû l’affecter, ou qu’elle était plus… Je ne sais pas. Ça m’inquiète, elle est vraiment mal en point. C’est pour ça que j’essayais de te retenir, provoquer une dispute devant elle était stupide. Pourquoi t’es-tu emporté aussi vite ? J’avais l’impression d’avoir mes élèves en face de moi, tu t’es comporté comme un collégien alors que tu es beaucoup plus mature que ça, je le sais. Tu n’as aucune raison d’être jaloux d’Auguste !

Oh que si ! Et si on devait retenir une seule raison, la voici : il avait réussi en un jour ce que Cyprien avait échoué à faire ne neuf mois. Il avait réussi, il avait tout réussi, il... Cyprien secoua la tête, maugréant entre ses dents. Il avait bien le droit de se sentir parfaitement inutile ! Qu'avait-il réussi à faire, lui, depuis un an ? Hein ?! Un mariage raté, atterrir comme une loque chez Céleste, des cours qui ne devaient sûrement intéresser personne, rien de concret contre l'armée, faire sa femme cocue trois mois après leur mariage, provoquer des disputes, ne pas parvenir à consoler Céleste ni Lucas. Parcours brillant, on applaudit bien fort ! Il ignorait même ce que Gabriella pensait de leur relation avortée, si cela la touchait seulement. Il savait qu'il était responsable, qu'il l'avait trahi, et que... Que... C'était idiot, toute cette histoire était une monstrueuse erreur.

– Pourquoi es-tu jaloux ? J’ai passé des mois à te répéter que tu te faisais des illusions, que tu… n’aimais peut-être pas Gabriella comme elle était vraiment. Je comprends que tu sois blessé par ce qui s’est passé mais maintenant, c’est passé, non ? Sauf si tu regrettes…

– C'est d'être inutile, qui me rend malade ! J'ai passé des mois à essayer de comprendre et agir, et ce type arrive comme ça, comprend tout en une seule journée, et peut agir alors que je reste là à regarder. C'est ça qui me rend jaloux ! J'ai l'impression de ne savoir rien faire ! C'est... Je ne sais pas comment expliquer ça, comme si je m'étais battu pour rien, en gros. Je me sens complètement largué.

Il leva les bras vers le ciel avec un énorme soupir, à la fois blasé et exaspéré, ajoutant qu'il regrettait de n'avoir rien pu faire de concret pour le pensionnat, pour ça oui, qu'il se sentait éjecté et inutile. Lui reprenant la main sur la route, il fit néanmoins un effort pour reprendre une conversation plus normale et banale, afin de ne pas songer à ce qui venait de se passer. Voir Gaby comme ça l'avait angoissé, c'était tout sauf ordinaire. En rentrant au village, ils s'arrêtèrent pour acheter un bout de pain et le journal, avant de rentrer chez eux. Cyprien déposa le pain sur la table, rassurant Lucas qui était affamé en lui disant que oui, ils mangeaient très vite. Tout s'en s'asseyant à table pour aider Céleste à cuisiner, il posa le journal à côté de lui, y jetant un coup d'œil.  Le premier article parlait du Tibet et de la Chine, la fameuse relation conflictuelle qui durait depuis des siècles. Un signe d'amélioration, vraiment ? Il avait un peu de mal à l'avaler, lorsqu'on connaissait l'histoire du pays. Les mains pleines de coquilles d'œufs, il s'essuya avant de tourner la page, haussant les sourcils.

– Ça va plaire au sous-directeur, ça, encore, sourit-il avec un air las. "Fascisme ou traditionalisme ?" En parlant du Japon... Ils ont des soucis de crise et d'armée, là-bas aussi, c'est la fête partout, en ce moment. Après, il y a un article sur l'exposition coloniale. Si on a le temps, pendant des vacances, ça vaudrait le coup de monter sur paris pour s'y rendre, ça plairait à Lucas.

Il lut l'article assez vite, tout en coupant les œufs en rondelles bien fines pour l'entrée de ce midi. Les quelques photos donnaient envie de s'y rendre, en tout cas, ça ne devait pas être si cher, pour une entrée. Tournant la page, il grommela en voyant tout un article parlant des "nouvelles mesures" de l'armée et notamment celles de contrôle des dons. L'ambiance était toujours aussi bonne, on dirait ! "Un barman à Gray peu rassuré", mouais, il voyait très bien de qui il s'agissait. Le gros lard du second bar, tout près de la place, qui ne se gênait pas pour renvoyer balader certains de ses clients. Un immonde abruti, ce type ! Et avare, avec ça. L'article suivant était le mot du président, sur le chômage, qu'il ne lut même pas. C'était la crise et ce n'était pas un secret.

– Ensuite... Un... Roh, bon sang...

Prenant rapidement la serviette pour ses mains, il prit mieux le journal en main, fronçant les sourcils en lisant le début de l'article.

– Et allez, encore un plaidoyer pour insulter Gaby car elle est incompétente et incapable de diriger l'école. Et ils s'en prennent aussi au sous-directeur cette fois. "Il est vraiment très malheureux que cette école soit dirigée par une femme et un étranger !" Dixit un de nos collègues... Pas difficile de deviner lequel.

Il lui lut l'article en entier, après avoir vérifié que Lucas était bien occupé à coudre sa peluche. Ce cher François... Son témoignage puait l'ironie et le cynisme, quand tout le monde savait qu'il ne se gênait pas pour sauter sur tout ce qui portait une jupe, en laissant très souvent souvent Estelle seule avec ses enfants. Il n'était jamais au pensionnat ni chez eux, à Gray, ce qu'il souligna d'un ton morne et indigné.

– Accuser la directrice et le sous-directeur de ne pas se soucier de l'avenir des élèves, ça va les faire bondir d'indignation, ajouta-t-il en tournant la page. Ce crétin de Ménard qui a été baver ça ! Et la pauvre Estelle... Il faudrait quand même que quelqu'un finisse par lui dire quelle ordure est son mari, tu ne crois pas ?
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Céleste Dumoulin
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MessageSujet: Re: Histoire d'enfants   Histoire d'enfants EmptyDim 28 Fév - 11:33

Cyprien – C'est d'être inutile, qui me rend malade ! J'ai passé des mois à essayer de comprendre et agir, et ce type arrive comme ça, comprend tout en une seule journée, et peut agir alors que je reste là à regarder. C'est ça qui me rend jaloux ! J'ai l'impression de ne savoir rien faire ! C'est... Je ne sais pas comment expliquer ça, comme si je m'étais battu pour rien, en gros. Je me sens complètement largué.

Cyprien leva les bras avec ce même air désespéré qu’elle lui connaissait lorsqu’il parlait d’actions au sein du Pensionnat et de Gabriella, lorsqu’ils étaient encore mariés. Il ajouta aussi qu’il regrettait de n’avoir rien pu faire de concret pour le Pensionnat, soupirant. S’il se sentait aussi inutile, pourquoi ne pas chercher des solutions ? Quelque chose pour se bouger et agir concrètement, plutôt que de ruminer sa rancœur et sa jalousie jusqu’à s’en rendre malade ? Céleste y travaillait, elle aussi, même si le fait que son ancien professeur sache tout pour son don entravait quelque peu ses moyens d’action. Pourquoi Estelle lui avait-elle tout dit… ? La jeune professeure n’avait commis aucune erreur ! Elle s’entraînait, travaillait dur, ne s’autorisait plus à avoir peur en cours. Kimmitsu l’avait déjà aidée aussi, alors non, elle n’aurait pas dû en parler sans même lui laisser l’occasion de s’expliquer.

Céleste regarda un court moment la main de Cyprien dans la sienne alors qu’ils se remettaient à marcher, sortant de ses pensées. Elle fit un effort pour se concentrer sur la discussion qu’ils avaient, tâchant de ne pas penser à l’épisode du début de la semaine et à ce qui s’était passé entre Auguste et Cyprien. Ce fut laborieux mais, arrivés au village, la jeune femme n’y pensait plus et ils achetèrent du pain et le journal avant de rentrer, Lucas trépignant d’impatience. Elle poussa un soupir, s’y attendant et redoutant le moment où il aurait faim. Normal, ils avaient plus traîné que ce qui était prévu à cause de la « pause » chez Auguste, ils auraient dû rentrer plus tôt. Grimpant les escaliers, Céleste s’affaira à la cuisine pour préparer le déjeuner, aidée de Cyprien, pendant que son petit frère était occupé avec son nouveau jouet. Elle sortit les œufs, écartant le pain d’elle au maximum pour ne pas le faire tomber par terre par mégarde comme elle avait l’esprit ailleurs, et chercha après les autres ingrédients rangés… quelque part.

Cyprien – Ça va plaire au sous-directeur, ça, encore, sourit-il avec un air las. "Fascisme ou traditionalisme ?" En parlant du Japon... Ils ont des soucis de crise et d'armée, là-bas aussi, c'est la fête partout, en ce moment. Après, il y a un article sur l'exposition coloniale. Si on a le temps, pendant des vacances, ça vaudrait le coup de monter sur paris pour s'y rendre, ça plairait à Lucas.

Céleste hocha la tête plus par automatisme qu’autre chose, cherchant toujours la viande qu’elle avait sortie très tôt ce matin. Bon sang… Elle l’avait mise là, sur la table ! Peut-être. Ou pas ? Ecoutant Cyprien grommeler des paroles incompréhensibles, elle lui lança un regard interrogateur avant d’ouvrir les armoires, le frigo et tout autre endroit assez grand pour contenir la viande. Jusqu’à ce qu’elle la retrouve… dans le four, encore protégée. Booon. D’accord, très bien, Céleste était vraiment déconcentrée. Elle n’était pas dans son état normal depuis le début de la semaine, tout ce qui s’était passé l’avait perturbée même si elle parvenait à mettre tout cela de côté pendant ses cours. Faisant mine de rien, Céleste sortit la viande du four pour la déposer dans une poêle étant donné la faim de son frère. Mieux valait faire au plus vite, il risquait d’être infernal autrement.

Cyprien – Ensuite... Un... Roh, bon sang...

La jeune professeure demanda ce qu’il se passait à Cyprien, tournant la tête vers lui alors qu’il s’était essuyé les mains pour prendre le journal et le lire correctement. Eh bien ? Pourquoi avait-il eu cette réaction ? Il y avait un problème ? C’était au sujet de la guerre ? De la France ? Du Pensionnat ? Céleste continua de s’occuper du déjeuner, patientant, laissant le temps à Cyprien de lire l’article en entier pour en avoir un compte-rendu après. Ce qui ne lui prit guère de temps même si son expression en disait long avant même qu’il ne lise l’article… Il y avait encore eu quelque chose.

Cyprien – Et allez, encore un plaidoyer pour insulter Gaby car elle est incompétente et incapable de diriger l'école. Et ils s'en prennent aussi au sous-directeur cette fois. "Il est vraiment très malheureux que cette école soit dirigée par une femme et un étranger !" Dixit un de nos collègues... Pas difficile de deviner lequel.

Céleste grimaça, devinant sans mal qui avait pu dire ça, elle aussi. Ils allaient perdre un de leur collègue très prochainement, il y aurait un poste à pourvoir au sein du Pensionnat… Ce qui allait encore rajouter du travail à la direction au passage. Parce que quelqu’un n’avait pas pu tenir sa langue. Il était stupide ! Pourquoi attaquer la directrice et le sous-directeur comme cela ? Ils n’avaient rien fait de mal, au contraire, ils aidaient à préserver l’école et les élèves. Sans doute le discours lors de la prérentrée était-il resté en travers de la gorge de certains… Il n’avait pas dû apprécier, lui non plus, surtout parce que Gabriella avait agi et parlé comme elle le pensait depuis des mois à présent.

La professeure de foudre écouta son collègue lui lire l’article, occupée avec les légumes qu’elle nettoyait consciencieusement, ressentant un immense besoin de faire quelque chose avec ses mains. Le mari d’Estelle était odieux. Son discours puait véritablement l’ironie et la moquerie, et il s’attaquait ouvertement à la directrice, alias une très bonne amie de sa femme. Nul doute qu’elle n’allait pas apprécier ce « détail », pas après le discours qu’elle avait tenu face à Céleste à propos de sa relation avec Cyprien. Et son mari faisait la même chose… Tout le monde le savait. Mais personne ne le lui disait. Avec ça, qu’allaient dire les autres en lisant un tel journal et ces pages à propos du Pensionnat, pages rédigées avec la contribution de François Chevreuil sur « la femme parfaite et pas comme Gabriella » ? L’équilibre d’un foyer, le Pensionnat, la directrice… Rien n’était épargné. Ce qui lui donna encore plus l’envie de vomir, au moment même où Cyprien faisait une remarque comme s’il avait lu dans ses pensées.

Cyprien – Accuser la directrice et le sous-directeur de ne pas se soucier de l'avenir des élèves, ça va les faire bondir d'indignation, ajouta-t-il en tournant la page. Ce crétin de Ménard qui a été baver ça ! Et la pauvre Estelle... Il faudrait quand même que quelqu'un finisse par lui dire quelle ordure est son mari, tu ne crois pas ?

Céleste – Il faudrait, oui…, dit-elle après un temps d’hésitation. Les rumeurs vont vite courir avec ce journal, quelqu’un doit lui dire avant qu’elle ne le découvre par elle-même. Mais je ne sais pas qui pourrait le faire. Elle nous en voudra parce qu’on le savait. Ou il faudrait lui apporter une preuve sans lui dire que cela dure depuis des mois… Pour… ne pas trop la blesser, tu comprends ? Surtout avec ses enfants.

Et elle ne voulait pas la blesser, la voir être en colère une nouvelle fois. Il faudrait qu’ils en parlent à quelqu’un… Quelqu’un qui la connaissait bien sans être trop proche d’elle pour supporter la colère s’il le fallait et ne pas être simplement là pour l’écouter. Personne n’avait osé le lui dire, en parler. Il fallait quelqu’un qui ait du tact et qui puisse la relever après, l’épauler. Maintenant, qui ? Avec des preuves, ce serait nettement plus simple, mais cruel.

Cyprien – Des preuves, des preuves, je ne vois pas comment qui que ce soit pourrait en obtenir. Elle l'a quand même épousé alors qu'il avait abandonné en sachant qu'elle était enceinte de Wyatt. Qui pourrait essayer de lui parler ?

Céleste – Justement, je n’ai pas envie qu’elle subisse la même chose une nouvelle fois. Il faudrait quelqu’un qui a du tact et qui sois capable de la relever, puis de supporter sa colère aussi. Déjà, pas nous, on oublie. Pas Gabriella, même si elles sont proches. Et elle a du travail… Mais je ne sais pas, je ne suis là que depuis deux ans. En dehors du temps que j’ai passé avec elle cet été, je ne sais pas grand-chose. Enfin, sur son passé, oui, mais j’ignore quelles sont les personnes qui la connaissent bien.

Sans leur « discussion » dans la salle des professeurs au début de la semaine, Céleste aurait pu lui parler sans problème. Elle pouvait faire preuve de tact lorsqu’elle le voulait et n’avait pas peur de subir la colère de quelqu’un, surtout qu’elle n’était pas aussi proche d’Estelle qu’elle l’était de Cyprien. Sinon, elle n’en savait rien, n’avait aucune idée de qui pouvait lui parler. La jeune professeure grimaça tout en cuisinant dans des gestes mécaniques, cherchant dans ce qu’Estelle avait pu lui dire. Elle tourna la tête vers Cyprien, lui jetant un coup d’œil pour voir si lui avait des idées. Il était plus vieux qu’elle, dans l’école depuis plus longtemps, il était donc sans doute beaucoup mieux placé.

Cyprien – Il y a Adrien... Et ses amis, sur Paris. Sinon, je ne sais pas.

Céleste – Ses amis… ? Ce serait cruel, ils ne sont même pas au Pensionnat. Tu imagines ? « Ton mari te trompe, tout le monde le sait, même ceux qui ne vivent pas à l’école ». Par contre, Adrien…

Lui non plus, elle ne le connaissait pas assez. Bien sûr, Céleste le côtoyait souvent, presque tous les jours à vrai dire, à cause de ses cours, mais sinon… Elle savait tout ce qui s’était passé entre Sarah et lui, devinait l’état dans lequel il était aujourd’hui, savait tout ce que les autres savaient et connaissait les rumeurs. Il était infirmier, agissait en professionnel et devait sans doute faire preuve de tact avec les enfants. Mais avec son couple qui venait d’être brisé… Pourrait-il en parler à Estelle sans que cela ne lui soit douloureux ? Ils devaient peut-être… trouver un plan B ou une autre personne pour l’aider. Céleste mit ses légumes dans une casserole après l’avoir remplie d’eau, se tournant vers Cyprien.

Céleste – Il vient de voir son couple se briser mais je pense que oui, il pourrait lui parler. Il faudrait trouver une autre personne pour l’aider… au cas où. Quelqu’un qui continuerait la discussion si lui en est incapable, quelqu’un qui a déjà été aidé par Estelle. Et qui ne se démonterait pas au dernier moment…
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