Avril 1932. Les soucis mondiaux s'étendent.
 
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 Entraînement entre frères

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Munemori Nakajima
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Munemori Nakajima
MessageSujet: Entraînement entre frères   Entraînement entre frères EmptyMar 27 Oct - 23:58

Pour une fois, la chaleur prédominait sur leurs collines, le temps était idéal, poussait à sortir, prendre le soleil, dans cette courte période de l'année. Munemori s'était caché dans les fourrés près de la rivière avec Kimi, sa toute jeune fiancée, avant de profiter d'un instant bien tranquille en amoureux, même si l'un ni l'autre n'avaient le droit de se voir sans chaperon avant le mariage. Bah, une toute petite entorse à la règle n'allait tuer personne, n'est-ce pas ? Il venait tout juste de fêter ses vingt ans et avait bien envie de profiter un peu de la vie, échapper à l'atmosphère assez morose de la maison. Leur père n'était guère d'humeur apaisée, depuis quelques mois, bien au contraire, il était encore plus dur et sévère, réprimandant sèchement chacun de ses enfants au moindre écart de conduite, personne n'était à la fête. Depuis la fin de la guerre, et la défaite du Japon, l'ancien samouraï devait rester chez lui, ses blessures l'ayant rendu infirme. Leur mère s'occupait de lui avec tendresse mais il avait beaucoup changé. L'amertume, le ressentiment et la colère le rendait... disons, peu facile à vivre. Le plus jeune de la fratrie, Akenori, qui avait à peine quatre ans, leur faisant souvent des petites crises de larmes car il ne reconnaissait plus son propre père.

Munemori avait du mal, lui aussi, autant l'avouer platement. Leur père avait toujours été très sévère et exigeant mais l'air ambiant était difficilement supportable. Il fit une petite moue, allongé contre Kimi dans l'herbe en lui caressant la joue. Leurs deux familles les avait fait se rencontrer il y a peu en espérant un mariage et étaient bien heureuses que les deux jeunes gens se soient plu d'emblée. Elle lui demanda dans un murmure si les choses s'arrangeaient dans la famille et il lui fit une petite grimace. Pas vraiment, on allait dire, en ce moment. Ses jeunes frères et sœurs grandissaient, leur mère s'occupait de leur père, mais l'ambiance était loin d'être bonne. Josuke s'en prenait plein la figure, en ce moment, car leur père le harcelait chaque jour pour qu'il reprenne peu à peu sa place, en tant que chef de famille. Pas de chance, c'était cela d'être l'aîné. Leur père supportait mal de ne plus pouvoir les entraîner et les voir suivre sa trace, lui, Josuke et Kimmitsu. Eisen et Akenori avaient cinq et quatre ans, ils n'auront jamais cette même éducation, pas plus que leurs sœurs. C'était un héritage qui se brisait net, sauf si eux-même prenaient bien soin de l'enseigner aux fils qu'ils auront. Il embrassait longuement Kimi à pleine bouche avec passion lorsqu'il entendit quelqu'un l'appeler. Rah... Kimi sourit d'un air coupable en se redressant, rajustant sa tenue.

– A plus tard, souffla-t-il en lui prenant un dernier baiser.

Il fila hors des fourrés, voyant une de ses sœurs lui faire signe de rentrer. Ouiii, c'est bon, il arrivait ! Rentrant, il sourit d'un air innocent à son grand frère, près du puits, venant l'aider à tirer des seaux d'eau. Il vivait les émois des premiers amours et son travail au quotidien s'en ressentait beaucoup, il devait bien l'avouer. Désolé. Son frère lui renvoya un regard assez noir mais ne dit rien, sans doute blasé. Munemori transporta les seaux avec lui jusque dans la cuisine, où leurs deux plus jeunes frères criaient en se poursuivant autour de la table. Echiko, du haut de ses neuf ans, lisait aussi dans un coin de la cuisine, un de ses livres de cours, hérité d'une de ses sœurs. Il lui frotta les cheveux au passage, amusé par son air très concentré. La voix grave de leur père, surgissant de la salle à manger, leur rappela tout à coup assez sèchement qu'ils feraient mieux de moins traîner dans leurs tâches quotidiennes. Le sourire de Munemori fondit comme neige au soleil et il fit une petite grimace, se retenant de lever les yeux au ciel. Il était censé aller s'entraîner avec ses deux frères, maintenant, mais n'était pas particulièrement motivé, encore envahi par le souvenir des beaux yeux de sa fiancée. Boon, où s'était encore planqué Kimmitsu ? Lui aussi était bizarre, depuis quelques mois, il passait plus de temps isolé et il avait souvent un regard étrange, perdu dans le vide, comme s'il réfléchissait à un projet important. Munemori failli bien demander à son frère s'ils pouvaient juste faire semblant de s'entraîner mais se ravisa en voyant son air tendu. Pas une bonne idée.

– Kimmitsu, tu viens ? demanda-t-il en faisant coulisser la porte de la bibliothèque. Qu'est-ce que tu fabriques ?

Il était entouré de quelques livres, appuyé contre un mur en mordillant son crayon, le regard absent, dans le vague. Franchement, il l'inquiétait, ça faisait déjà des mois qu'il était comme ça ! Munemori lui fit signe de venir, se tournant ensuite vers Josuke avec un petit soupir.

– On ne peut pas simplement faire semblant, cette fois ? demanda-t-il.

Non, il n'était pas motivé, oui, il savait qu'il devait se forcer tout de même, non, il n'avait aucun remords. Dis oui, grand frère, juste une fois, une toute petite fois de rien du tout, la seule et unique fois, il n'en demandait pas plus. Leur père ne semblait pas, cette fois, venir leur surveiller et leur crier autant des conseils que des ordres, il était resté dans le salon à surveiller les plus jeunes de la fratrie. Kimmitsu s'était levé, rangeant assez vite les livres qu'il consultait, alors que Munemori revenait vers son frère, juste au moment où il l'attaque tout à coup d'un coup de pied, le prenant par surprise et l'envoyant au sol. Il retomba un peu lourdement au sol en lâchant une petite expiration. D'accord, donc on ne peut pas, message reçu. Kimmitsu secoua légèrement la tête en lui souriant, sortant de la pièce. Il avait eu dix-neuf ans la semaine passée, jour marqué par une sévère engueulade entre lui et leur père, en privé, dont tout le monde ignorait le sujet. Ils avaient simplement vu leur frère sortir en claquant la porte avec brutalité et leur père lui hurler juste après qu'il était un fils indigne.

– T'aurais pu être plus doux, Josuke, grinça-t-il en le suivant dehors avec leur petit frère. J'essaye de détendre l'atmosphère.

Avec plus ou moins de brio, soit, mais tout de même. Il enfila sa tenue avec un petit grommellement, songeant que ce serait très appréciable si tout le monde dans cette maison se détendait un peu. La vie était belle, pourtant ! Il faisait un temps magnifique, le pays était en paix, il n'y avait plus de conflits, ils commençaient à tisser leurs vies d'adultes, leurs frères et sœurs grandissaient très vite, son mariage et celui de Josuke se profilaient à l'horizon, tout allait bien.

– Et moi j'essaie de reprendre petit à petit le rôle de chef de famille.

Il avait parlé d'un ton sec et amer, imitant leur père lorsqu'il leur faisait la morale. D'accord, ce n'était pas encore aujourd'hui qu'il allait retrouver le sourire. Entre lui et Kimmitsu qui faisait aussi la tête, c'était joyeux. Retenant un soupir, il s'étira tout d'abord avec eux, lentement, avec un très grand soin, cherchant quoi dire pour les détendre un petit peu. Leur petit frère était souvent absent, il s'entraînait dur avec son maître au village pour devenir lui-même professeur d'arts martiaux. Ces moments à trois devenaient assez rares. Cependant, étant donné le silence assez pesant, il pourrait  regretter qu'ils soient juste entre eux.

– Bon, soupira-t-il, Josuke fait la tête car il doit reprendre la place de Père, ça, d'accord. Mais toi, pourquoi tu fais aussi la tronche ?

– Laisse le fils indigne tranquille.

D'accord... Munemori le regarda un instant puis secoua la tête avec un gros soupir. Il aimerait bien savoir comment père avait pu en arriver à hurler ça dans toute la maison... Qu'avait bien lui dire Kimmitsu ? Il s'était isolé pour lui parler, alors que tout le monde était de bonne humeur et en fête, puis les premiers cris avaient fusé. Il avait entendu leur père crier qu'il était hors de question qu'un de ses fils fasse ils ne savaient quoi, que ce n'était pas la voie qu'il avait tracé pour lui et qu'il devait veiller sur ses frères et sœurs. Après d'autres cris, Kimmitsu avait enfin répondu à son tour en criant que leur Père ne "comprenait rien". Munemori avait bien failli s'étouffer, en entendant ça, choqué que leur frère ose répondre à Père, surtout de cette façon. Il n'avait pas à lui tenir tête ou lui répondre, surtout à son âge ! Puis le "fils indigne" avait fusé. Depuis, Daisuke Nakajima n'adressait même plus la parole à son troisième enfant, et ça durait depuis une bonne semaine. Il se mit en place pour les duels d'entraînements, soupirant en jetant un regard à son petit frère.

– Quand vas-tu te réconcilier avec Père ?

– Je ne sais pas, soupira-t-il. Sans doute jamais.

Jamais... jamais... Mais il ne pouvait pas ! Munemori lâcha un gros soupir, se redressant pour revenir à sa hauteur, n'ayant pas imaginé que c'était si grave ou que cette histoire allait si loin.

– Eh, oh, tu ne peux pas dire ça ! s'exclama-t-il d'un ton un peu paniqué en se plantant devant lui, l'arrêtant tout net. C'est ton père, je te rappelle. Tu devrais aller le voir pour t'excuser.

– M'excuser ? soupira-t-il. J'aurai dû y penser, c'est évident. Laisse tomber, vous n'avez pas besoin de vous soucier de ça.

Il le contourna, avec de nouveau ce regard lointain, comme s'il regardait un autre monde où personne n'avait accès. Munemori se sentait incroyablement largué, il ne comprenait plus Kimmitsu et ne comprenait même plus Josuke, accaparé par des soucis qu'eux-mêmes n'auraient jamais. Seule Kimi lui apportait un peu de stabilité ! Bon, pour son frère aîné, il pouvait encore saisir. Il devait reprendre peu à peu la place de père, ça n'avait rien de facile ni d'aisé, cela lui faisait peser une très grande pression sur les épaules et il lui faudra du temps avant de biens 'en sortir. Il était normal qu'ils oit beaucoup plus tendu et sur les nerfs, c'était compréhensible. Quant à Kimmitsu... Non, son frère ne voyait pas d'où venait le malaise, pourquoi il avait changé, somme toute.

– Tu pourrais au moins nous dire pourquoi vous vous êtes criés dessus ? Il ne s'était jamais emporté comme ça sur un de ses enfants, jamais. Qu'as-tu fait pour qu'il se soit emporté à ce point ?
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Kimmitsu Nakajima
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Kimmitsu Nakajima
MessageSujet: Re: Entraînement entre frères   Entraînement entre frères EmptyMer 28 Oct - 23:45

La bibliothèque était l’une des rares pièces de la maison à être à peu près calme. Pas de jeunes frères et sœurs à courir dans ses jambes, à rire ou se chamailler, pas de bruit, et surtout, loin des regards lourds de son père. Même s’il ne lui adressait même plus la parole, cela ne l’empêchait pas de lui jeter de longs regards furieux ou dégoûtés, comme si son fils était devenu une saleté sur sa chaussure. Kimmitsu n’avait fait qu’exprimer un besoin de voyager, pourtant. Découvrir une autre culture, rencontrer d’autres personnes, se former à d’autres pratiques qu’il ne pouvait pas apprendre en restant ici, et surtout, trouver des maîtres expérimentés pour son don, car bien peu de personnes au Japon avaient un élément et très peu le maîtrisaient. Il lui avait juste avoué qu’il voulait voir autre chose et s’entraîner, qu’il se sentait à l’étroit, en ce moment, à la maison, coincé dans un seul style de vie dont il avait envie de sortir, qu’il voulait découvrir la France et grandir. Son père avait compris qu’il pensait renier sa famille et toute sa vie ici, qu’il se croyait trop bien pour rester à la maison. Et lorsque Kimmitsu avait ajouté qu’il refusait catégoriquement d’épouser la « jeune fille très convenable » que son père avait choisie pour lui, il avait éclaté en cris.

Imari était sûrement une fille formidable, il ne disait pas le contraire ! Elle avait dix-huit ans et était l’aînée d’une famille amie de la leur,  qui vivait au village depuis plusieurs générations. Elle était douce, travailleuse, très discrète, plutôt souriante, mais désolé, il n’était pas amoureux d’elle. Il savait très bien que les parents devaient choisir le meilleur des partenaires pour leurs enfants, que la majorité des couples apprenaient à s’aimer et se respecter avec le temps seulement, qu’on ne se mariait pas par amour mais par commodité, respect mutuel et arrangements entre familles. Mais Kimmitsu ne pouvait pas, il refusait de passer toute sa vie avec Imari, il en serait pas capable de la rendre heureuse. Ce refus, ajouté à son envie de quitter le Japon, avait déclenché le violent courroux de son père. Soupirant, le jeune homme reposa son livre sur ses genoux, la tête appuyée contre la bibliothèque derrière lui. La porte de la pièce coulissa tout à coup dans un petit grincement, laissant ses deux grands frères apparaître derrière. Il allait leur demander ce qu’ils voulaient lorsqu’il se souvint que c’était l’heure de leur entraînement. Il referma le livre, le regard assez sombre. Lorsqu’il s’entraînait avec son maître au village, il pouvait se vider la tête. Ici, c’était impossible.

– Kimmitsu, tu viens ? Qu'est-ce que tu fabriques ?

Rien, rien, il arrivait. Reposant son livre, il les rangea assez vite, se relevant, remettant les bouquins à leur place. Son aîné aussi était très tendu, en ce moment, ça aoutait à la bonne humeur générale de la maison. Josuke et Munemori allaient se marier, eux aussi. Tous les deux avaient accepté sans même dire un mot les femmes qu’on leur avait fait rencontrer. Pas un mot, juste un sourire face à leurs nouvelles fiancées et une promesse de mariage, ce que Père n’avait pas manqué de rappeler à son troisième fils. « Tes frères se sont rangés aux décisions de notre famille et de celles de leurs futures femmes, c’est ce qu’il convient de faire ! C’est aux parents d’arranger le mariage de leurs enfants afin de s’assurer qu’il soit fructueux et enrichissant pour les deux familles. Comment oses-tu nous couvrir de honte en refusant d’épouser Imari ?! » Et si Kimmitsu n’avait tout simplement pas envie de se marier aussi jeune ? Cela contribuait à la classer comme fils indigne ? Parce qu’il n’était pas du genre à plier la tête face à des règles stupides ou sans valeur ? Il respectait les traditions, mais ne pouvait pas se plier à des règles qui pourraient briser son existence ou son besoin de liberté. La liberté, c’était cela qui lui importait.

– On ne peut pas simplement faire semblant, cette fois ? demanda-t-il.

Faire semblant de s’entraîner ? Mauvaise idée, leur père s’en rendrait compte… Leur aîné sembla d’ailleurs du même avis car il frappa tout à coup son frère du pied par surprise, l’envoyant à terre sans lui laisser une seule chance. Le jeune homme eut un faible sourire, filant au-dehors avec ses affaires. Il se changea rapidement en chemin, avant d’arriver derrière la maison, dans un coin aménagé exprès pour leurs entraînements. Pour une fois, Père ne venait pas les observer… Il avait l’habitude de s’asseoir dans un coin pour leur crier dessus, après des années passées à les former lui-même. Kimmitsu comprenait très bien ce que son père avait subi pendant la guerre, les conséquences aujourd’hui, mais cela ne l’autorisait malgré tout pas à vouloir décider de la vie et la conduite de chacun des membres de sa famille, à vouloir les empêcher de partir et de vivre leur vie, à leur imposer leurs épouses. Tant mieux si ses deux grands frères avaient laissé couler sans rien dire sur le sujet, lui ne pouvait pas. Cette vie lui pesait, voilà tout, il avait besoin d’un ailleurs. Une vie où il pourra faire ses propres choix en son âme et conscience, une vie où il assumera toutes ses actions et décidera de lui-même, une vie où il décidera seul de la façon dont il voulait mener son existence.

– T'aurais pu être plus doux, Josuke, grinça-t-il en le suivant dehors avec leur petit frère. J'essaye de détendre l'atmosphère.

– Et moi j'essaie de reprendre petit à petit le rôle de chef de famille.

Kimmitsu ignorait s’il pourra trouver ce qu’il cherchait en France, à vrai dire, mais il avait bon espoir. C’était un pays dont il se sentait proche, indiscipliné mais fort, qui ne laissait pas écraser sans rien faire, qui savait bouleverser les règles. Respirant profondément, il s’étira avec ses frères, sachant par avance qu’eux non plus ne comprendraient pas ses envies. Il resta parfaitement silencieux en s’étirant, réfléchissant à un moyen de faire comprendre à Père que renier sa famille et ses origines n’était pas son but. Simplement… Son caractère ne correspondait pas à ce qu’on attendait de lui ici. Il pouvait vivre plus loin et se construire une identité sans forcément oublier sa famille du même coup ! Mais non, son père ne pouvait pas comprendre ça et Kimmitsu n’avait pu, cette fois, rester calme, stoïque et accepter sans rien dire. Ce n’était pas non plus dans son caractère que d’accepter que d’autres dictent sa vie à sa place.

– Bon, soupira-t-il, Josuke fait la tête car il doit reprendre la place de Père, ça, d'accord. Mais toi, pourquoi tu fais aussi la tronche ?

– Laisse le fils indigne tranquille.

Il sentit le regard de son frère posé sur lui un moment, avant qu’il ne pousse un long soupir. Navré, ce petit détail lui était resté en travers de la gorge, car il l’estimait complètement injustifié. Si son père le voyait ainsi, désormais, les choses n’allaient pas s’arranger. Il comptait partir, de toute façon, dès la fin de son apprentissage au village. Autrement dit, l’année prochaine, à ses vingt ans. Peut-être un peu plus tard selon le temps qu’il lui fallait pour s’organiser. Il écrira aussi une lettre à Imari pour lui expliquer pourquoi il ne pouvait pas l’épouser. Son père le harcelait pour qu’il aille présenter ses excuses à la famille de la jeune famille et faire en sorte de renouer des liens avant de se marier. Ce qui était totalement hors de question.  Une fois échauffé, il se mit en place, tournant ses poignets et coudes pour s’étirer comme il faut.

– Quand vas-tu te réconcilier avec Père ?

Quand… Quand il aura accepté de faire ce qu’on lui disait bien sagement, de rester à la maison comme ses frères, de se marier avec Imari, qu’il aura présenté ses plus plates excuses à tout le monde ? Jamais, autrement dit. Être en froid avec son père lui faisait mal, mais il lui en demandait trop, il ne pouvait pas se plier, pas cette fois. Toute sa vie, il avait suivi les règles strictes de son géniteur, toute sa vie il avait dû se plier à tout ce qu’on décidait pour lui, à sa place, toute sa vie il avait dû se taire et ne jamais avoir ses propres opinions, pour ne pas défier l’autorité paternelle. C’était terminé.

– Je ne sais pas, soupira-t-il. Sans doute jamais.

– Eh, oh, tu ne peux pas dire ça ! s'exclama-t-il d'un ton un peu paniqué en se plantant devant lui, l'arrêtant tout net. C'est ton père, je te rappelle. Tu devrais aller le voir pour t'excuser.

– M'excuser ? soupira-t-il. J'aurai dû y penser, c'est évident. Laisse tomber, vous n'avez pas besoin de vous soucier de ça.

Une meilleure vie l’attendait-elle en France ? Là-bas, il sera coupé des siens, le contact ne subsistera plus que lettres et téléphone. Sans oublier que Père sera sûrement furieux qu’il pourra interdire à quiconque du pays de chercher à le joindre. Il pourrait ne pas s’intégrer, être rejeté, ne pas trouver sa voie. Pourtant, le désir de partir le brûlait de l’intérieur. Contournant son frère, il se mit en place, concentré, son regard dérivant non plus sur le décor qui l’entourait mais sur cette existence qu’il voulait obtenir. Suivre les règles établies par son éducation, bien sûr, mais en ayant la liberté d’agir qu’il désirait. La liberté… Il croisa le regard de ses frères, voyant que Munemori ne comptait visiblement pas en rester là et abandonner le sujet.

– Tu pourrais au moins nous dire pourquoi vous vous êtes criés dessus ? Il ne s'était jamais emporté comme ça sur un de ses enfants, jamais. Qu'as-tu fait pour qu'il se soit emporté à ce point ?

– Refusé d’épouser Imari, entre autres, soupira-t-il.

Munemori lui jeta un regard si choqué que Kimmitsu regretta presque instantanément de le lui avoir dit. Oui, il s’était fiancé à Kimi dès le jour où lui avait présenté en leur annonçant qu’ils étaient biens l’un pour l’autre. Oui, Josuke attendait lui aussi son mariage avec Emiko alors qu’il ne l’avait vu que deux fois en la présence de leurs parents respectifs, mais non, non, jamais il ne pourra faire comme eux.

– Tu as refusé d’épouser Imari ?! Kimmitsu, après tout ce que Père a fait pour nous ! Il s’agit d’un pur caprice d’enfant gâté !

– Un caprice de « fils indigne », tu veux dire ? grinça-t-il en rougissant de colère. Je sais très bien que c’est la tradition, les règles, mais je ne cautionne pas cette règle, ni d’épouser une femme que je n’aime pas.

Son frère avait eu un brusque geste de colère, s’emportant aussitôt, semblant aussi furieux que leur père le jour où Kimmitsu lui avait dit, de un, qu’il comptait partir en France, de deux, qu’il refusait d’épouser Imari, de trois, qu’il voulait être libre de ses décisions et assumer les erreurs qu’il fera sans se dérober, qu’il ne voulait pas qu’on lui dicte sa façon de vivre à jamais.

– Kimmitsu, c’est aux familles d’organiser l’union de leurs enfants et de faire se rencontrer les couples ! Il faut juste apprendre à se connaître, regarde-nous, on prend le temps avec nos fiancées, on apprend à les connaître et les aimer. Imari est une jeune femme très convenable et sérieuse, tu vas déshonorer notre famille si tu persistes ainsi. Et tu n’as non plus à désobéir ainsi à Père. Il faut que tu ailles présenter tes excuses dès maintenant. C’est tout ce qui vous oppose, ce mariage ?

Kimmitsu ne répondit pas tout de suite, sans plus regarder ses frères, les yeux dans le vague. Non, ce n’était pas tout, loin de là. Il ne correspondait tout simplement pas à ce que leur père voulait, tel était le fond du problème. Il resta silencieux deux bonnes minutes, les bras croisés, secouant légèrement la tête. Si seulement c’était tout. Enfin, il n’allait pas déshonorer sa famille bien longtemps encore. Dans un an, un an et demi, il sera parti.

– Dans un an, deux au maximum, je compte quitter le Japon et partir en France, dit-il enfin en se retournant vers eux. Pour y vivre et y travailler. Père ne l’accepte pas non plus.

Défier l’autorité paternelle ainsi n’était pas dans ses habitudes, il n’y aurait jamais songé auparavant, n’aurait jamais osé penser faire cela, mais… Il avait changé en grandissant. Changé en imaginant sa vie future, ce qu’il pouvait et devait faire. Josuke s’approcha tout à coup, doucement, lèvres serrées puis leva la main pour lui coller une gifle magistrale. Kimmitsu grimaça sous le choc, posant une main sur sa joue en croisant le regard noir de fureur de son frère, surpris alors par la ressemblance avec leur père, quand il était furieux.

– Tu as complètement perdu la tête ! Tu refuses le mariage, tu déshonores notre famille et tu pars ?!

Il n’avait pas l’intention de déshonorer leur famille, ça n’avait rien à voir ! Continuer à suivre ce genre de règles était juste impossible, voilà tout. Ce n’était pas qu’un simple caprice, il y avait réfléchi très longtemps, il y réfléchissait depuis des mois maintenant, se demandant ce qu’il pourra supporter et accomplir, réfléchissant à la situation, ce qu’en dira sa famille, les conséquences qui en découleront. Il savait qu’il faudra sûrement longtemps avant que sa famille n’accepte de le revoir un jour s’il partait. Mais rester signifierait être contraint à un mariage arrangé, à force de pression, une vie où il ne se sentait plus à sa place, même s’il aimait sa famille, il ne pouvait plus continuer comme ça.

– Pourquoi maintenant ? Pourquoi ? Que t’avons-nous fait pour que tu décides de partir ? Tu n’es pas heureux ici ?

– Personne ne m’a rien fait pour ça, je veux partir car…

Il s’interrompit tout net, la bouche entrouverte, revoyant la façon dont son père avait réagi. Ses frères n’allaient pas mieux le prendre, c’était certain, il suffisait de voir ce qu’ils avaient déjà dit jusqu’ici. Dire qu’il ne parvenait pas à être heureux passera pour de l’ingratitude, tout simplement, ou quelque chose de ce genre. D’autant plus que personne d’autre, dans la famille, ne réagissait comme lui.

– Ce ne sera que dans un an ou deux, de toute façon, reprit-il. Mais je reviendrai au Japon, dans l’année.

Munemori fit une drôle de tête, comme s’il hésitait entre hurler ou s’étouffer. Il serrait les poings avec un air outré et indigné, sans que son frère ne s’en émeuve assez pour revenir sur ses choix. Josuke lui avait jeté un long regard, s’écartant d’un pas.  Kimmitsu était navré pour Imari, qui avait dû vivre ce refus comme une offense brûlante, mais à quoi épouser une femme qu’on ne pourra pas rendre heureuse ?

– Comment peux-tu ainsi défier l’autorité de ton propre père ? souffla son frère un ton plus bas. Toute l’éducation qu’il t’a donnée ?! Je ne pensais pas devoir dire ça un jour mais tu nous fais honte.

– Je respecte son autorité tant qu’il ne cherche pas à choisir à ma place la façon dont je dois mener ma vie. Si ça doit faire de moi un fils indigne et bien soit. J’irai demander pardon à Imari mais je ne l’épouserai pas, même si père doit me détester pour cela.

Cacher à quel point cela le blessait fut ardu mais il avait dû y parvenir, du moins il l’espérait. Décevoir les siens, se faire détester de son propre père, il regrettait profondément tout cela et e était blessé, mais son besoin de liberté et de progression était assez fort pour qu’il se fasse violence et continue sur la voie qu’il voulait tracer, ce besoin était assez puissant pour l’encourager à cesser enfin de courber la tête comme il le faisait depuis toujours devant son père. Son cœur battait à toute vitesse, bien qu’il se tienne droit et tâche de ne rien laisser paraître.

– Tu es trop jeune pour prendre une telle décision, dit Josuke d’un ton cassant. Depuis combien de temps penses-tu à cela ? Cinq jours ? Six ? Deux semaines, tout au plus ? Comment feras-tu pour vivre, là-bas ? Où iras-tu ? Pourquoi partir si loin ?

Sa voix avait monté sur la dernière question, alors qu’il ouvrait les bras pour appuyer ses propos, mais son frère se voyait mal tout lui exposer platement, il ne pouvait pas comprendre. Son esprit était forgé comme celui de leur père, il était l’aîné et avait toujours assumé ce rôle sans se poser la moindre question, il savait où était sa place et s’y tenait. Kimmitsu recherchait encore la sienne et il venait de comprendre qu’elle n’était pas ici. Il lui rendit un regard plus sombre, les mains moites, le moral en miettes, conscient qu’il faudra beaucoup de temps, peut-être même des années, avant de renouer des liens avec sa famille. S’il y parvenait un jour.

– J’y réfléchis depuis presque un an. Une fois là-bas, je compte travailler, bien sûr, dans des écoles ou des centres de formations.  Je pars si loin car c’est un pays dont je parle la langue couramment et où je pourrai faire ma vie. Je suis peut-être trop jeune, oui, mais c’est justement pour ça que je veux partir, pour grandir et évoluer. En restant ici… Tu peux penser que ce n’est qu’un simple caprice, peu importe.

Josuke soupira, alors que Kimmitsu s’éloignait de deux ou trois pas de ses frères, regardant vers le village, qui se dessinait en contrebas. Leur maison était blottie dans une des collines, à une faible hauteur comparée à d’autres exploitations, mais le village, lui, était dans la vallée, établi près de la rivière Tao. Il repéra le dojo où son maître l’entraînait, tous les jours, ainsi que quelques autres élèves. Il devrait peut-être s’y rendre maintenant, s’entraîner avec ses frères après une discussion de ce genre ne les mènera à rien, ils ne seront pas concentrés, ni efficaces. De toute manière, Kimmitsu doutait que sa présence soit souhaitable pour ses frères, maintenant qu’ils ne savaient un peu plus. Le jeune homme n’avait aucune idée de ce qui l’attendait en France, c’est vrai, il voulait y partir tout de même, rester ici, dans cette ambiance, était bien trop pesant. Il était désolé pour ses frères mais il n’était pas comme eux.

– Je ne pensais pas t’avoir si mal élevé, lança tout à coup à coup une voix très grave et forte. Tu n’écoutes plus tes propres frères non plus ?

Kimmitsu grimaça fortement avant de se retourner, voyant leur père venir vers eux, lourdement appuyé sur une canne, sa jambe très raide et infirme l’obligeant à des mouvements plus saccadés. Il avait tout entendu de leur discussion ? Le jeune homme retint un long soupir, debout près de ses frères, alors que leur père s’arrêtait à leur hauteur. Il avait encore une carrure solide, ayant passé sa vie entière à combattre, et sa blessure ne le diminuait en rien. Il avait beau être blême, son regard brillait encore de fureur.

– Tu es encore plus indigne d’être mon fils que ce que je ne pensais. Je croyais qu’ils te feraient entendre raison, que tu me comprendrais mais tu le refuses. Nous ne sommes pas assez bien pour toi, c’est ça ?

– Cela n’a rien à voir, répondit Kimmitsu d’un ton calme, même s’il était plus tendu qu’un arc. Je ne cherche à renier personne.

– Et pourtant, tu me désobéis, tu rejettes toutes les règles ! rugit-il. Sache, mon garçon, que moi non plus je n’ai pas eu voix au chapitre pour mon mariage et pourtant, ça ne m’a guère empêché de respecter et aimer ta mère, de lui donner de nombreux enfants. Tes grands frères se sont aussi conformés à la tradition et n’en sont pas morts. Il n’y a que toi, dans cette famille, qui semble trouver insupportable la vie que nous menons. Qu’est-ce qui a pu bien se passer dans ta tête pour en arriver là ?! Tu peux encore arranger les choses, mais mets-y de la volonté. La famille d’Imari est disposée à pardonner si tu vas te présenter en demandant pardon.

La gorge de Kimmitsu se fit plus serrée, sa respiration plus courte. Il faillit bien vaciller, se plier encore face à son père, il faillit le faire, se rétractant au dernier moment en songeant aux mois qui allaient suivre, aux années qui allaient se succéder, à la vie qu’il devra mener ici, au bras d’une femme pour qui il n’éprouvait rien, dans une famille où devra suivre toutes les règles sans rien dire, une vie dont il ne trouvait plus la saveur, une vie prévisible, si lisse, dont il savait ce qui arrivera jusqu’à sa mort. A côté de cela, il y avait la peur de l’inconnu, certes, la peur d’être séparé de sa famille durant des années, la peur de perdre tous ses repères, mais aussi le besoin violent de liberté, l’envie de faire ses preuves et d’évoluer. Ce besoin était tout aussi puissant que la peur qui l’accompagnait, le tout dominé par une forte envie de vivre.

– Je suis désolé, dit-il en retenant un soupir. Je ne l’épouserai pas.

S’il vit le coup arriver, il ne réussit pas à l’éviter, son père le frappant tout à coup avec sa canne en pleine mâchoire. Sa vue se brouilla un instant alors qu’il tombait au sol, surpris par le coup, ne s’attendant pas à ce que son père le frappe. Il porta une main à son visage en grimaçant, sentant un petit peu de sang couler de sa lèvre fendue. Il avait dû se mordre quand son père l’avait frappé. Le point d’impact était très sensible au toucher, douloureux.

– Tu as fait ton choix. Mais sache qu’il me brise le cœur.

Il s’en alla ensuite, raide et furieux, alors que son fils baissait la tête, la main contre son visage, en luttant de toute ses forces contre ses larmes. Il avait fait son choix, oui, c’était de sa faute si son père le détestait, à présent. Peut-être devrait-il partir dès maintenant, pour ne plus leur imposer sa présence ? Ou au moins travailler et vivre au village le temps d’achever son apprentissage. Son père pourrait au moins l’oublier plus vite. Il fit un effort pour se calmer et apaiser le rythme bien trop rapide son cœur, tâchant de se concentrer sur l’avenir. L’enfance était loin derrière lui, ce n’était pas la peine de pleurer, il savait ce qu’il avait à faire et en avait la volonté. Ce départ se fera, à dix-neuf ou vingt ans, mais il se fera. Revenir en arrière était impossible et cela demanderait un courage qu’il ne possédait pas. Josuke partit à son tour, suivant leur père. Munemori soupira longuement pendant qu’il se relevait, se frottant la joue. Avant que son frère ne puisse rajouter quelque chose, il le contourna puis s’en alla, le cœur lourd.

Le soir venu, après avoir écrit à Imari pour lui expliquer et lui demander pardon, il esquiva tous ses frères et sœurs ainsi que ses parents pour sortir sous l’auvent, marchant pieds nus sur le bois en refermant la porte derrière lui. Il marcha autour de la maison sur le perron abrité avant d’aller s’asseoir à l’endroit habituel. Sa famille était en train de dîner, mais il n’avait pas faim, pas du tout. Le regard tourné vers les collines et les lumières des maisons voisines, il se laissa aller contre un des piliers, regardant le soleil se coucher puis la nuit s’installer, s’efforçant de se concentrer sur l’avenir et pas sur les soucis familiaux. Il fallait laisser du temps au temps, permettre à chacun de prendre du recul. Il devrait être en train de s’endormir avec ses deux grands frères, dans la chambre qu’ils partageaient, sans tout cela… Se frottant le front d’une main, il entendit d’un coup une porte s’ouvrir puis des bruits de pas. Fermant les yeux, il retint un soupir avant de regarder qui s’avançait, voyant alors son frère aîné. Si c’était pour crier à nouveau… Kimmitsu n’en avait très sincèrement pas le courage, son frère pouvait hurler mais il n’avait pas l’intention de répondre, la journée avait été suffisamment éprouvante comme ça.

– Qu’est-ce que tu veux ? murmura-t-il.

– Te parler et t’apporter ceci, répondit-il en lui donnant une assiette. Mange, ce n’est pas en faisant grève de la faim que tu arriveras à réaliser tes projets.

Kimmitsu prit l’assiette avec lenteur, serrant les baguettes qui y étaient posées sans rien avaler pour autant. Il était toujours en train de se demander s’il ne valait pas mieux qu’il aille vivre au village dès demain. Il pourrait travailler au dojo, son maître le lui avait proposé, mais il avait alors trop de travail chez lui. Fixant le contenu de son assiette, il serra les baguettes entre ses doigts, lèvres pincées.

– Si tu es venu me dire que je vous déçois tous, j’ai compris maintenant, marmonna-t-il. C’était assez clair toute à l’heure.

Sous-entendu, une nouvelle dispute ne servirait à rien du tout, personne ne changera d’avis, ni lui ni eux. Mais Kimmitsu comptait bien prendre ses responsabilités. Il ne craignait pas l’effort et s’il ne trouvait pas sa place ici, il la trouvera ailleurs, fut-ce dans un pays très différent du sien, à l’autre bout du monde. Il lui restait encore un an pour se préparer, s’organiser, avant de franchir le pas.

– Non, ce n’est pas mon intention, répliqua-t-il en s’asseyant en tailleur face à lui. Je viens seulement en tant que grand frère. Je n’accepte pas ta décision mais je ne veux pas que tu te sentes seul et perdu à cause de ça, je ne veux pas perdre mon frère pour ses choix de vie. Je veux seulement que tu respectes tes principes, quand tu seras là-bas.

Kimmitsu sourcilla légèrement, la bouche entrouverte. Il ne s’était pas attendu à cela, bien au contraire. Reposant l’assiette, incapable d’avaler quoi que ce soit pour le moment, il lui jeta un regard en biais avant de le reporter sur les étoiles qui naissaient ci et là. Il trouvait un peu incroyable que son frère en arrive à lui dire cela si vite, après l’avoir giflé cette après-midi et hurlé qu’il n’agissait que par pur caprice.

– Je ne compte rien renier, soupira-t-il d’une voix lasse, sans plus le regarder. Ni mes origines, ni rien. S’il le faut, j’irai vivre au village pour ne plus indisposer père. La famille sera moins déshonorée ainsi.

– Il vaut mieux que tu restes ici. Père finira peut-être par entendre ce que tu veux faire même s’il ne le comprend pas, comme moi. Tu es son fils et te voir quitter la maison pour aller vivre dans un autre village avant de quitter le pays serait trop difficile pour lui. Pour nous tous.

Alors ça, rien n’était moins sûr, étant donné ce qu’il pensait actuellement… Kimmitsu se retint d’hausser les épaules, très peu convaincu, mais ne souleva pas cette remarque. Il ne croyait pas aux miracles, leur père ne lui adressera plus du tout la parole, maintenant, il n’était pas certain qu’il se préoccupe même que Kimmitsu vive toujours ici ou non. Il retourna enfin la tête pour regarder son frère, hésitant, se lançant finalement après quelques minutes.

– Comment as-tu fait pour accepter d’épouser Emiko ? Je n’ai rien contre elle, attention, mais se marier lorsqu’on a vu la personne juste deux fois... Cette vie…

Ce n’était tout simplement pas possible, voilà tout. Ses frères le faisaient, pourtant, ils en avaient l’air heureux, ce que le jeune homme comprenait encore moins. Parfois, il avait l’impression de ne même pas être du même sang qu’eux, de ne pas appartenir à la même famille, ce qui était aussi perturbant qu’angoissant.

– Je l’ai accepté, c’est tout. Il y a des choses qui sont comme ça et que l’on ne change pas comme on le veut, surtout en tant que fils aîné. Je vais apprendre à la connaître, comme de nombreuses personnes l’ont fait avant moi.

C’est vrai qu’il était sans doute plus coincé d’entre eux tous, dans cette histoire… Coincé par le fait qu’il était né le premier et était un homme. Kimmitsu replia les jambes contre lui, lâchant une petite expiration avec un murmure inaudible. Il ne savait même pas s’il se mariera un jour, en vérité. Il n’avait même pas vingt ans, comment savoir où il sera dans cinq, dix, vingt ans ? Avec qui il vivra, où, et à faire quoi ? Sera-t-il toujours en France ou au Japon ? Il ne parvenait pas à s’imaginer à trente ou quarante ans. Tout pouvait évoluer, dans n’importe quelle direction.

– Il y a beaucoup de choses qu’on peut changer, malgré tout, avec de la volonté, reprit-il un ton plus bas en regardant les étoiles. Vous pouvez me taxer d’être encore trop jeune, idéaliste ou naïf, il n’en reste pas moins que parfois, on ne peut pas vivre avec des règles étouffantes ou qui vous privent de votre liberté. C’est surtout ça qui me pousse à partir, je ne trouve pas ma place ici. Et je ne vois pas l’intérêt d’épouser une femme que je ne pourrai pas rendre heureuse, peu importe si d’autres l’ont fait avant.

Il s’interrompit en réalisant que son ton devenait de plus en plus amer, préférant se taire avant de trop en dire. Ses frères acceptaient tout cela, très bien, il était heureux pour eux et leur souhaitait tout le bonheur possible. Chacun sa voie, chacun sa route, il trouvera la sienne.

– Est-ce que tu me détestes ? demanda-t-il ensuite. Père, oui, maintenant, mais je voudrais bien savoir si c’est aussi ton cas.
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Josuke Nakajima
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Josuke Nakajima
MessageSujet: Re: Entraînement entre frères   Entraînement entre frères EmptyJeu 12 Nov - 22:13

Kimmitsu – Je suis désolé, dit-il en retenant un soupir. Je ne l’épouserai pas.

Sans crier gare, leur père frappa Kimmitsu d’un coup de canne au menton alors que Josuke avait brièvement fermé les yeux, imaginant la douleur qu’il devait ressentir. Il était par terre, lèvre un peu fendue sous le coup du choc, sans que personne ne dise quoi que ce soit. D’un côté, la réaction de leur père était compréhensible : son fils venait de refuser, devant lui, d’épouser la femme à laquelle il l’avait promis... C’était une honte, un déshonneur complet qu’aucune famille ne voulait connaître, surtout avec une famille amie que rien n’oppose, c’étaient des personnes sérieuses et courtoises, elles avaient le sens des valeurs et étaient respectables. Alors pourquoi refuser ? Pourquoi... Surtout qu’il savait que cela finirait mal, que leur père allait être furieux et mal réagir. Alors, pourquoi ?

Père – Tu as fait ton choix. Mais sache qu’il me brise le cœur.

D’un autre côté, il y allait vraiment fort... Il s’en alla comme il était venu, plus furieux encore cependant, raide, laissant son fils à terre sans même lui jeter un coup d’œil. Bon... Etat d’urgence, ils ne pouvaient pas laisser leur père dans cet état, ni Kimmitsu. Il fallait calmer l’un, réconforter l’autre. Voyant mal Munemori dans le rôle de celui qui calme, Josuke lui lança un regard pour savoir s’il pouvait s’occuper de Kimmitsu, lui allait parler à leur père, voir comment il allait, ne pas le laisser tout seul après toute cette histoire. Josuke le suivit donc à l’intérieur, tournant la tête une dernière fois vers ses frères pour s’assurer que tout allait bien. Il hésitait et n’était pas franchement enthousiaste à l’idée de devoir calmer son père, autant le dire platement, mais ne pas le faire serait le lâcher alors qu’il avait besoin d’aide, lui aussi. Kimmitsu semblait avoir perdu un père mais leur père avait, apparemment, perdu un fils.

Décidé, Josuke passa différentes pièces en tâchant de rassurer les membres de la famille qu’il croisait, assurant qu’ils allaient tout régler et qu’eux ne devaient pas s’inquiéter. Ce n’était pas à lui d’annoncer ce qui s’était passé, encore moins le choix de Kimmitsu, alors il ne dirait rien. Absolument rien. Avançant, refermant une énième porte derrière lui, l’aîné de la famille finit par retrouver son père dans son bureau, fulminant toujours naturellement, il suffisait d’entendre le son de sa voix. Il s’approcha d’un pas prudent, craignant une nouvelle explosion de colère, regardant son père avant de s’incliner légèrement devant lui. C’était peut-être trop, pour l’instant, mais mieux vaut prévenir que guérir... Non ?

Josuke – Père, vous... Comment vous sentez-vous ? Je suis venu pour vous proposer mon aide, rester en colère n’est jamais une bonne chose, vous nous l’avez enseigné il y a bien longtemps déjà. Et rien ne compte plus que la famille...

Père – Va donc dire cela à ton petit frère ! hurla-t-il. Trahi par mon propre fils... Par mon sang... Qu'ai-je donc fait aux Dieux ?! Mon propre enfant... Je ne comprends pas ce qui ne tourne pas rond, dans sa tête. Il n'écoute plus personne...

Josuke leva un regard désolé vers son père, cherchant ses mots. Il savait que Kimmitsu n’allait pas changer d’avis, c’était sûr et certain, surtout avec son départ en France. Il adorait ce pays, d’accord... Mais lui-même avait beau retourner la situation sous tous les angles, il ne parvenait pas à comprendre pourquoi il voulait partir y vivre. C’était une décision importante, qui devait être mûrement réfléchie. Et elle l’était, apparemment... Dès lors, comment pouvoir le faire changer d’avis ? Il fallait essayer de lui faire confiance. S’il échouait là-bas, il reviendrait, mais il devait faire ses propres expériences.

Josuke – Il... Il est dans une période un peu spéciale et doit faire ses propres expériences. Peut-être faut-il lui faire... confiance ? Le laisser expérimenter, essayer, s’il échoue, il reviendra. Mais cette décision semble réfléchie, il n’a donc pas oublié tous vos enseignements. Il les a appliqués... Pas comme vous le pensiez, mais il les applique.

Père – Tu déraisonnes, toi aussi ! On n'abandonne pas comme ça sa propre famille, surtout en partant à l'autre bout du monde ! S'il veut travailler et voir ce qui se passe autour de lui, grand bien lui fasse, mais qu'il attende d'être plus âgé et qu'il reste dans son pays natal ! Tu acceptes cela, toi, que ton propre frère décide de s'exiler en France ?! Je ne te croyais pas si... Mon garçon, sincèrement, te rends-tu compte de la gravité de cette histoire ?! Et s'il n'y avait que la France... Il nous couvre de honte en refusant de se marier !

Josuke baissa la tête, se crispant un peu plus en réalisant qu’il n’aurait pas dû dire une chose pareille. Il voulait seulement relativiser ! Il devait comprendre son fils à défaut de pouvoir le convaincre de rester ici, au Japon, et de le voir épouser Imari. Il n’y arriverait pas, Josuke en était convaincu, cela se voyait dans les yeux de Kimmitsu. Bien sûr que si, il comprenait tout ce que cela engendrait, il comprenait que l’honneur et les valeurs passent avant tout, lui-même avait accepté d’épouser la femme que son père lui avait désignée, il était resté ici et allait devenir le chef de famille. Mais Kimmitsu ne pouvait vivre comme cela, Josuke ignorait pourquoi mais son frère avait besoin d’autre chose qu’il ne trouvait pas ici. Il ne le comprenait pas, non, mais il essayait au moins pour ne pas le perdre définitivement. A défaut de pouvoir le garder à côté de lui, peut-être pourraient-ils communiquer à distance. Ce serait différent, oui, mais c’était toujours mieux que rien... Son père soupira, tout à coup, faisant lever la tête à son fils sans qu’il n’ait trouvé quoi répondre.

Père – Va-t-en, s'il te plaît, j'ai besoin d'être seul.

Bon... Il avait commis une erreur. Josuke s’inclina à nouveau pour éviter de rajouter quoi que ce soit et sortit de la chambre. Dès qu’il eut fermé la porte, il poussa un long soupir avant de retourner avec les autres membres de la famille, pensif. Munemori avait-il réussi à parler et à rassurer Kimmitsu ? L’ambiance allait être très lourde au repas, ce soir, avec une telle dispute entre Kimmitsu et son père. Tout le monde l’avait entendu, c’était certain, et Josuke n’avait pas arrangé les choses en essayant de calmer le jeu, de comprendre le point de vue de chaque personne. Même s’il devait avouer qu’il ne comprenait pas son frère... Pourquoi tout quitter comme cela ? Pourquoi refuser de se marier conformément à la tradition ? Imari était une belle femme, elle avait de nombreuses qualités et aurait fait une excellente épouse à Kimmitsu.

Mais il fallut attendre jusqu’au soir pour avoir de plus amples informations. Munemori n’avait pas réussi à parler à leur frère, comme aucun membre de la fratrie en réalité. Leur petit frère s’était isolé, exilé loin d’eux et ne devait vraiment pas aller bien. Impression confirmée lorsqu’il ne se présenta pas à table... Bon. Josuke mangea tout de même, se doutant que Kimmitsu avait besoin d’être un peu seul pour l’instant et ne voulant pas, lui-même, manquer de respect en ne participant pas au repas. Et puis... Peut-être allait-il venir ? Il n’allait pas les éviter au point de ne pas manger, ce n’était pas sain et lui le savait comme tout le monde ici. Même si la dispute l’avait blessé, même si elle allait les faire veiller plus tard aujourd’hui, Kimmitsu ne devait pas se laisser aller. Ils mangèrent en silence, un peu gênés par l’ambiance et la tension palpable, la conversation semblant peu habituelle, très cordiale mais pas authentique comme d’habitude. Chacun aida à débarrasser mais, au moment de ranger l’assiette de son frère, Josuke lança un regard à Emiko.

Josuke – Je reviens, une minute, annonça-t-il en prenant l’assiette de Kimmitsu.

Josuke sortit en évitant le regard de son père, refusant de laisser son petit frère dans cet état alors qu’il était mal. S’il refusait de manger, s’il les évitait ainsi, c’était qu’il se sentait seul, plus que jamais. Et il ne voulait pas que ce soit le cas... En tant qu’aîné, il s’inquiétait pour son frère et se demandait vraiment comment il allait, s’il supportait la réaction de leur père ou si, au contraire, il n’arrivait pas à penser à autre chose. Ils avaient tous terminé, à présent, alors Josuke n’eut aucun remords à quitter la pièce pour aller retrouver Kimmitsu. Effectivement seul, dehors, en train d’observer le jour qui se couchait pour laisser place à la nuit. Poussant un soupir en jetant un regard à l’assiette qu’il tenait entre les mains, l’aîné de la famille se rapprocha doucement de son frère après avoir ouvert la porte. Et maintenant ? Restait à voir l’état moral de Kimmitsu, d’abord.

Kimmitsu – Qu’est-ce que tu veux ? murmura-t-il.

Josuke – Te parler et t’apporter ceci, répondit-il en lui donnant une assiette. Mange, ce n’est pas en faisant grève de la faim que tu arriveras à réaliser tes projets.

Bon... D’accord, il allait mal. La dispute n’était pas bien passée, avait été douloureuse sur le plan physique et moral et il aurait besoin de temps pour la digérer. Josuke se retint de grimacer et de soupirer en songeant à cela, décidé à aider son frère et à le soutenir pour qu’il ne soit pas tout seul. Non, il ne comprenait pas encore ce qui le poussait à agir ainsi mais il ne comptait pas non plus l’abandonner. Il avait besoin d’aide et, connaissant Kimmitsu, il savait que c’était important pour lui et qu’être renié par son propre père devait le faire souffrir. Pour preuve : il fixait le contenu de son assiette, doigts serrés sur les baguettes sans avoir touché à un seul morceau.

Kimmitsu – Si tu es venu me dire que je vous déçois tous, j’ai compris maintenant, marmonna-t-il. C’était assez clair toute à l’heure.

Josuke – Non, ce n’est pas mon intention, répliqua-t-il en s’asseyant en tailleur face à lui. Je viens seulement en tant que grand frère. Je n’accepte pas ta décision mais je ne veux pas que tu te sentes seul et perdu à cause de ça, je ne veux pas perdre mon frère pour ses choix de vie. Je veux seulement que tu respectes tes principes, quand tu seras là-bas.

Et Kimmitsu sourcilla, bouche entrouverte, avant de redéposer l’assiette... Eh bien ? Josuke n’avait rien dit, là ! Pourquoi faisait-il une tête pareille ? Il avait été gentil, là, compatissant et n’avait rien dit pour l’énerver ou le froisser ! Que du contraire, il voulait l’aider, le réconforter et le soutenir. Alors pourquoi réagir comme cela ? Peut-être était-il destiné à devenir le chef de famille, oui, mais cela ne signifiait pas qu’il pensait la même chose que leur père. Il suivait ses enseignements, les écoutait, les apprenait... Mais il avait, également, une pensée propre et des convictions. Son frère pensait vraiment que Josuke le rejetterait comme son père ? Enfin, il était son petit frère ! Il lui lança un regard en biais, confirmant ses soupçons, avant de le porter sur les étoiles naissantes dans le ciel. Josuke ne le quittait pas des yeux, le couvant d’un air inquiet en se demandant ce qu’il pouvait bien penser.

Kimmitsu – Je ne compte rien renier, soupira-t-il d’une voix lasse, sans plus le regarder. Ni mes origines, ni rien. S’il le faut, j’irai vivre au village pour ne plus indisposer père. La famille sera moins déshonorée ainsi.

Josuke – Il vaut mieux que tu restes ici. Père finira peut-être par entendre ce que tu veux faire même s’il ne le comprend pas, comme moi. Tu es son fils et te voir quitter la maison pour aller vivre dans un autre village avant de quitter le pays serait trop difficile pour lui. Pour nous tous.

Et, surtout, il ne voulait pas voir son frère s’exiler de la sorte avant de partir. C’était peut-être idiot mais la perspective de le voir s’éloigner déjà maintenant rendrait son départ encore plus imminent et certain, comme s’il partait dans les mois qui arrivaient alors qu’il n’en était rien. Cependant, à voir la tête de Kimmitsu, il ne devait pas franchement partager les convictions de Josuke concernant le changement de comportement de leur père. Il est vrai que, depuis quelques mois, il changeait de plus en plus et prenait un caractère moins... aimable, s’il pouvait dire ainsi. Mais c’était compréhensible vu la guerre et ils devaient tous faire preuve de compréhension, de patience. Avec son comportement, Kimmitsu ne pensait qu’à lui là où leur père n’avait pas pensé à sa vie mais à celle d’autres personnes, la plupart inconnues, voulant protéger des êtres chers. Alors, oui, il semblait être resté bloqué à la guerre, et oui, le comportement de leur jeune frère était égoïste en pensant à tout cela... Mais Kimmitsu ne devait pas être renié et abandonné pour autant. Ils restèrent silencieux de longues minutes, Josuke fixant tantôt le ciel, tantôt son frère, tantôt l’assiette encore intacte d’un air absent. Comment l’aider sans trahir son père...

Kimmitsu – Comment as-tu fait pour accepter d’épouser Emiko ? Je n’ai rien contre elle, attention, mais se marier lorsqu’on a vu la personne juste deux fois... Cette vie…

Avait-il seulement eu le choix ? Le vrai choix ? Son père lui répétait qu’il était l’aîné, destiné à être chef de famille, qu’il devait montrer l’exemple et être droit depuis des années. Depuis qu’il était né, en même temps qu’il lui enseignait les arts martiaux. Comment aurait-il pu refuser d’épouser Emiko ? C’était... naturel. Il ne lui était même pas venu à l’esprit de refuser, son chemin était tout tracé et Josuke n’avait pas le loisir de se rebeller comme le faisait, actuellement, son frère. C’était une question de responsabilité, de rôle, et pas une question d’envie ou de choix. En plus, finalement, Emiko avait l’air gentille, aimante et douce, il l’appréciait réellement jusqu’ici. Il apprendrait à la connaître, voilà tout.

Josuke – Je l’ai accepté, c’est tout. Il y a des choses qui sont comme ça et que l’on ne change pas comme on le veut, surtout en tant que fils aîné. Je vais apprendre à la connaître, comme de nombreuses personnes l’ont fait avant moi.

Et cela allait fonctionner, comme cela fonctionnait depuis des générations et des générations. Josuke ne ressentait pas le besoin inhérent de prendre son envol, d’avoir une liberté particulière comme Kimmitsu semblait tant en manquer. Il s’accommodait des inconvénients, des petites frustrations et le vivait très bien. Observant son frère replier ses jambes contre lui en soufflant brièvement, Josuke posa ensuite le regard sur l’assiette pleine sans rien dire, pensif. Que pouvaient-ils vraiment faire, au fond ? Rien du tout.

Kimmitsu – Il y a beaucoup de choses qu’on peut changer, malgré tout, avec de la volonté, reprit-il un ton plus bas en regardant les étoiles. Vous pouvez me taxer d’être encore trop jeune, idéaliste ou naïf, il n’en reste pas moins que parfois, on ne peut pas vivre avec des règles étouffantes ou qui vous privent de votre liberté. C’est surtout ça qui me pousse à partir, je ne trouve pas ma place ici. Et je ne vois pas l’intérêt d’épouser une femme que je ne pourrai pas rendre heureuse, peu importe si d’autres l’ont fait avant.

Josuke leva la tête vers Kimmitsu, lui lançant un regard un peu outré sans rien dire pour autant en entendant le ton qu’il venait d’employer. Du calme ! Oui, il était complètement idéaliste et naïf, trop jeune encore pour réaliser ce qui allait advenir d’ici quelques années, mais c’était de son âge. Sûrement. Lui-même avait toujours grandi avec l’idée de devenir le chef de famille, il n’avait jamais pensé à ce qu’il voulait vraiment, ne réfléchissait pas et suivait ce qu’on lui dictait. Pour Kimmitsu, ces règles le privaient de liberté... Or, avec cette liberté, justement, il blessait une famille et perdait peut-être son père. N’était-ce pas un prix un peu trop élevé pour vivre comme il le souhaitait ? A la vue de sa réaction, si, il souffrait d’être considéré ainsi par son père et d’être dans des relations aussi froides avec eux tous.

Kimmitsu – Est-ce que tu me détestes ? demanda-t-il ensuite. Père, oui, maintenant, mais je voudrais bien savoir si c’est aussi ton cas.

Josuke – Te détester... ?

Josuke avait un air incrédule, dévisageant son frère comme s’il n’en croyait pas ses oreilles. Le détester... Qu’est-ce qui lui était passé par la tête au moment où il avait décidé de lui poser la question ? Non, parce que, sincèrement, il était choqué. Complètement. Détester son propre frère ! Mais enfin ! Oui, Josuke allait reprendre le rôle d’un chef de famille, oui, leur père lui enseignait quantités de choses intéressantes et importantes pour qu’il soit fier de lui plus tard. Mais cela ne voulait pas dire qu’il allait oublier son frère et ne plus jamais le revoir ! Il poussa un nouveau soupir, réussissant à sortir de son étonnement, puis se redressa en se frottant un peu les mains avant de se mettre à côté de Kimmitsu. Là, il lui frappa très légèrement la tête en lui donnant un petit coup puis s’assit à côté de lui en tailleur, le regard porté vers l’horizon comme s’il n’avait rien fait du tout.

Josuke – Ca, c’est parce que tu penses des bêtises, expliqua-t-il tout de même en tournant la tête. Tu es mon petit frère, comment pourrais-je te détester ?! Cela n’a aucun sens, Kimmitsu, le réalises-tu seulement ?

Josuke s’interrompit, faisant une courte pause tout en poussant un soupir. Il reprit l’assiette que son frère avait déposée juste devant lui et la lui tendit à nouveau pour qu’il mange, comme pour appuyer ses paroles – même si c’était aussi pour l’empêcher de dire d’autres âneries. Le détester... Il était tombé sur la tête. Ou le manque de nourriture l’empêchait de penser normalement, c’était possible aussi. Ce n’est pas parce qu’il était allé voir si leur père allait bien qu’il partageait son avis et détestait Kimmitsu. En plus, il l’avait défendu ! Il avait essayé d’expliquer son point de vue, de dédramatiser la situation, d’arrondir les angles pour que leur relation ne se dégrade pas davantage. Mais Josuke n’était pas sûr que son petit frère en ait seulement conscience...

Josuke – Ce n’est pas parce que je suis allé voir Père que je te déteste. J’ai essayé de défendre ton point de vue, de lui faire entendre raison en lui disant que tu devais apprendre seul et que tu retiendrais de bonnes leçons grâce à tes erreurs. Cela n’a pas fonctionné... Mais j’ai essayé. Comment peux-tu penser que je te déteste ? Tu es mon petit frère, je tiens à toi et je compte bien te soutenir, t’épauler et veiller sur toi. D’ailleurs, il faut que tu manges, le manque de nourriture te fait dire des bêtises. Mais puisque tu ne sembles pas décidé...

L’aîné saisit les baguettes entre ses doigts d’un air appliqué, indifférent à la réaction de Kimmitsu, et prit lui-même une bouchée pour la porter à la bouche de son frère en insistant jusqu’à ce qu’il cède et l’avale. Oui, c’était ridicule, oui, il en profitait amèrement et oui, il savait qu’il détestait être couvé de la sorte, mais non, Josuke n’arrêterait pas. Il lui avait tendu la perche ! Et dire qu’il le détestait... Cette action lui prouverait le contraire, non ? Il devait manger, ne pas se laisser dépérir comme il le faisait pour une dispute alors que, visiblement, il avait pris sa décision. Mais le pire, dans tout cela, était qu’il croyait que Josuke l’avait rejeté alors qu’il voulait l’aider. Gardant les baguettes entre les doigts, il lança un regard de défi à son frère, un petit sourire en coin tant la situation était ridicule et grotesque.

Josuke – Alors, je te déteste, selon toi ? Je peux t’aider pour tout ce que tu veux, aucun problème là-dessus, dis-moi seulement ce que je peux faire. Tiens, finis au moins ton assiette, sauf si tu veux de l’aide, là aussi ?
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Kimmitsu Nakajima
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MessageSujet: Re: Entraînement entre frères   Entraînement entre frères EmptySam 14 Nov - 23:28

– Te détester... ?

Il eut un air choqué et incrédule, alors que Kimmitsu retenait un soupir fatigué. Il était normal qu'il lui pose la question ! Il ressemblait beaucoup à père et était sans doute furieux lui aussi, même s'il ne le montrait pas. Ce que pensait sa famille de cette dispute était très claire, leur désapprobation se lisait sur leurs visages. A part Eisen et Akinori, le petit dernier de la fratrie, qui étaient trop jeunes pour comprendre, tout le monde pensait comment père, que c'était de la folie pure. Josuke soupira à nouveau en se levant, voulant sans doute partir de là. Il pouvait très bien aller se coucher, maintenant, il n'avait pas besoin de venir le cuisiner, ce qui était fait était fait. Leur père n'acceptera jamais ce départ, de toute façon, il n'était pas question qu'il admette un désaveu aussi fort, une désobéissance qui remettait en cause son autorité. Le rejet par son propre fort, un prix trop élevé ? Au fond de lui, même s'il n'osera jamais l'avouer, il osait penser que non, retenant un sourire amer en songeant comment réagirait sa fratrie s'ils savaient cela, tous. Son frère vint s'asseoir à côté de lui puis le frappa tout à coup à la tête avant de s'installer, pas très fort mais assez pour le surprendre. Qu'avait-il dit, encore ?! Il lisait dans ses pensées et il avait tout entendu ? Kimmitsu lui jeta un regard lassé, appuyé contre le poteau, en se mordant les lèvres. Une nouvelle dispute maintenant, non merci. D'autant plus qu'il ne comptait pas déménager dès le lendemain.

– Ça, c’est parce que tu penses des bêtises, expliqua-t-il tout de même en tournant la tête. Tu es mon petit frère, comment pourrais-je te détester ?! Cela n’a aucun sens, Kimmitsu, le réalises-tu seulement ?

Peut-être, peut-être pas, vu les circonstances, il était logique qu'il se pose la question ! Il suffisait de regarder leur père pour être convaincu que les relations familiales n'empêchaient pas les rejets. Kimmitsu pouvait parfaitement comprendre que la guerre changeait profondément une personne, mais au point de perdre ainsi toute clarté, au point d'en devenir trop autoritaire, de vouloir tout contrôler, au point de rejeter vos enfants car ils ne voulaient pas d'une vie imposée ? Si le jeune homme était certain d'une chose, c'est qu'il ne voulait pas lui ressembler, quoi qu'il arrive. Il ignorait quels combats il aura à faire face dans sa vie mais il se jurait de ne jamais devenir aussi... fermé et tyrannique que cela. De ne pas devenir obtus au point de ne plus accepter une vision différente de la sienne, au point de rejeter tous ceux qui ne lui ressemblaient pas, au point de ne plus croire en rien, surtout, car c'était là le plus grand mal de leur père. Il se renfermait tant sur lui-même qu'il n'avait plus foi en rien. Même plus en l'avenir puisqu'il se refermait à tout. Kimmitsu le respectait pour ce qu'il avait accompli, l'aimait car il était son père malgré tout, mais il ne croyait plus à ce qu'il représentait, l'image qu'il s'était forgé enfant avait été brisée au fil des années. Il ne restait plus qu'à tout reconstruire et trouver ailleurs des valeurs qu'il ne voyait plus chez lui. Sa famille avait encore confiance, soit. Mais lui partira pour se construire un avenir, même si tout le monde devait le détester pour cela, ce n'est pas en restant chez soi avec la peur de briser les codes que la société pouvait évoluer. Son frère se pencha pour reprendre l'assiette qu'il avait laissé, la lui fourrant dans les mains. C'est bon, merci, il n'avait pas faim.

– Ce n’est pas parce que je suis allé voir Père que je te déteste. J’ai essayé de défendre ton point de vue, de lui faire entendre raison en lui disant que tu devais apprendre seul et que tu retiendrais de bonnes leçons grâce à tes erreurs. Cela n’a pas fonctionné... Mais j’ai essayé. Comment peux-tu penser que je te déteste ? Tu es mon petit frère, je tiens à toi et je compte bien te soutenir, t’épauler et veiller sur toi. D’ailleurs, il faut que tu manges, le manque de nourriture te fait dire des bêtises. Mais puisque tu ne sembles pas décidé...

Il avait essayé de... Et bien, il avait sacrément dû se faire renvoyer balader, étant donné à quel point leur père détestait être contrarié et encore plus qu'un de ses enfants lui réponde. Son frère saisit tout à coup les baguettes, sous son regard perplexe, puis vint lui fourrer un morceau dans la bouche. Eh, là ! Kimmitsu s'étrangla à moitié en l'avalant, lui jetant un regard exaspéré. C'est bon, il n'avait plus deux ans ! Et il n'était pas malade non plus, Josuke n'avait pas besoin de faire ça ! Et il restait là, avec un petit sourire. S'il avait autant de temps de à perdre, il ferait mieux d'aller dormir, ça lui sera plus profitable que rester là à se moquer. C'était peut-être très mignon lorsque Kimmitsu avait tout juste un an et que son frère le faisait manger pour aider leur mère, mais plus aujourd'hui, merci bien. S'il voulait jouer à ça, il pouvait aller voir Akinori. Il n'avait que quatre ans et on le faisait encore manger pour des choses qu'il n'aimait pas trop et où il fallait le pousser à avaler.

– Alors, je te déteste, selon toi ? Je peux t’aider pour tout ce que tu veux, aucun problème là-dessus, dis-moi seulement ce que je peux faire. Tiens, finis au moins ton assiette, sauf si tu veux de l’aide, là aussi ?

– C'est bon, j'ai compris, soupira-t-il en reprenant les baguettes, tu ne me détestes pas. Mais je n'ai pas faim et ce n'est pas manquer un repas qui va me tuer, je ne suis pas malade.

Il ne tombait presque jamais malade, de toute manière, ayant la chance d'avoir une santé très solide. Il n'était arrivé que quelques fois, surtout enfant, où il avait attrapé la grippe ou de gros rhumes, sa mère devant le menacer pour qu'il reste au chaud dans son lit sans bouger. Josuke devait sans vouloir se venger, mais tout de même, il n'avait pas besoin de faire ça. Il secoua la tête, toujours assis à côté, pendant que Kimmitsu envisageait de filer plus loin pour avoir un peu d'air. Là aussi, ce serait considéré comme un crime ? Enfin, il serait capable de le suivre tout de même, étant donné son caractère.

– Mange. Tu veux partir en France, non ? Pour ça, tu dois mettre de l'argent de côté, il te faut des forces et toute ta tête. Or, pour l'instant, ce n'est pas le cas. Regarde, tu as l'air complètement... Tu es mou. Alors on se bouge ! Par où comptais-tu commencer ? A quoi as-tu déjà pensé ?

– Ma tête et mon corps vont très bien, merci pour eux, grinça-t-il d'un ton plus ironique qu'il ne l'aurait voulu. Pour le reste, j'ai déjà commencé à mettre de l'argent de côté, avec mon travail au village. Je prépare ce qu'il faut.

Il s'interrompit en posant un regard un peu désespéré sur son assiette, tournant les baguettes entre ses doigts sans les utiliser. Il songeait à toutes les recherches qu'il avait faite, les heures de discussion avec un des anciens du village qui avait déjà fait plusieurs voyages en France pour des affaires familiales, les cours qu'il avait donné aux enfants qui débutaient pour gagner un peu d'argent, les heures à apprendre la langue, dans le dos de sa famille, mais le plus important restait les heures qu'il avait passé à planifier ce qu'il devait faire pour s'installer là-bas, où, comment y vivre, à se préparer mentalement à être coupé de sa famille, surtout si son père finissait par le renier. Il appuya sa tête contre le poteau derrière lui, silencieux, le regard perdu sur le paysage et les étoiles, plus nombreuses à présent. Au fond, ce qu'il aimerait savoir, c'est pourquoi il était le seul à ne pas comprendre son père, à ne pas réussir à accepter tous les changements, ni à accepter docilement les ordres, être le fils bien sage qu'on attendait de lui. Son père avait réagi si violemment quand Kimmitsu lui avait avoué qu'il avait déjà étudié la langue Française, leur culture et leur Histoire. Puis était venue par-dessus la fameuse histoire du mariage. Il pinça les lèvres, imaginant à quel point les parents d'Imari devaient être furieux, à quel point elle devait être blessée. La famille était importante, oui... Il avait déshonoré la sienne et le savait, c'était purement égoïste, cette histoire allait les suivre des années. Comment pouvait-il réparer cela avant de tout quitter ?

– Tu n'aurais pas dû parler à père, il va finir par t'en vouloir à toi aussi, dit-il d'un ton plus lointain, le regard fixé sur un arbre un peu tordu, près du portail en bois.

Le père d'Imari pouvait refuser de le recevoir s'il se présentait pour donner ses excuses et non pas pour essayer d'arranger les choses afin que le mariage ait lieu. Quant au reste... Le départ, son père, la France... Il avait peur et était en même temps impatient. Il n'avait aucun moyen de savoir ce qu'il allait découvrir ou expérimenter mais il avait envie d'y être.

– Ne t'inquiète pas pour moi, tout va très bien se passer. Je suis celui qui va reprendre son rôle, après tout. Il ne m'en voudra pas éternellement, tu es mon petit frère, c'est normal que je cherche à te défendre même si je ne comprends pas tout.

C'est vrai, leur père n'en voulait qu'à ceux qui acceptaient de suivre ce qu'il dictait sans rechigner. Autrement dit, leurs relations n'étaient pas prêtes à s'arranger, même avec plusieurs mois devant eux. Retenant un sourire amer, il posa l'assiette un peu plus loin pour ne pas la renverser, gardant tout de même les baguettes pour empêcher son frère de trop le couver. Tout allait bien, il n'avait pas besoin de s'inquiéter, le plus gros problème résidait dans la relation houleuse qu'il avait avec son géniteur et dans la relation très orageuse avec son ex future belle-famille. Il trouvera bien un moyen d'apaiser les tensions, à un moment ou un autre, il essayera déjà de se présenter assez vite, dans les jours prochains, afin de demander pardon et tâcher d'expliquer la situation. Avec son père... Et bien, autant lui laisser du temps pour digérer un peu cette affaire avant de lui en reparler, ou plutôt avant d'enclencher une autre dispute qui finira par angoisser un peu plus toute la famille, le tout bouclés dans son bureau, histoire d'accentuer la pression. Vraiment, il avait hâte d'arriver à la prochaine confrontation, cela risquait d'être magnifique, sans aucun doute. Humph. Se retournant, il vit Josuke lui lancer un regard désespéré. Kimmitsu n'avait rien dit, là... Il reprit l'assiette pour la ramener en cuisine et la laver, veillant à ne pas faire de bruit.

A cette heure, tout le monde devait dormir ou être sur le point de s'endormir. S'essuyant les mains, il jeta un regard vers le couloir sombre, voyant de la lumière filtrant au bout, dans la chambre qu'il partageait avec ses deux grands frères. Munemori devait sans doute attendre, encore. Qu'il dorme, lui aussi, il n'avait pas besoin de veille plus tard que d'ordinaire ! Se retournant, il contourna son frère qui avait suivi, passant dans le hall d'entrée de la maison. Il comptait aller marcher un peu, prendre l'air et se vider la tête. Ne plus penser aux jours qui allaient suivre, aux mois, à tout. Ne pas penser à sa prochaine "conversation" avec son père, dont il savait par avance qu'elle se terminera très mal. Enfilant ses chaussures puis de quoi se couvrir, il sourcilla en voyant Josuke l'imiter.

– Je n'ai pas besoin de nounou pour me surveiller, je n'ai pas l'intention de fuir.

– Je le sais, j'ai seulement une envie subite de prendre l'air, moi aussi, répondit-il, visiblement décidé.

Il ne... Bon, très bien. Kimmitsu soupira en enlevant ses chaussures, assez exaspéré, en rentrant de nouveau, passant une main sur son visage avec une grimace. Puisque son frère semblait décidé à le couver... Il rentra dans leur chambre, voyant Munemori allongé dans son futon tout habillé avec la lumière allumée, une livre ouvert sur le torse près de son visage et profondément endormi. Kimmitsu se pencha pour prendre doucement le livre puis le poser plus loin, remontant ensuite la couverture sur son frère. Il avait dû vouloir les attendre puis s'était endormi au milieu de la lecture de son roman, ce dernier ne devait pas être bien passionnant. S'asseyant sur son propre lit, posé entre ceux de ses frères, il se frotta longuement les yeux en se mordant les lèvres, se répétant en boucle qu'il n'y avait absolument aucune raison de pleurer, c'était lui qui avait choisi cette voie et il comptait s'y tenir. Il devait relativiser, pour son père. Ils arriveront peut-être à parler un jour, peut-être. Ou bien il n'acceptera jamais et finira par le renier, c'était l'hypothèse la plus probable, étant donné qu'il le considérait déjà comme un fils indigne. Ce n'était qu'une question de différences, d'envie de liberté. Kimmitsu ne pensait pas comprendre un jour comment le besoin de s'évader pour se construire dans une vie qu'on aimait était si répréhensible. Gardant le visage dans ses mains, il inspira un peu en se mordant les lèvres, entendant Josuke s'installer aussi à côté.

Se préparant assez vite, il se coucha lorsque la lumière fut éteinte, écoutant la respiration paisible de Munemori, à côté de lui, qui murmurait parfois des phrases incompréhensibles dans son sommeil. Kimmitsu se mordit les lèvres, se tournant sur le côté, revoyant en boucle le visage furieux de son père et entendant ses hurlements. Il allait encore s'écouler des mois à ce régime. Il arrivera sans doute, dans quelques années, à ne plus en être touché, pouvoir considérer que ce n'était pas si grave, qu'il avait fait ses propres choix. Avec le temps, il y arrivera... A voir les choses d'une autre façon. Une larme roula doucement sur sa joue et il prit une petite inspiration, fermant les yeux et pinçant les lèvres. Un jour, oui, mais là, tout de suite, il s'en voulait de blesser son père et lui en voulait de s'être autant laissé aller après tout ce qu'il avait fait au cours de sa vie. C'était en ça qu'il était un fils indigne, il n'était même pas reconnaissant à son propre mère pour ce qu'il avait accompli. Il était égoïste et ne parvenait pas, en étant conscient de ça, à faire marche arrière. Abandonner, non, jamais... S'il abandonnait maintenant, que sera-t-il capable de faire une fois plus âgé, adulte, dans sa vie future ? Il n'allait pas reculer maintenant, ce serait de la lâcheté pure et simple. La peur pouvait vous asservir et vous empêcher de bouger. D'autres larmes coulaient doucement quand son grand frère bougea tout à coup pour venir près de lui, le prenant dans ses bras.

– Je t'empêche de dormir ? murmura-t-il.

– Ne pense pas à ça. Laisse-toi aller, ça ira mieux après, je suis là.

Kimmitsu baissa la tête en reniflant, posant le front contre le torse de son frère en tremblant un peu, les yeux remplis de larmes. Il ne pouvait pas abandonner. C'est sur cette pensée qu'il finit par s'endormir, dans les bras de son frère, autant d'épuisement que par un trop-plein d'émotions. Un sommeil assez agité, dont il se réveilla un peu hébété au matin, les cheveux ébouriffés et le teint pâle. Il était encore très tôt, le jour se levait à peine. Pendant qu'il se redressait, Munemori ouvrit des yeux ensommeillés, en demandant d'une voix endormie pourquoi il était toujours habillé. Assis et se préparant lui aussi, il manqua de sursauter lorsque la porte de la chambre s'ouvrit d'un coup brutalement, dévoilant leur père, déjà prêt et appuyé sur sa canne. Munemori avait fait un petit bond, surpris, s'emmêlant dans sa couverture. Leur père avait un air très... Décidé, furieux, dégoûté ?

– C'est bon, Kimmitsu. Fais donc ce que tu veux, maintenant. Reste ou pars, peu m'importe. Je te renie, tu n'es plus mon fils à mes yeux.

Il le regarda de haut puis partit, avec lenteur, pendant que Kimmitsu sentait sa gorge s'assécher et sa gorge se serrer au point de lui donner le sentiment d'étouffer. Pleurer, vomir, s'évanouir, il ne savait pas trop ce qu'il pouvait faire, là, tout de suite. Cherchant ses vêtements à tâtons, il s'habilla comme un somnambule, éprouvant d'un coup une envie brûlante de quitter son pays dès maintenant, partir, le plus loin possible. Partir dans un pays où un parent pouvant comprendre le besoin d'indépendance. Où... Il sursauta lorsque Munemori se mit tout à coup à côté de lui en lui prenant le visage entre les deux mains, lui faisait cesser tous gestes.

– Stop, respire doucement, t'es trop pâle. On est toujours là, je te rappelle.

Trop pâle, trop pâle... Son frère posa ensuite les mains sur ses bras pour s'avança pour le serrer contre lui, sans lui laisser le temps de riposter. Il était un peu trop sonné pour dire quoi que ce soit, de toute manière, bien qu'il s'y attendait. Mais pas si vite. Pas comme ça. Il voulut remuer pour filer loin d'ici et se cacher dans un coin mais son frère resserra sa prise, l'empêchant de bouger. Il avait appris bien assez de techniques pour se dégager de ce genre de situations, soit, mais il ne pouvait pas remettre son cerveau en assez bon état pour s'en servir, en ce moment précis. Renié par son propre père... Il lui faudra des années avant de pouvoir avaler ça. Josuke s'approcha à son tour, lui frottant le dos en lui disant se calmer. Kimmitsu lui jeta un regard un peu éberlué, toujours prisonnier des bras de son frère, les yeux brûlants.

– Comment vous faites pour réagir comme ça ? bafouilla-t-il. Vous... Il vaudrait mieux que... Je parte maintenant... Vous allez avoir des ennuis, vous aussi, sinon...
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Munemori Nakajima
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Munemori Nakajima
MessageSujet: Re: Entraînement entre frères   Entraînement entre frères EmptyVen 20 Nov - 23:38

– Kimmitsu, att...

Trop tard, son frère fila comme s'il avait le diable aux trousses. Munemori lâcha un grognement en se frottant le visage, ne sachant plus quoi faire, sur le moment. Josuke était sans doute parti rejoindre leur père, vu son état, mais lui, que devait-il faire ? Kimmitsu allait refuser de lui parler et au fond, son frère était incapable de trouver quoi lui dire. Il trouvait trop inconcevable qu'il ait refusé son mariage ! Ils connaissaient Imari, elle n'était pas beaucoup plus jeune qu'eux, ils l'avaient souvent vu sur les chemins, elle avait partagé leurs jeux comme d'autres enfants du voisinage, elle était devenue une femme rieuse, assidue à la tâche, toujours prête à sourire et très maternelle, issue d'une famille honorable et respectable, que fallait-il de plus ? Pourquoi penser automatiquement qu'il sera incapable de l'aimer ?! Ces choses-là ne venaient qu'avec le temps, lorsqu'on apprenait à se connaître, se respecter, vivre ensemble ! L'amour ne se commandait pas un claquement de doigt, on ne pouvait pas tomber amoureux d'un ou d'une inconnue, la vie n'était pas un roman. Soupirant, il rentra à son tour, cherchant son petit frère mais toujours sans trouver les bons mots. Il avait l'impression de ne même plus le comprendre, ce qui l'enrageait autant que cela le peinait. C'était son frère et... Père n'allait tout de même pas le rejeter pour de bon, n'est-ce pas ? Allons ! Non, c'était impossible, c'était son fils. Munemori se faisait des idées, il ne devrait pas s'angoisser pour ça, ce n'était qu'une mauvaise passe, rien de plus.

Rentrant, il commença par terminer ses tâches et son travail, presque aussitôt accaparé par Echiko, sa petite sœur de onze ans, qui n'arrivait pas à faire un de ses devoirs d'algèbre. Elle le tira par la manche jusqu'à ce qu'il la suive dans le salon puis s'assoit avec elle, jetant un coup d'œil à ses exercices. Ce n'était pas si compliqué, enfin. Il reprit avec elle depuis le début, pointant du doigt les éléments auquel elle devait prêter une grande attention, tout en empêchant régulièrement qu'elle ne renverse la bouteille d'encre sur ses livres, tant elle avait des gestes vifs. Josuke passa dans la pièce et un peu plus tard et son frère secoua la tête pour lui faire comprendre qu'il n'avait pas pu parler à Kimmitsu. Et leur aîné n'avait dû réussir non plus à parler à père, vu sa tête. Il lui fit un sourire un peu triste, prenant Akinori sur ses genoux lorsqu'il vint près de lui, clignant des yeux avec un air un peu fatigué. Qu'il profite de la petite enfance, tant qu'il le pouvait, les problèmes arrivaient bien trop vite. Echiko s'écrira tout à coup qu'elle avait trouvé la solution, avec un sourire triomphant. Il lui frotta doucement les cheveux pour la féliciter, son plus jeune frère blotti dans ses bras et à moitié endormi. Elle notait les résultats avec un bel enthousiasme, à présent, s'attirant une fois de plus une remarque de leur mère pour qu'elle fasse moins de bruit. Bah, c'était son âge, encore. Là aussi, elle devait en profiter.

– Range bien tes affaires, tu vas en oublier la moitié en allant à l'école, sinon.

– Je peux aller dire à papa que j'arrive mieux en algèbre ?

– Pas de suite, il est... un peu fatigué.

Père n'allait sûrement pas se priver de la renvoyer balader, vertement, vu son humeur massacrante. Munemori se redressa, embrassa sa petite sœur sur le front, puis souleva un peu son frère pour le caler contre lui en se remettant debout, attendri en le voyant fermer les yeux en suçant son pouce. Au lit dès qu'il aura mangé. Il se chargera de coucher les petits, leur mère voudra sûrement parler à son mari. Une fois tous à table, il se chargeait de servir la soupe aux deux cadets lorsqu'il vit la place de Kimmitsu laissée vide. Il comptait sauter le repas ? Il était sans doute parti se réfugier dans son coin habituel, à l'arrière de la maison, il allait là-bas quasiment tous les soirs depuis qu'il savait marcher seul, pour observer les collines et les étoiles. Leurs parents ne firent aucun commentaires, cependant, ce qui assez étrange en soit. Quelle ambiance... Il mangea assez vite, retenant un long soupir. Kimmitsu les avait déjà évité tout l'après-midi mais il ne pourra pas le faire éternellement ! Munemori avait déjà du mal à avaler qu'il était vraiment sérieux en parlant de partir en France. Non pas qu'il réprouvait son envie de voyager mais... C'était égoïste, mais il avait surtout peur que leur frère les oublie, une fois là-bas. Leurs parents s'esquivèrent avant la fin du repas, sans rien dire. Lui-même eut un petit soupir, prenant Akinori par les épaules pour le redresser en le voyant s'effondrer à moitié sur la table.

– Bon, toi, au lit. Eisen, viens avec moi. Les filles aussi, filez vous coucher.

Il se retourna vers Josuke, pour savoir s'il avait une idée pour leur frère, mais il avait déjà pris son assiette, prêt à aller le rejoindre. Parfait. Il emmena ses frères faire leur toilette puis les coucher, s'assurant qu'ils soient bien blottis dans leur lit pour la nuit, remontant doucement la couverture sur eux. Ils étaient beaucoup trop adorables, comment ne pas fondre devant leurs petites bouilles ? Se levant, il quitta la pièce en refermant doucement derrière lui. Ses frères devaient être en train de parler, autant ne pas les déranger. Rentrant dans la chambre u'il partageait avec eux, il s'effondra à moitié sur son futon, attrapant un livre laissé la veille au soir, bien décidé à les attendre. Après tout, Josuke allait peut-être réussir à lui parler, lui. Après tout, c'était lui qui les cuisinait à chaque fois lorsque quelque chose n'allait pas et qu'ils ne voulaient pas en parler. Clignant des yeux, pris d'un coup par la fatigue et l'angoisse, il laissa retomber son livre contre lui, soupirant assez fort. Pourvu que tout s'arrange vite... Le plus vite possible. Il grimaça, priant les esprits pour que tout s'arrange, fermant les yeux. Glissant dans le sommeil sans même le réaliser.

Ce fut un faible rayon de soleil qui vint lui chatouiller le visage et le tirer de sa nuit, le lendemain. Ouvrant les yeux avec difficulté, il demanda d'une voix pâteuse pourquoi il était toujours habillé. Quelqu'un avait mis son livre plus loin puis remonté la couverture sur lui. Il tourna la tête, voyant Kimmitsu qui s'habillait et Josuke qui se réveillait, lui aussi. Ben, il n'était pas tard, pourquoi se lever dès maintenant ? La porte coulissa tout à coup avec force et le jeune homme fit un véritable blond, son cœur bondissant de deux mètres avant de s'affoler, sous l'effet de la surprise et de l'adrénaline, alors qu'il s'emmêlait dans la couverture. Leur père était là, déjà préparé, appuyé sur sa canne, debout sur le seuil. Quoi, ils étaient en retard, avaient fait une bêtise, ou quoi, qu'est-ce qui se passait ?! Il appuya une main contre sa torse pour calmer l'organe vital affolé par cette brusquerie matinale, le souffle un peu court. Se libérer de la couverture lui prit une bonne minute, alors que leur géniteur avait le regard rivé sur Kimmitsu. Oh, ça ne sentait pas très bon, il allait encore lui crier dessus, lui ordonner d'aller voir la famille d'Imari dès maintenant ou lui interdire de partir en France ?

– C'est bon, Kimmitsu. Fais donc ce que tu veux, maintenant. Reste ou pars, peu m'importe. Je te renie, tu n'es plus mon fils à mes yeux.

La bouche du jeune homme se décrocha sous le choc, regardant son père, puis Kimmitsu, puis leur frère aîné qui s'était totalement pétrifié, lui aussi, regardant son père et son frère à tour de rôle. Leur père renifla d'un air méprisant puis repartit, comme si de rien n'était, comme s'il n'avait rien dit ou fait. Il venait de le, de le, de le... Kimmitsu avait un air... Il prenait ses vêtements pour s'habiller, semblant sur le point de s'évanouir pour de bon ou il ne savait quoi. Munemori repoussa complètement la couverture pour venir se mettre à genoux près de lui, lui prenant le visage entre ses deux mains pour lui faire tourner la tête vers lui, terrifié tout à coup par son air.

– Stop, respire doucement, t'es trop pâle. On est toujours là, je te rappelle.

Leur père l'avait... Bon, soit, mais eux restaient ses frères ! Ils ne le comprenaient pas tout à fait, heu, pas du tout, même, mais il restait leur petit frère, rien ne pouvait changer ça. Munemori le prit dans ses bras et le serra cotre lui avec force, l'empêchant de s'esquiver lorsqu'il fit mine de bouger et s'enfuir. Ce n'est pas le moment de s'isoler ! Leur père avait peut-être dit ça sous l'effet de la colère, ils allaient se réconcilier un peu plus tard, tout allait bien se passer. Josuke sortit enfin de son immobilisme pour venir près d'eux à son tour, frottant doucement le dos de leur frère pour le calmer, lui répétant de respirer. Oui, du calme, tout allait finir par s'arranger, non ? Avec un peu de temps. Et de patience. Et d'énergie. Mais eux ne comptaient pas le laisser tomber, même s'ils n'y comprenaient rien. Qu'il respire, surtout, il allait faire un malaise.

– Comment vous faites pour réagir comme ça ? bafouilla-t-il. Vous... Il vaudrait mieux que... Je parte maintenant... Vous allez avoir des ennuis, vous aussi, sinon...

– Mais tu n'iras nulle part, mon petit, répliqua-t-il d'un ton ferme. Des "ennuis" ! Tu vas en avoir si tu essayes de filer loin d'ici dès maintenant, là oui. Et pourquoi on réagit comme ça, c'est évident, je te rappelle que tu es notre petit frère, juste pour information.

– Ce n'est pas parce que Père pense cela que nous allons te rejeter aussi.

Evidemment ! Père était encore furieux mais lorsqu'il sera calmé, il regrettera sûrement ce qu'il avait dit, il y reviendra, tout allait finir par s'arranger, il n'y avait pas d'inquiétude à se faire, s'ils mettaient tous les deux de l'eau dans leur vin, la situation s'arrangera très vite. Josuke tendit la main pour la poser sur l'épaule de leur frère, qui avait un air étrange. Allez, un peu de baume au cœur ! Il fallait laisser leur père évacuer sa rage puis il pourra de nouveau lui parler et mettre tout à plat. Il l'affirma bien fort avec un sourire encourageant, convaincu de ce qu'il avançait. Kimmitsu semblait sceptique mais il verre,a il verra, tout se passera bien. Il incita son frère à aller se laver avant de venir manger, voulant qu'il se passe au moins de l'eau sur la figure, il avait mauvaise mine. Dès qu'il fut sorti, Munemori perdit son sourire, soupirant longuement, lèvres pincées.

– Les choses peuvent vraiment s'arranger, pas vrai ? marmonna-t-il en tournant la tête vers son aîné. Père n'a pas un caractère très facile alors... Il a vraiment mal pris que Kimmitsu ai rompu les fiançailles. Puis, il y a cette histoire de départ.

Il soupira encore plus fort, se frottant le visage des deux mains, le cœur recommença à battre trop vite.

– Qu'est-ce qu'on fera s'il ne se réconcilie jamais avec père ? Qu'est-ce que tu feras ? J'ai peur qu'il finisse par rester pour de bon en France, qu'il ne veuille plus revenir ici ou que... Ce sera toi le chef de famille, dans quelques années. Tu accepteras qu'il revienne ? Je ne comprend pas pourquoi il veut partir mais... Je ne sais pas, cette histoire rend malade. Et s'il lui arrive quelque chose de grave, en France ?
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Josuke Nakajima
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Josuke Nakajima
MessageSujet: Re: Entraînement entre frères   Entraînement entre frères EmptyVen 4 Déc - 17:55

Kimmitsu – Je t'empêche de dormir ? murmura-t-il.

Josuke – Ne pense pas à ça. Laisse-toi aller, ça ira mieux après, je suis là.

Kimmitsu sembla enfin se laisser aller, arrêtant de lutter comme il le faisait depuis le début. Il devait évacuer, pleurer une bonne fois pour se remettre. Les choses allaient s’arranger, Josuke en était sûr. Il ne bougea pas d’un millimètre, serrant son frère avec force dans ses bras pour le réconforter et lui apporter un peu de soutien et de chaleur, pour lui montrer qu’ils étaient là. Non, il ne comprenait pas sa décision, pas entièrement, mais il ne comptait pas l’abandonner. Kimmitsu était son petit frère, il était de sa famille. Et on protège sa famille, on prend soin des siens. D’accord, leur père était furieux, il ne comprenait pas et pensait être trahi. C’était légitime, autant parler platement... Mais Kimmitsu n’avait pas tort sur toute la ligne, leur famille suivait les traditions et ils devaient accepter ceux qui ne parvenaient pas à les suivre, les aider, les encourager.

La nuit fut relativement courte et agitée, Josuke étant resté à côté de son frère par peur qu’il ne pleure tout seul s’il se réveillait en plein milieu de la nuit. Il n’avait pas mal dormi à proprement parler mais s’était toujours tenu prêt à réagir si Kimmitsu avait besoin de lui, réclamait quelque chose ou quoi que ce soit du même genre. Il refusait de le voir se laisser aller pour cette dispute, Josuke voulait aider son frère, le soutenir, lui montrer qu’il n’était pas tout seul et qu’il ne devait surtout pas abandonner. C’était aussi son rôle de grand frère, passer la nuit avec son petit frère pour le rassurer et ne pas l’abandonner, le réconforter le plus possible pour qu’il puisse aller de l’avant. Josuke resta donc bien à côté de son frère, le laissant se blottir dans ses bras pendant toute la nuit jusqu’à ce que les premiers rayons du soleil ne les réveillent. Avec le débarquement brutal de leur père dans la chambre, prêt, canne à la main alors que ses trois fils s’étaient relevés brusquement à cause du bruit.

Père – C'est bon, Kimmitsu. Fais donc ce que tu veux, maintenant. Reste ou pars, peu m'importe. Je te renie, tu n'es plus mon fils à mes yeux.

...

Josuke regarda alternativement son père et Kimmitsu, n’en croyant pas ses oreilles, cherchant une solution. Il venait de le renier... Restant impassible, tout comme Munemori, il ne fit aucun mouvement avant que leur père ne sorte de la chambre. Leur petit frère réagit au ralenti, prenant ses vêtements sûrement pour faire quelque chose et ne pas rester inactif. Ce fut Munemori qui réagit le premier, se plaçant juste à côté de Kimmitsu en prenant sa tête entre ses mains tout en prononçant des paroles de réconfort. Avec un temps de retard, Josuke se rapprocha de ses frères, les couvant tous les deux d’un regard inquiet sans cesser de chercher une solution. Il posa une main sur l’épaule de Kimmitsu dans le but de le rassurer, lui montrer qu’il n’était pas seul, qu’eux étaient toujours là malgré la situation. Il lui frotta ensuite le dos, cherchant à le calmer, désemparé par ce qui venait de se passer. Son petit frère n’avait pas été préparé à cela, il accusait tout d’un coup et prendrait des semaines, voire des mois à le digérer. Et s’il partait plus tôt... ? Mais non. Il fallait juste parler à leur père. Qui avait, visiblement, l’esprit incroyablement fermé...

Kimmitsu – Comment vous faites pour réagir comme ça ? bafouilla-t-il. Vous... Il vaudrait mieux que... Je parte maintenant... Vous allez avoir des ennuis, vous aussi, sinon...

Munemori – Mais tu n'iras nulle part, mon petit, répliqua-t-il d'un ton ferme. Des "ennuis" ! Tu vas en avoir si tu essayes de filer loin d'ici dès maintenant, là oui. Et pourquoi on réagit comme ça, c'est évident, je te rappelle que tu es notre petit frère, juste pour information.

Josuke – Ce n'est pas parce que Père pense cela que nous allons te rejeter aussi.

Josuke avait pris un ton ferme qui laissait entendre qu’aucune discussion n’était possible là-dessus. Il était persuadé que Kimmitsu pensait à partir, que cette idée l’avait taraudé toute la nuit, mais il en était hors de question. Il était trop jeune, trop inexpérimenté, il ne pouvait pas partir comme cela sur un coup de tête. Rien ne serait plus dangereux... Alors, non, pas question qu’il s’en aille. Ils étaient toujours là, eux, ils le soutenaient, l’aimaient, quels que soient ses choix. Du moment qu’il respecte ses valeurs, ses principes, ne trahisse pas ce qu’il était au fond de lui. Munemori ajouta que les choses allaient s’arranger, que leur père se calmerait à un moment. Mais la tête de Kimmitsu en disait long... Il n’y croyait pas. Tout comme Josuke, pour être honnête. Comment leur père pourrait-il changer d’avis ? Ils le connaissaient. Leur petit frère avait refusé un mariage et annoncé qu’il voulait vivre en France... Il perdait son fils et son honneur d’un seul coup, ce qui, pour lui, devait être insurmontable. Non, leur relation ne s’arrangerait pas... Pas à moins que Kimmitsu ne change d’avis, ce qui n’était pas près d’arriver.

Munemori incita leur petit frère à aller se laver avant de manger et Josuke approuva d’un signe de tête, s’inquiétant vraiment de son état. Il ne cessait de le couver du regard avec l’impression qu’il allait s’effondrer par terre d’un moment à l’autre et recommencer à pleurer, laisser tomber sans parvenir à se relever. C’était dur, très dur, et il avait besoin d’énormément de soutien. Surtout qu’il avait compris, tout comme Josuke, que non, leur père ne reviendrait pas sur ses paroles... Par bonheur, Kimmitsu écouta Munemori et sortit de la chambre sous leur regard. Dès que la porte fut refermée, son frère soupira longuement, le sourire qu’il arborait s’étant fané sur ses lèvres. Donc, il avait des doutes, lui aussi...

Munemori – Les choses peuvent vraiment s'arranger, pas vrai ? marmonna-t-il en tournant la tête vers son aîné. Père n'a pas un caractère très facile alors... Il a vraiment mal pris que Kimmitsu ai rompu les fiançailles. Puis, il y a cette histoire de départ.

Josuke grimaça, se levant pour s’habiller à son tour, mal à l’aise. Il ne pouvait pas le rassurer. Pas là-dessus. Comme le soulignait Munemori, leur père n’avait pas un caractère très facile, était rancunier et ne supportait pas qu’on le contredise. Alors, lorsqu’il s’agissait d’un tel manque de respect, il valait mieux ne pas espérer pour éviter la chute brutale à la fin. Son frère avait soupiré un peu plus fort, frottant son visage avec ses mains. Chut, qu’il respire, ils allaient trouver une solution. Inquiet, Josuke termina de s’habiller en vitesse, jetant un regard à Munemori qui ne semblait pas au mieux de sa forme, lui non plus.

Munemori – Qu'est-ce qu'on fera s'il ne se réconcilie jamais avec père ? Qu'est-ce que tu feras ? J'ai peur qu'il finisse par rester pour de bon en France, qu'il ne veuille plus revenir ici ou que... Ce sera toi le chef de famille, dans quelques années. Tu accepteras qu'il revienne ? Je ne comprend pas pourquoi il veut partir mais... Je ne sais pas, cette histoire rend malade. Et s'il lui arrive quelque chose de grave, en France ?

Josuke – Pour commencer, calme-toi, nous trouverons une solution, dit-il en se rapprochant de son frère et en posant ses mains sur ses épaules. D’accord ? Retiens au moins cela, nous ne le laisserons pas tout seul. Il a besoin de nous, maintenant plus que jamais. Alors, on reste soudés, forts et on tient le coup pour lui.

L’aider à se calmer d’abord, éviter de le voir tomber par terre, s’évanouir alors que Kimmitsu avait besoin d’eux. C’était la priorité. Ils ne l’abandonneraient pas, ça, jamais. Leur père le reniait peut-être mais il restait leur petit frère et Josuke ne pouvait se résoudre à l’ignorer ou à lui fermer la porte alors que toute sa famille était ici. Pas tant qu’il respectait ses principes, les valeurs qu’il défendait. C’était la seule condition qui lui tenait à cœur, le seul point non-négociable. Qui ne poserait pas problème à Kimmitsu, il en était certain. Josuke tenait toujours son frère par les épaules, attendant qu’il se reprenne un peu, que son souffle redevienne plus calme. Allez, on respire, tout va bien se passer. Il mima l’inspiration et l’expiration, incitant Munemori à en faire de même. Là... Il allait un peu mieux ?

Josuke – Il ne lui arrivera absolument rien là-bas, on va l’aider à être bien préparé et on doit avoir confiance en lui. En plus, il ne part pas tout de suite mais dans quelques années, nous devons lui faire confiance et croire en ses capacités. Ensuite, bien sûr que non, je ne vais pas l’empêcher de venir ici ! Pour quel frère me prends-tu ? Il est et sera toujours le bienvenu ici, pour moi, tant qu’il ne déroge pas à ses principes et respecte ses valeurs. Toute sa famille est ici... Comment veux-tu que je le coupe de ses racines ? Ce serait pire que tout...

Munemori – Il part l'année prochaine, je te signale... Et... je sais pas, j'avais peur que tu... Enfin bref. Qu'est-ce qu'on peut faire, pour père ? Et comment on doit expliquer ça à nos frères et sœurs ?

Ah... L’année prochaine. Dans quelques mois. Donc pas très longtemps. Du tout. Bon. D’accord, pas de problème, ça précipitait un peu les choses mais ce n’était pas si grave que cela. Josuke grimaça une nouvelle fois avant de relâcher son frère pour croiser les bras, incapable de rester impassible dans de telles conditions, recherchant une solution pour leur père et leurs frères et sœurs. Pour leur père, à vrai dire, il ne savait pas. Il était perdu et avait déjà essayé de lui parler, de le calmer sans que cela ne change quoi que ce soit. Pour leurs frères et sœurs, c’était à Kimmitsu de leur parler, ils ne devaient pas intervenir là-dedans. Ils seraient là, bien sûr, l’aideraient à l’annoncer et lui apporteraient un soutien moral, mais c’était tout.

Josuke – Nous ne devons pas intervenir pour nos frères et soeurs, c’est à lui de leur annoncer et de leur expliquer. Parler de son projet nous-mêmes, c’est prendre le risque de mal expliquer et d’aggraver les choses. Donc nous devons le laisser faire. L’aider, le soutenir, mais ne surtout pas intervenir.

Josuke fit une pause, cherchant encore une solution pour leur père. Mais il n’en voyait pas. Aucune... Il avait essayé ! Il lui avait parlé et cela n’avait absolument rien changé, alors que pouvaient-ils faire de plus ? C’était peine perdue... Il leva un regard un peu coupable à Munemori, prenant un air triste et dépité. Non, il ne voyait pas. Cette fois, il n’avait aucune solution...

Josuke – Je... ne sais pas pour Père. J’ai essayé de lui parler, de lui ouvrir les yeux ou d’expliquer les motivations de Kimmitsu mais cela n’a rien changé. Je ne sais pas quoi faire.

Munemori – Je peux essayer, moi ? Parce que Kimmitsu, je ne suis pas sûr que père veuille encore lui adresser la parole...

Lui... Il voulait essayer de parler à leur père ? Pour être honnête, Josuke pensait que c’était une très mauvaise idée. Il avait déjà essayé lui-même et il n’était pas sûr qu’une autre discussion change quoi que ce soit. Lui avait eu de la chance parce qu’il était le futur chef de famille, mais Munemori... Mieux valait ne pas jouer avec le feu et réessayer plus tard ou patienter. Le temps, c’était la seule chose dont ils avaient besoin... Josuke répondit négativement d’un signe de tête, pas convaincu du tout de cette idée de « parler avec leur père » et posa une main dans le dos de son frère pour le pousser à avancer vers la sortie de la chambre.

Josuke – Sans vouloir te vexer, je ne pense pas que ce soit une très bonne idée. Il faut du tact et je n’ai pas réussi... Laissons le temps faire les choses. Allons manger, je préfère ne pas laisser Kimmitsu tout seul.
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