Avril 1932. Les soucis mondiaux s'étendent.
 
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 La Grande Guerre

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Anonymous Invité
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MessageSujet: La Grande Guerre   La Grande Guerre EmptyMar 17 Nov - 11:18

Estelle – Vous avez réussi à oublier vos affaires dès le premier cours ? Vous tenez tant que ça à commencer l'année en ne prenant pas le moindre soin de vos études ?

Son élève rougit un peu puis emprunta du papier et de quoi écrire à ses voisins, près de lui, pendant qu'Estelle terminait le tour de la classe pour donner à chacun un petit manuel spécifique, avec des exercices et entraînements, qui leur serviront tout au long de l'année pour se préparer au baccalauréat de l'année suivante. Il était temps de s'y mettre, au plus tôt ! Ils étaient en première, l'avant-dernière année passée au pensionnat, alors un peu de cœur à l'ouvrage. Une fois le tout distribué, elle grimpa sur l'estrade, posant les fascicules en trop sur son bureau, se tournant ensuite vers sa classe. Pas la peine de se présenter avec cette classe, ils la connaissaient depuis leur entrée au collège, aussi commença-t-elle par leur souhaiter un bon retour au pensionnat, en espérant que leurs vacances se soient bien passées. Plusieurs élèves échangèrent des coups d'œil et elle entendit des chuchotements sur "les orages" mais n'y fit pas attention. Revenir là-dessus était inutile, surtout à la rentrée. De plus, ça ne concernait personne d'autre que Gabriella. Pourvu qu'elle n'en fasse pas trop dès le début... Elle était épuisée par ces fameux orages. La jeune femme se redressa un peu puis dit à sa classe de prendre de quoi noter, ainsi que d'ouvrir leur livre au premier chapitre.

Estelle – Nous allons commencer l'année en abordant la Grande Guerre. Je précise que je sais que c'est un sujet sensible pour beaucoup d'entre vous, mais l'étudier est primordial, il s'agit de notre mémoire et personne ne doit en oublier les faits et conséquences. Mademoiselle Moulin, veuillez nous lire à voix haute le témoignage qui se trouve en page huit.

La jeune fille visée cligna des yeux d'un air un peu hébété, comme si elle revenait tout juste à la réalité, puis hocha la tête et se leva, prenant son livre avant de lire, debout près de son bureau. Estelle s'assit au sien en écoutant, crayon en main, l'encourageant d'un regard lorsqu'elle buta sur un mot. C'était un témoignage de Philippe-André Edmond, un ancien député, racontant comment la Grande Guerre avait été déclenchée, quelles en étaient les principales raisons, comment l'Europe s'était enflammée en cette année 1914. Cette matière n'était jamais l'une des plus aimées... Beaucoup de jeunes avaient perdu leurs parents ou une partie de leurs familles, dans les tranchées, c'était aussi douloureux pour eux que pour les enseignants lorsqu'ils se ravivaient les souvenirs, entre la famille déchirée, les tranchées. Valentin, par exemple, avait pris l'habitude de fuir la salle des professeurs pour se réfugier dans un bureau lorsque ses collègues enseignant l'histoire abordaient ce sujet avec les élèves, afin de ne pas en entendre parler. Il estimait en "rêver assez souvent" pour ne pas entendre des échos au travail. Il était certain qu'entre sa jambe blessée et ses souvenirs... Estelle était adolescente, lorsque la guerre avait été déclenchée, elle se souvenait de tous ces hommes partant au front, des femmes allant en usine pour remplacer les hommes, de la terreur en lisant les nouvelles dans les journaux, du retour des "Poilus" comme on les surnommait.

A la fin de la lecture, la professeur remercia son élève en lui disant de se rasseoir, reprenant ensuite le début de cette histoire affreuse pour y ajouter plus de détails et revenir sur le contexte historique, social et culturel de l'Europe d'avant-guerre. Les jeunes étaient penchés sur leurs cahiers, prenant des notes, se replongeant ainsi dans le contexte d'une France sortant d'un premier conflit avec l'Allemagne, certes moins violent et destructeur, mais qui avait profondément blessé la fierté nationale, laissant un peuple bafoué et avide de vengeance, un gouvernement instable et détesté, deux pays voisins se vouant une haine profonde, ce qui était toujours le cas aujourd'hui et même bien plus. Estelle s'attarda tout d'abord sur le contexte social du pays et son organisation politique. De temps à autre, un élève levait la main pour poser une question ou faire répéter un certain point. D'ordinaire, Estelle passait entre les rangs en parlant, vérifiant que chacun notait bien et juste, mais aujourd'hui, sa grossesse bien avancée ne lui permettait que peu de déplacements avant d'être bien fatiguée. Enfin, les lycéens étaient parfaitement capable de comprendre ça, ils étaient assez grands, maintenant.

Estelle – Dans toutes les écoles, on apprenait aux enfants à détester les Allemands. Ils étaient "l'Ennemi" déclaré du peuple Français. Lorsque la Grande Guerre a été déclarée, ce fut tout d'abord vécu comme une revanche, chacun était persuadé que tout sera terminé avant Noël. Les soldats sont partis le cœur en fête, le peuple criait sa joie de cette revanche sur l'Allemagne, personne ne pouvait savoir que le conflit allait autant s'enliser. Regardez à la page neuf et dix, vous pouvez voir des dessins et photos des ces instants, lors du départ au front, après la Mobilisation Générale.

Elle leur montra son propre livre en indiquant les photos du doigt, leur laissant deux ou trois minutes pour bien regarder. L'ordre de mobilisation prenait presque toute la neuvième page du manuel, clamant ce texte qui avait envoyé à la mort des millions de personnes. Qui aurait pu prédire ce qui allait se produire ? L'enfer des tranchées ? Les choses avaient bien changé, depuis, mais ce conflit avait une horreur particulièrement intense, qui avait donné lieu à de profonds bouleversements.

Estelle – C'est lors de conflit que nous avons vu apparaître de nouvelles armes. Qui peut les décrire à la classe ? Mademoiselle Brian, par exemple ?
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Anonymous Invité
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MessageSujet: Re: La Grande Guerre   La Grande Guerre EmptyVen 11 Déc - 17:06

Adeline rougit un peu lorsque Jasper l'embrassa longuement et discrètement sur les lèvres lorsqu'ils s'assirent sur le banc, au fond de la classe. Elle aurait adoré pousser plus loin mais ce n'était guère le moment, pas en plein cours d'histoire. Beaucoup bavardaient, se taisant juste lorsque la prof commença par leur souhaiter un bon retour, avec le discours de rentrée habituel. Ils étaient en première, dernière ligne droite avant l'année du bac, c'était assez stressant. La jeune fille sortit son crayon-plume de sa petite boîte en bois, avec de l'encre, sortant aussi son cahier, prête à prendre des notes. Elle partageait son livre avec Jasper, afin qu'ils puissent se partager qui transportait quoi et ne pas avoir un sac trop lourd. Premier chapitre, la Grande Guerre, où comment attaquer l'année par un sujet respirant la joie et la bonne humeur. Adeline fit une petite moue, lissant sa jupe d'uniforme et mettant tout bien en place. S'habiller de nouveau ainsi était un peu bizarre, quand on venait de sortir de deux mois à s'habiller comme on le voulait, sans soucis ni prise de tête.

– Nous allons commencer l'année en abordant la Grande Guerre. Je précise que je sais que c'est un sujet sensible pour beaucoup d'entre vous, mais l'étudier est primordial, il s'agit de notre mémoire et personne ne doit en oublier les faits et conséquences. Mademoiselle Moulin, veuillez nous lire à voix haute le témoignage qui se trouve en page huit.

Amanda semblait se réveiller, à moitié avachie sur son bureau, mais se redressa presque aussitôt en se mettant debout et en prenant son livre. Les débuts de la Grande Guerre, comment cette horreur avait été déclenchée. Elle eut un petit frémissement, reculant pour s'appuyer contre le dossier du banc en écoutant leur camarade lire le témoignage, d'une voix claire et forte, debout à côté de son bureau. Jasper prit tout à coup la sienne sous le banc pour la serrer, avec un petit sourire. Lui aussi avait déjà dû lire ou entendre beaucoup de témoignages, étant donné qu'il avait aussi un père dans l'armée. Elle le remercia du regard, écoutant ensuite Amanda lire le texte, le déroulé des événements ayant précédé la mobilisation générale, en 1914. Ce n'était pas si loin que cela mais Adeline avait pourtant l'impression que tout cela s'était déroulé dans une autre vie. Lorsqu'on n'avait pas vécu ses horreurs, rien vu de ses propres yeux, c'était difficile à croire, et pourtant... La France et l'Allemagne avaient de gros comptes à régler, les deux nations se détestaient, même si cela n'avait rien à voir avec la haine légendaire entre l'Angleterre et la France. Elle échangea un regard avec Jasper, restant silencieuse. Une fois qu'Amanda eut terminé de lire, elle se rassit très vite. Pourvu que ce chapitre passe assez vite, en tout cas, ce n'était pas la partie la plus facile de l'année, surtout dès le début de l'année.

Leur professeur enchaîna en reprenant le contexte historique et social de l'époque, revenant sur ce qui avait marqué le pays depuis le tout début du vingtième siècle, l'ère de l'industrialisation, les voitures fleurissant un peu partout, au milieu des fiacres, l'émergence du cinéma, les premiers courts-métrages en couleur en 1901, la séparation de l'Eglise et de l'Etat en 1905. Madame Chevreuil ne s'arrêtait pas sur les détails, pour le moment, plaçant d'abord le contexte de l'époque pour leur donner une vision d'ensemble des dix premières années de ce siècle. Adeline avait récupéré sa main pour prendre des notes avec soin, dans le silence qui était retombé sur les rangs. Au moins, avec cette prof, ils avaient le temps de noter et de poser pas mal de questions, afin de bien comprendre, ce n'était pas le cas pour tous les enseignants. La prof passait entre les rangs tout en parlant, marchant doucement, son ventre bien gonflé maintenant. Adeline eut un petit sourire, se demandant quand était prévu l'accouchement. D'ailleurs, qui allait la remplacer pendant son congé maternité ? Elle espérait que ce ne sera pas leur **rd de prof de Français, ce type était véreux, colérique et il racontait très mal, pas un bon prof.

– Dans toutes les écoles, on apprenait aux enfants à détester les Allemands. Ils étaient "l'Ennemi" déclaré du peuple Français. Lorsque la Grande Guerre a été déclarée, ce fut tout d'abord vécu comme une revanche, chacun était persuadé que tout sera terminé avant Noël. Les soldats sont partis le cœur en fête, le peuple criait sa joie de cette revanche sur l'Allemagne, personne ne pouvait savoir que le conflit allait autant s'enliser. Regardez à la page neuf et dix, vous pouvez voir des dessins et photos des ces instants, lors du départ au front, après la Mobilisation Générale.

Jasper tourna les pages pour voir ce qu'elle indiquait, écartant ensuite le bras pour qu'Adeline puisse voir aussi. Des photos représentant des colonnes entières de soldat, fusils sur l'épaule, sac sur le dos, saluant leurs proches avant de partir. En effet, l'humeur était plutôt à la fête, c'était glaçant lorsqu'on savait e carnage qui s'était produit ensuite. Des millions de morts, des mutilés, des blessés, des orphelins et veuves de guerre. Et tout pourrait recommencer. Celui qui oublie L'Histoire est condamné à la revivre. Toute la classe était assez mal à l'aise, à présent, les élèves ayant perdu des membres de leur famille dans les tranchées étaient très nombreux.

– C'est lors de conflit que nous avons vu apparaître de nouvelles armes. Qui peut les décrire à la classe ? Mademoiselle Brian, par exemple ?

Elle hocha la tête, se levant à son tour. Madame Chevreuil observait ses gestes, afin de transcrire à haute voix à la classe, traduisant le langage des signes utilisés par Adeline. Elle parla tout d'abord des chars, nouveaux, puissants, dévastateurs, qui avaient traversé les Ardennes pour envahir l'Est et le Nord de la France, des canons et nouvelles armes pour bombarder les lignes ennemies. Elle évoqua ensuite le gaz moutarde, qui pouvait brûler les poumons et les yeux, asphyxier, tuer d'une manière douloureuse et terrible. Et les autres armes... Ce fut assez long car elle tâchait de donner tous les détails qu'elle connaissait, pour ceux qui étaient moins à l'aise sur le sujet. Lorsqu'elle eut terminé, elle put se rasseoir, reprenant son crayon en remerciant d'un sourire Amanda qui avait levé le pouce dans sa direction pour la féliciter. Prenant un petit papier, elle écrivit rapidement un mot qu'elle fit glisser vers Jasper.

"Pas trop fatigué de la rentrée ? Je m'inquiète pour toi, tu as été malade longtemps. Comment ça s efait que tu ai eu autant de fièvre ? Tu as eu des ennuis avec ton don ?"
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Anonymous Invité
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MessageSujet: Re: La Grande Guerre   La Grande Guerre EmptyMar 22 Déc - 22:11

– Dans toutes les écoles, on apprenait aux enfants à détester les Allemands. Ils étaient "l'Ennemi" déclaré du peuple Français. Lorsque la Grande Guerre a été déclarée, ce fut tout d'abord vécu comme une revanche, chacun était persuadé que tout sera terminé avant Noël. Les soldats sont partis le cœur en fête, le peuple criait sa joie de cette revanche sur l'Allemagne, personne ne pouvait savoir que le conflit allait autant s'enliser. Regardez à la page neuf et dix, vous pouvez voir des dessins et photos des ces instants, lors du départ au front, après la Mobilisation Générale.

Ils étaient vraiment obligés de débuter l'année avec un sujet aussi joyeux que celui-ci ? Jasper retint un long soupir, feuilletant les pages puis poussant un peu le livre vers Adeline pour qu'elle puisse regarder aussi. Cette guerre, son père, enfin son ancien père, l'ordure qui l'avait "élevé" avait passé ben des heures à lui en parler, lui fourrant dans la tête jusqu'au moindre détail, même les plus horribles. Il ne regarda pas les photos, n'ayant guère envie de se plonger là-dedans une fois de plus, il avait déjà donné. Faisant tourner son crayon entre ses doigts, il desserra un peu la cravate de son uniforme, peu à l'aise en devant le porter de nouveau, après deux mois de liberté. Antoine était assis un peu plus loin devant, toujours aussi concentré, comme à son habitude, et Genji était dans un autre coin, à l'opposé, sans doute moins concentré et plus perdu que les autres élèves. Jaz n'avait pas encore eu de véritable occasion de lui parler, il n'avait pu se lever que très peu de temps avant la rentrée, à cause de la fièvre. Il n'avait pas l'air méchant, en tout cas. La plupart des personnes de leur classe n'étaient pas spécialement très concentrées non plus, d'ailleurs, beaucoup regardaient autre chose que leur livre ou chuchotaient entre voisins de table. On pouvait bien sentir l'ambiance de rentrée, avec les embrassades, les retrouvailles et tout ce qui s'ensuit. Si seulement l'été avait pu être un peu plus calme, tout aurait été parfait. On pouvait compter sur leurs parents biologiques pour tout gâcher.

– C'est lors de conflit que nous avons vu apparaître de nouvelles armes. Qui peut les décrire à la classe ? Mademoiselle Brian, par exemple ?

Il leva le nez pour la regarder lorsqu'elle se mit debout près de son bureau, "lisant" ses gestes sans attendre que la prof ne fasse la traduction à voix haute pour toute la classe. S'appuyant sur sa main, coude sur la table, il plissa un peu les yeux, tête penchée, l'observant en détails bien plus qu'il ne se concentrait sur la description précise des nouvelles armes de guerre qu'elle donnait à la classe. Chars, mitraillettes, gaz moutarde, obus... Et bientôt les dons. L'Homme ne cessera jamais d'inventer des armes toujours plus puissantes et destructrices, c'était ainsi que ça fonctionnait, depuis le commencement. Adeline parla longuement, elle aussi bien au fait de tous ces trucs grâce à son propre père. On reconnaissait très aisément les fils et filles de soldats car ils étaient capables de reconnaître le grade de toute le monde simplement avec les galons d'uniforme et de citer bon nombre d'armes, puissantes ou non, utilisées par l'armée. Sans oublier leur connaissance de la plupart des chants de l'armée. Jasper aimait bien la chanson "La Strasbourgeoise", rythmée, profonde, presque envoûtante, qui se retenait facilement et se chantait bien. La majorité des chants militaires étaient très beaux, il était forcé de l'avouer. Une fois sa démonstration achevée, Adeline se rassit à côté de lui, prenant ensuite un bout de papier pour griffonner dessus. Il le réceptionna discrètement, y jetant un œil.

"Pas trop fatigué de la rentrée ? Je m'inquiète pour toi, tu as été malade longtemps. Comment ça se fait que tu ai eu autant de fièvre ? Tu as eu des ennuis avec ton don ?"

Hum, oui et non. Il commença à répondre puis interrompit son geste lorsque la prof leur dit qu'elle allait leur faire écouter des témoignages, sur gramophone, reprenant ensuite le papier lorsqu'elle installa ce qu'il fallait. Dans leur classe, l'agitation avait augmenté d'un coup, entendre des témoignages comme là était toujours plus intéressant que de les lire simplement dans leurs livres d'histoires.

"Il y a eu une évolution de mon don, oui, mais ce n'est pas que ça. Comme il s'est passé pas mal de choses cet été, il y a la fatigue et la tension qui ont joué aussi, j'ai été un peu malade. Ce n'est pas à cause du boulot que je fais avec Adrien, j'avais stoppé cet été. Tu sais qu'il a pas mal de soucis avec sa femme."

Réfléchissant, il fronça un peu le nez en pinçant les lèvres, cherchant les meilleurs mots pour expliquer ce qui s'était passé sans trop s'étendre sur les détails. Il n'avait encore raconté à personne ce qui s'était vraiment passé avec le Colonel ni pourquoi il avait toujours aussi peur de lui. Ni à Adeline, ni à Laura, ni à Antoine, ni à personne. Pourtant, l'avoir revu avait beaucoup joué sur son moral, et donc sa résistance, au mois d'août. Plonger tout habillé dans un lac glacé en pleine nuit n'avait pas dû beaucoup aider non plus mais il ne pouvait pas laisser sa petite sœur se noyer. Donc, que devait-il dire, expliquer... Il hésita un moment, tapota doucement le bout du crayon contre le bureau en bois, tout en écoutant vaguement le témoignage oral diffusé dans la salle de classe.

"On a pas encore eu le temps de se parler, trop. En fait, cet été, ma mère a voulu retirer ma petite sœur du pensionnat, sans doute pour l'éduquer dans un lycée de jeunes filles, pour être une bonne petite femme au foyer, et la marier à je ne sais quel bon parti, comme elle dit. Pour éviter ça, on devait être retirés de leur garde et j'ai été obligé de dénoncer à la police que que faisait mon père."

Il passa déjà cela discrètement à sa petite amie, faisant ensuite semblant d'écouter en sentant le regard de la prof glisser sur lui. Jasper n'avait jamais vraiment aimé l'histoire, au contraire des sciences et des mathématiques. Une fois l'attention de madame Chevreuil détourné, il se pencha de nouveau pour écrire, sur le même papier.

"On vit chez le sous-directeur, maintenant. Il s'est marié cet été avec Solène, on l'a su lorsqu'il est revenu en France, je ne te dis pas le choc. Comment ça s'est passé, ton voyage là-bas, en juillet ? Ça n'a pas été trop dur de s'adapter ?"
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Anonymous Invité
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MessageSujet: Re: La Grande Guerre   La Grande Guerre EmptyDim 10 Jan - 12:42

Adeline s’était beaucoup inquiétée ! Et elle n’avait pas pu aller le voir, avec ça, devant rester avec son père qui venait de se casser la jambe et avait eu besoin d’aide, le temps de s’adapter, ils habitaient dans un immeuble et elle avait dû se charger de pas mal de choses pour lui faciliter la vie. Il commença à répondre puis dû stopper lorsqu’une certaine agitation saisit la classe, leur prof annonçant qu’elle allait leur faire écouter un témoignage. Adeline aimait vraiment beaucoup cette prof, cependant, pour ce ours précis, elle était déjà très au fait de ce qui s’était produit durant la grande guerre, son père le lui avait raconté en long et en large et elle avait entendu bien des témoignages d’anciens soldats, la plupart mutilés, lui conter les horreurs des tranchées. Jasper aussi avait dû en entendre beaucoup, étant donné qu’il était lui aussi issu d’une lignée de soldats. Elle reporta son attention sur lui, grignotant un bout de son crayon plume, dans un geste habituel de nervosité, dont elle n’arrivait pas à se débarrasser. Le silence se fit pour laisser la place à une voix grave et rocailleuse, un jeune lieutenant racontant ce qu’il avait vu et vécu. Elle écouta le début le temps que Jaz fasse glisser le papier vers elle.

"Il y a eu une évolution de mon don, oui, mais ce n'est pas que ça. Comme il s'est passé pas mal de choses cet été, il y a la fatigue et la tension qui ont joué aussi, j'ai été un peu malade. Ce n'est pas à cause du boulot que je fais avec Adrien, j'avais stoppé cet été. Tu sais qu'il a pas mal de soucis avec sa femme."

Et donc, quel était le véritable problème, alors ? Il ne lui expliquait rien du tout ! Bien sûr que l’été avait dû être agité pour tout le monde lorsqu’Adeline et Victoire étaient revenues du Japon, elle avait trouvé le pays entier enseveli sous des orages d’apocalypse, sans que personne ne puisse leur expliquer ce qui se passait. Ce n’est qu’à son retour à la caserne que son père avait pu lui dire que ces orages étaient causés par un don et encore plus tard qu’ils avaient su que la coupable était la générale. Depuis, Adeline était littéralement terrorisée par cette femme et le pouvoir qu’elle possédait, un tel don la rendait incroyablement dangereuse et terrifiante. Jasper semblait hésiter, tête baisée, tapotant son crayon doucement contre leur table en bois. C’était si dur que cela ? Elle fronça légèrement les sourcils, commençant à songer qu’il avait dû arriver quelque chose de grave à sa petite sœur, pour qu’il se mette dans un état pareil. Il n’était pas du genre à perdre facilement son sang-froid ou à s’angoisser, sauf lorsque le problème touchait sa pette sœur, c’était bien connu. Adeline ne connaissait pas vraiment bien Laura, de son côté. Elle ne lui avait jamais vraiment parlé et avait l’impression que la fillette ne la portait pas dans son cœur.

"On a pas encore eu le temps de se parler, trop. En fait, cet été, ma mère a voulu retirer ma petite sœur du pensionnat, sans doute pour l'éduquer dans un lycée de jeunes filles, pour être une bonne petite femme au foyer, et la marier à je ne sais quel bon parti, comme elle dit. Pour éviter ça, on devait être retirés de leur garde et j'ai été obligé de dénoncer à la police que faisait mon père."

Oh, là, elle comprenait mieux. La jeune fille écarquillant légèrement les yeux en lisant ça, serrant brièvement la main de Jaz sous le bureau. Evidemment, si cela touchait sa sœur, il avait du réagir au quart de tour, tel qu’elle le connaissait. Tout raconter de ce que lui avait fait subir son père… Oui, il avait dû en être malade, lui qui détestait se plaindre et encore plus avouer ce genre de choses. Elle lui redonna le papier lorsqu’il voulut continuer à écrire, une fois l’attention de leur professeur portée sur une autre partie de la classe. L’envie de mettre Laura dans une école de jeunes filles était parfaitement logique, en soit. Elle venait d’une « bonne famille », de la Bourgeoisie, elle n’avait pas vocation à rester trop longtemps dans le système scolaire classique et devait, avant toute autre chose, apprendre être une bonne maîtresse de maison, gérer son foyer, savoir coudre, cuisiner, tenir une conversation solide, élever ses enfants, assister son mari, recevoir dignement les invités, etc. Chacun devait recevoir l’éducation qu’il fallait selon son rang social. Adeline n’était pas boursière, comme son père gagnait suffisamment bien sa vie pour lui permettre d’étudier ici en toute quiétude, en revanche, elle n’était pas issue d’une bonne famille et étant donc traitée de pauvre ou de sous-citoyenne régulièrement. Son handicap aggravait souvent la situation.

"On vit chez le sous-directeur, maintenant. Il s'est marié cet été avec Solène, on l'a su lorsqu'il est revenu en France, je ne te dis pas le choc. Comment ça s'est passé, ton voyage là-bas, en juillet ? Ça n'a pas été trop dur de s'adapter ?"

Ah oui, c’est vrai que pour ceux qui n’avaient pas suivi en direct cette histoire, ce devait être un peu choquant. Adeline récupéra le papier à son tour, trempant son stylo-plume dans la bouteille d’encre, encastrée dans un petit trou de leur table, gravée de multiples signes laissés par les élèves qui s’y étaient succédés. Il était assez visible, cet été, que Solène était amoureuse du sous-directeur, cela crevait les yeux. La façon dont il lui parlait, se comportait avec elle… Avant leur départ du Japon, ils entendaient déjà parler des préparatifs de leur mariage. Adeline trouvait cela terriblement mignon, d’autant plus que Solène avait aussi ce don de vous faire fondre. Elle était très douce et adorable, toujours très souriante et gentille comme un cœur, il était bien difficile de ne pas l’aimer.

"Au début, un peu. Comme je ne parle pas, j’ai eu du mal à me faire comprendre. Ils sont quelques uns à parler Français mais aucun ne manie la langue des signes, c’était très compliqué. Solène pouvait traduire pour moi, Victoire aidait aussi. On a surtout passé du temps avec Genji. Il est très sympa. Un peu renfermé, peut-être. J’ai été pas mal surprise de le voir au pensionnat, je ne penserai pas qu’il voudrait suivre son oncle ici, vu la nature un peu spéciale de l’école."

Elle passa discrètement la feuille pliée à Jasper avec un petit sourire. On pouvait vraiment se plaire, dans cette école, il fallait juste en apprendre les règles, officielles comme officieuses, puis savoir où se situait pour mener sa vie. Beaucoup d’élèves restaient parfaitement neutres et s’en sortait à la perfection, Genji arrivera sûrement à trouver sa place, lui aussi. Elle attendit qu’il ait eu le temps de lire avant de reprendre la feuille, écoutant vaguement l’homme qui racontait le premier Noël passé dans les tranchées, alors que chaque soldat réalisait que cette guerre était partie pour durer bien des mois, voire des années.

"Comment ça se passe, de ton côté, maintenant que vous êtes en famille d’accueil ? Tu vas y rester ou tu veux demander à être émancipé ? A seize ans, tu as l’âge qu’il faut, tu pourrais être indépendant, si le sous-directeur accepte. Après, ça dépend aussi de ce que tu veux faire plus tard. Comment vous allez vous débrouiller pour les études, après le pensionnat ? Tu vas travailler pour les payer seul ou le sous-directeur va t’aider ?"
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Anonymous Invité
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MessageSujet: Re: La Grande Guerre   La Grande Guerre EmptyVen 19 Fév - 20:02

La classe ne bougeait que très peu, la plupart des élèves prenant des notes sur le témoignage qu’ils écoutaient. Jasper croisa les bras, sur la table, silencieux et regard baissé. Il était parfois assez difficile de savoir où on en était, dans cette école. Il y avait plusieurs choses qui avaient évolué et pour la plupart, le jeune homme ne savait plus comment réagir. Il avait parfois des… Des bouffées de colère, qui le prenaient, il en voulait à tout le monde, avant de se détendre la minute d’après ou quelques heures plus tard, lorsqu’il se calmait. C’était comme ça depuis le début de l’été ! Il avait commencé à le ressentir lorsqu’ils étaient chez Antoine, en vacances, puis ça n’avait fait que s’accentuer. Parfois, son don réagissait et enflait malgré lui, il lui arrivait de perdre une part de son contrôle. Même Laura l’agaçait comme jamais, à certains moments, pour des histoires qui ne l’avaient pourtant jamais gêné à venir jusqu’ici. Et il ignorait à qui en parler, si c’était normal ou s’il avait vraiment un problème. Il avait peur de craquer, de commettre une erreur irréversible ou de blesser quelqu’un par accident avec son pouvoir. Tout venait de là, de la peur, de ne pas comprendre ce qui se passait. Un peur qu’il aimerait apprendre à contrôler, avant qu’il ne soit trop tard. Adeline fit glisser le papier vers lui, discrètement.

"Au début, un peu. Comme je ne parle pas, j’ai eu du mal à me faire comprendre. Ils sont quelques uns à parler Français mais aucun ne manie la langue des signes, c’était très compliqué. Solène pouvait traduire pour moi, Victoire aidait aussi. On a surtout passé du temps avec Genji. Il est très sympa. Un peu renfermé, peut-être. J’ai été pas mal surprise de le voir au pensionnat, je ne penserai pas qu’il voudrait suivre son oncle ici, vu la nature un peu spéciale de l’école."

C’est certain, mais il avait l’air de plutôt bien aimer, non ? Il lui rendit le papier, avec un faible sourire. Il se doutait qu’Adeline devait moins bien vivre son handicap qu’elle ne le montrait, que cela la blessait malgré tout. Il avait envie de l’aider, penser à elle et chercher un moyen de la rendre plus heureuse, ne pas rester focalisé sur sa propre peur. Il ne voulait pas se laisser entraîner là-dedans, ne pas rester coincé sur la crainte de changer, peut-être bien plus qu’il ne s’y attendait. Avancer… Peut-être seul. Même Laura, qui était sans doute la personne la plus proche de lui, l’énervait de plus en plus. Antoine… Il avait aussi parfois beaucoup de mal à le comprendre. Il était très calme, vraiment, parfois beaucoup trop, il arrivait que Jasper s’en agace car il ne suivait pas le même rythme. Il savait très bien que c’était normal, pour autant, il s’en énervait. Il avait besoin d’action, d’être entouré de personnes pouvant comprendre. L’avenir l’effrayait, il n’était même plus certain de vouloir être médecin. Nerveux, il se frotta un peu la nuque, essayant de ne pas céder à cette agitation perpétuelle qui le secouait depuis trois mois.

"Comment ça se passe, de ton côté, maintenant que vous êtes en famille d’accueil ? Tu vas y rester ou tu veux demander à être émancipé ? A seize ans, tu as l’âge qu’il faut, tu pourrais être indépendant, si le sous-directeur accepte. Après, ça dépend aussi de ce que tu veux faire plus tard. Comment vous allez vous débrouiller pour les études, après le pensionnat ? Tu vas travailler pour les payer seul ou le sous-directeur va t’aider ?"

Il ne savait pas… Son regard s’assombrit légèrement et il haussa les épaules, sans trouver quoi répondre sur le moment. Que dire, de toute manière ? Qu’il était effrayé comme un enfant découvrant le monde pour la première fois ? Qu’il ne savait plus où il en était depuis que son don évoluait ? Qu’il voulait être plus libre, émancipé, oui, mais qu’il ne pouvait tout simplement faire ça alors qu’il venait tout juste de jeter sa famille biologique pour pouvoir rester près de Laura et ne pas être séparé d’elle ? Il fit un très maigre sourire à Adeline, le cœur battant, cherchant ses mots. Il finit par écrire qu’il ne pouvait pas s’émanciper pour de bon, pas alors qu’il avait porté son plainte contre son père pour rester près de Laura, que leurs parents ne pouvaient les obliger à être trop loin l’un de l’autre.

"On verra bien, pour les études, je ne suis plus certain de vouloir être médecin. Enfin, on a encore le temps de voir venir, d’y penser."

Il lui fit un air rassurant, ne pas trop montrer sa nervosité. Tout allait bien se passer, sans aucun doute, il devait s’adapter. A force, ils allaient grandir, découvrir de nouvelles choses, surmonter les difficultés liés à leurs dons, et tout se passera mieux. Ayons confiance.
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